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Crise des «gilets jaunes»: Emmanuel Macron peine à convaincre

Alors que le mouvement des « gilets jaunes » dure depuis un mois, l’intervention du président de la République, ce 10 décembre, était très attendue. Dans une « adresse à la nation », Emmanuel Macron a tenté de rétablir le calme et le dialogue par l’annonce de mesures fortes sur le plan économique et social. Objectif atteint ?

Sur les réseaux sociaux, les réactions des gilets jaunes ou sympathisants ont été nombreuses pendant et après le discours. Indéniablement, c’est au minimum le scepticisme et l’incrédulité qui dominent les commentaires, même si un certain nombre de voix s’élèvent pour dire que du lest a été lâché par l’Elysée, que des efforts ont été faits.

« 100 euros ce n’est rien. Le pouvoir d’achat va-t-il baisser? Eh ben non alors ces 100 euros nous serviront à rien, je continue », explique une certaine Isabelle sur le groupe Facebook de la France en colère. « Il faut se battre pour la baisse de la TVA !!! », « il a parlé pour ne rien dire toujours dans ses délires », écrivent d’autres.

Certes, certains essaient de tempérer : « Mais non : il a quand même dit que les Français voulaient un nouveau modèle de démocratie, il a parlé des votes blancs, et de taxer les entreprises qui vendent en France… Rendez-vous compte, le pas de géant en seulement un mois. Certes, il faut continuer jusqu’à ce que ce soit mis en place. »… Quand d’autres étaient même vraiment convaincus : « Cette fois, il y a vraiment une avancée. Au fur et à mesure qu’il parlait, j’avais le sourire qui s’agrandissait », s’est réjoui Erwan, l’un des porte-parole des « gilets jaunes » de Rennes.

Mais très globalement, c’est plutôt : « on ne lâche rien », affirme Vincent, « gilet jaune », au micro de RFI.

Pour Pierre-Gaël Laveder, manifestant à Montceau-les-Mines, « Macron n’a pas pris la mesure de ce qui se passait ». « Chaque annonce a été huée et la première réaction a été : “On se fout de notre gueule” », a-t-il témoigné auprès de l’AFP.

« Ce n’est pas encore ce qu’on veut, s’agace de son côté Rachel, à Senlis. Moi, je veux qu’il baisse tout : qu’il baisse les logements, parce qu’on n’en a marre de payer des loyers, on ne s’en sort pas, on est au Smic. Moi, j’ai un enfant, je suis en train de me séparer, ce n’est pas possible. Il augmente le Smic ? Mais derrière, ils vont nous le taxer, on va le repayer sur nos impôts, ça sert à quoi ? », interroge la jeune femme qui dort depuis une semaine sur son spot. « L’électricité, c’est 100 euros de facture tous les mois, c’est 650 euros de loyer, c’est les mutuelles… il faut baisser tout ce qu’on paye. » Pour Rachel, c’est clair : « On sera là à Noël, au Nouvel An, on va continuer, on ne lâchera rien, c’est clair. On est tous dans la même galère, mais avec des situations différentes. Donc, une fois qu’on aura tout ce qu’on veut, les femmes seules, les retraités, on pliera les bâches. »

Dans les Bouches-du-Rhône, entre Marseille et Aix-en-Provence, des « gilets jaunes » réunis autour du braséro pour écouter l’allocution à la radio font la moue, voire sont passablement écoeurés.

Sur Twitter, le mot-clé #ActeV s’est profilé dans les sujets les plus commentés, indice d’une colère pas encore éteinte.

Côté responsables politiques, les réactions au discours d’Emmanuel Macron sont variées. Si dans son camp, on salue un président à l’écoute des Français qui a su trouver les mots justes pour répondre à la colère des Français, dans les rangs de l’opposition, les avis sont beaucoup plus contrastés, voire carrément critiques.

Sur Twitter, le député de La République en marche du Val d’Oise Aurélien Taché se dit « fier et heureux » après l’allocution du chef de l’Etat. « Ce soir, Emmanuel Macron a redonné espoir à toute la Nation », affirme-t-il, estimant que dès janvier, la vie des salariés et des retraités va changer grâce aux différentes mesures annoncées par Emmanuel Macron.

« La colère des Français a été entendue et le président de la République l’a très bien décrite », juge pour sa part le secrétaire d’Etat au Numérique Mounir Mahjoubi, qui appelle désormais au rassemblement. La vice-présidente du MoDem, associé à LREM au sein de la majorité présidentielle, parle d’un discours « à la hauteur des attentes et de l’histoire ».

Dans l’opposition, on trouve aussi des convaincus. « Je n’ai pas été déçu (…), clame Guillaume Peltier, vice-président des LR. Emmanuel Macron n’est jamais aussi bon que lorsqu’il fait de l’anti-Macron, c’est-à-dire exactement l’inverse de ce qu’il a porté sur ces 18 derniers mois (…) Ce soir il y a pour une fois, une victoire pour les classes moyennes, pour les territoires, pour la France oubliée. »

Sur le plateau de TF1, le député Les Républicains de l’Oise Eric Woerth s’est montré plus mitigé, qualifiant les annonces d’Emmanuel Macron d’efficaces pour certaines, mais de « courts termes » et avec « leur part d’injustice ». « Emmanuel Macron corrige des erreurs commises depuis son élection mais il n’améliore pas la situation du pays et le quotidien des Français : il amortit la chute qu’il a lui-même provoquée. 20 mois pour rien », lâche de son côté Eric Ciotti.

A l’image de celle du député des Alpes-Maritimes, les réactions critiques formulées par les responsables politiques sont nombreuses. « Le nouveau monde, c’est ‘retour vers le futur’,dénonce ainsi le premier secrétaire du Parti socialiste Olivier Faure. Le nouveau monde c’est du Sarkozy. » Un avis partagé par l’ancien candidat à la présidentielle et fondateur du mouvement Génération.s, Benoît Hamon, qui partage sur son compte Twitter une capture d’écran d’une allocution télévisée de Nicolas Sarkozy pour illustrer celle de ce soir. « Le compte n’y est pas », affirme-t-il.

« Des bonnes intentions : oui. Des réponses : non », a tweeté le chef de file de La France insoumise Jean-Luc Mélenchon, qui entrevoit déjà un cinquième samedi consécutif de mobilisation des « gilets jaunes ».  « Je crois que l’acte V de la révolution citoyenne dans notre pays samedi prochain sera un grand moment de mobilisation. »

De l’autre côté de l’échiquier politique, la présidente du Rassemblement national Marine Le Pen salue le fait qu’Emmanuel Macron ait renoncé « à une partie de ses errements fiscaux ». « Mais il refuse d’admettre que c’est le modèle dont il est le champion qui est contesté », critique-t-elle.

Quant à Jean-Pierre Chevènement, ex-ministre de la Défense et de l’Intérieur, son opinion se veut plus analytique : « Les annonces faites ce soir par le président de la République sont substantielles. Reste à savoir comment elles seront financées et si le gouvernement sera en mesure de desserrer les contraintes budgétaires européennes. La question de “l’Europe qui protège est posée”. Le président de la République a par ailleurs souhaité mettre en oeuvre un nouveau contrat pour la France. C’est un tournant pour son quinquennat. Il ne faut pas refuser d’ouvrir ce vaste chantier de rénovation de notre démocratie. Car, en dehors de cette perspective, il n’y aurait que désolation pour la République et pour la France. »

Enfin, les syndicats – qui font partie des corps intermédiaires oubliés du macronisme – n’ont pas été en reste. Pour le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez, le président de la République « n’a rien compris ou ne veut rien comprendre de la colère qui s’exprime ». La hausse de 100 euros mensuels au niveau du Smic, « c’est très loin de ce que nous demandions », a-t-il réagi sur Franceinfo. La CGT revendique un Smic à 1800 euros. « On n’annonce rien sur la revalorisation des pensions des retraités », a-t-il également regretté, « rien sur les minima sociaux » et « rien sur les jeunes ».

De son côté, l’Unsa semble plus satisfaite mais « s’inquiète cependant, alors que le pouvoir d’achat est en berne pour tous, que les agents publics n’aient pas été cités ». Enfin, Solidaires est beaucoup plus critique, estimant dans un communiqué que les annonces sociales « sont loin de constituer un tournant dans la politique de ce gouvernement ».

Rfi.fr

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