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(Chronique de Alioune FALL) Demain le changement : après demain, la révolution?

Dans une nation, les attitudes collectives ont une signification. Elles reflètent un choix de vie inconscient.

Si chaque personne ne s’interroge pas sur les conséquences de ses actions individuelles, quand elles rencontrent celles des autres, on est souvent surpris, lorsqu’on va trébucher pour se perdre à jamais dans l’abime.

Et devant l’impasse, le chat se retourne et fait face à son agresseur. Aujourd’hui, ceux qui vivent comme des chats sont de loin supérieurs en nombre que ceux qui préfèrent le rôle de l’agresseur. Mais qui est fou pour exposer son visage de diable ?

L’agresseur prend des airs du messie pour laisser penser qu’il est le grand incontournable du quotidien. Sans aucune pitié, on piétine les pauvres, on les affame et les assoiffe avant de les déposséder des derniers biens en leur possession. Rien n’est trop petit ; ni argent, ni portion de terre, ni justice. Et la justice, quand on en parle, on a le choix. Entre le verre à moitié vide ou à moitié plein, les camps se décident.

Le Garde des Sceaux parle d’une garantie procédurale au profit du maire de la capitale, les autres voient un acharnement avec un lot de circonstances assez troublantes pour l’étayer. On aurait  pu jouer au « plus maandu » et adopter une posture de neutralité permettant au juge de dire le droit dans toute sa rigueur. Et s’il ne le dit pas, que va-t-on faire ?

On n’est pas crédule à ce point, l’immunité parlementaire a été levée par 125 hommes et femmes forts de leur légitimité électorale. 125, c’est le nombre exact de députés acquis par la coalition BBY au sortir des dernières législatives. 125, c’est le chiffre fétiche du régime, le talisman de l’exécutif qui garantit tous les miracles de la monarchie dans une République.

C’est l’incantation qui concentre tous les pouvoirs de l’Etat entre les mains de l’exécutif. Que l’on s’y habitue, il en sera ainsi encore longtemps. Ce qu’on appelle changement n’est autre qu’une simple permutation ou inversion des rôles et est très différent de la Révolution.

Qui, ça intéresse vraiment de savoir si le maire a détourné de l’argent ou pas ? Certainement, ceux qui veulent légitimer les poursuites aux yeux de l’affamé ou plutôt ses camarades de parti qui sont résolus à lui faire payer le crime de lèse-majesté.

Peut-être qu’il sera condamné. S’il l’est, il manquera les prochaines joutes électorales. Les pompiers pyromanes reviendront faire les médiations d’urgence et le problème sera finalement résolu sans effusion de sang. Alors, pourquoi ne pas directement aller à la dernière page du roman. On la connait, cette fin, c’est celle que beaucoup de feuilletons judiciaires ont connue dans notre pays.

Et dévoiler les noms des bénéficiaires de la Caisse d’avance ne le sauvera pas du précipice. Tout de même, ce serait amusant de connaitre qui sont ceux qui ont bien profité des largesses du maire. Inutile certes mais, pour la satisfaction d’une curiosité malsaine, l’amusement en vaudrait le coup.

A coup sûr ou simple pronostic, c’est selon, il pourrait y avoir des hommes politiques appartenant à différents camps, des marabouts pour la rente du condominium scellé avec les politiciens depuis la période coloniale. Sur cette liste, apparaîtront quelques malheureux indigents sans poids.

Au final, c’est triste quand on se permet d’exprimer un plaisir jubilatoire à faire vivre à un père de famille les affres de la vie carcérale moins pour une faute de gestion qu’il aurait faite qu’un affront infligée à un roi orgueilleux. Ce qu’il ne faut pas oublier c’est qu’il est imprudent, ici, sous nos cieux, de contrarier le roi.

Ce n’est même pas convenable. Son châtiment a un effet immédiat et le châtiment de Dieu, lui, consécutif à un compte-rendu final, au cours d’un dernier jour où un dernier jugement, sera rendu.

Alors, pourquoi s’étonner qu’un homme de Dieu, pris au piège des plaisirs mondains, comme tout humain faillible, scelle une alliance sacrée avec celui qui tient la bourse ? Notre pays a une très longue tradition de collaboration entre les maisons religieuses et les foyers du pouvoir. Cela, même avant la décolonisation.

Les pouvoirs blancs ont pu compter sur l’emprise que les religieux ont sur les citoyens. Blaise Diagne s’est vu accorder une consigne de vote. Mamadou Dia a payé cher sa rigueur au grand profit de Senghor. Abdou Diouf s’est inscrit dans la continuité, Wade en a fait les frais dans sa longue marche vers le pouvoir et ne s’est pas fait prier pour continuer la collaboration.

En attendant, qu’est-ce que le citoyen d’en bas est en droit d’espérer ? RIEN. Au-dessus de sa tête, se font et se défont des alliances, dont les enjeux ignorent complétement les affres de la vie quotidienne.

L’autoflagellation est telle que cette personne envers qui, on ne peut éprouver que de la pitié, tant sa situation est misérable, est la première à se bousculer pour continuer d’alimenter ce système. C’est douloureux, mais on aime.

Finalement, il y a le Sénégal des politiciens, des marabouts et des « élites intellectuelles » bref, le Sénégal de ceux qui paient 1500 F Cfa d’impôts d’un côté.

Et de l’autre, le Sénégal de ceux qui se bousculent dans les transports en commun et qui ne peuvent espérer rentabiliser leurs efforts à hauteur de 3 000 F Cfa, le jour, le Sénégal des vendeurs à la sauvette dont la contrepartie de l’étal n’équivaut même pas à la somme de 10.000 FCFA et qui peinent à l’écouler en moins de 10 jours.

Et dans cette insolente candeur, on joue à se faire peur, en se promettant un enfer sur terre, si l’envie de changer la donne nous venait. En réalité, c’est du « samë sa ceeb » et «xajamal ceebu keneen».

Et l’histoire, dans sa répétition, comporte la partie où les misérables se lèvent et crachent sur le changement d’hommes qu’on leur propose et exigeront que tout le système disparaisse, pour laisser la place à un autre plus équitable. Où chacun aura la chance de bien manger, de boire à son aise et de porter des habits propres sans avoir à mourir de la peur de tomber malade. Ce chemin est long et caillouteux et pas sûr que tout le monde en sort indemne. Alors, que Dieu nous en préserve ! Amen…

La chronique de Af

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