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Macron-Trump: une relation «spéciale»

Il est le premier dirigeant étranger reçu en visite d’Etat par Donald Trump. Emmanuel Macron entame ce lundi 23 avril un déplacement de trois jours aux Etats-Unis. Un honneur qui démontre une nouvelle fois la proximité affichée entre les deux chefs de l’Etat. Mais le président français n’est pas sûr de convaincre son homologue sur plusieurs sujets épineux.

Il y a neuf mois, Emmanuel Macron conviait Donald Trumpau défilé du 14-Juillet et à un dîner « entre amis » en haut de la tour Eiffel. Une attention particulière que Donald Trump, sous pression à Washington en raison de l’affaire des ingérences russes, avait particulièrement appréciée. Neuf mois après, renvoi d’ascenseur : le président français est le premier dirigeant étranger à être reçu en visite d’Etat à la Maison Blanche depuis le début de l’administration Trump.

Au programme d’abord, beaucoup de protocole, de cérémonies : un dîner à Mount Vernon, la demeure historique de George Washington, un déjeuner au département d’Etat, une cérémonie au cimetière d’Arlington, une adresse au Congrès d’une trentaine de minutes, en anglais. « Le plus important, ce sont les moments où les deux chefs de l’Etat seront seuls, en tête à tête. Et il y en a beaucoup pendant ce séjour. C’est là où se nouent les relations personnelles », croit savoir Marc Porter, président du Republicans Overseas France, l’association des sympathisants du Parti républicain.

L’Elysée, comme les conseillers du président américain, communiquent beaucoup sur cette « relation personnelle », qualifiée parfois de « relation amicale ». Les deux présidents se parlent au téléphone toutes les semaines ou toutes les deux semaines. D’après l’entourage du chef de l’Etat, Donald Trump consulte régulièrement son homologue français sur les sujets internationaux.

Cette entente peut paraître surprenante entre deux hommes qu’a priori tout oppose, à commencer par 30 ans de différence d’âge. « Les deux sont des outsiders qui ne font pas partie de l’élite, de l’establishment. Macron a insisté sur ce point lors des premières rencontres », note William Drozdiak, ancien chef de bureau Europe du Washington Post et auteur de Fractured Continent : Europe’s crisis and the Fate of the West.

Stephen Pomper, ancien conseiller de Barack Obama pour les Affaires multilatérales et aujourd’hui directeur du programme Etats-Unis pour International Crisis Group, remarque qu’une « certaine alchimie se développe entre eux et qu’elle leur est mutuellement bénéfique ». Alors que d’autres dirigeants ont d’abord hésité à se rapprocher de Donald Trump, le président Macron a assez vite décidé de trouver un moyen de travailler avec lui, remarque l’ancien fonctionnaire américain. « Il a eu un certain nombre de gestes qui ont démontré une forme de respect et cela était manifestement très important pour le président Trump ».

Pour Alexandra de Hoop Scheffer, directrice de la branche parisienne du German Marshall Fund of the United States, un think tank américain, il existe une « méthode Macron », dont l’efficacité sera testée dans les prochaines semaines : pas de critique directe, des points de divergence clarifiés et des lignes rouges. Le refus de renégocier les Accords de Paris sur le climat en est une.

« L’allié naturel de Trump en Europe »

Les relations entre les deux pays s’étaient déjà réchauffées depuis plusieurs années déjà, rappelle l’historienne Maya Kandel, chercheuse à l’université Paris III : « Dans le domaine sécuritaire et la lutte contre le terrorisme, la relation entre les deux pays est particulièrement resserrée. » Donald Trump voit en la France la puissance militaire la plus fiable, assurent plusieurs observateurs. « Le dialogue entre les militaires et le renseignement des deux pays est très fort. Le secrétaire d’Etat américain à la Défense s’entend aussi très bien avec son homologue français », croit aussi savoir William Drozdiak.

Le président français a aussi profité d’un contexte européen particulier : l’absence des deux autres alliés traditionnels des Etats-Unis. En Allemagne, la chancelière Angela Merkel est affaiblie politiquement, et le Royaume-Uni est trop occupé par le Brexit. Emmanuel Macron a donc profité de ce vide. Alexandra de Hoop Scheffer voit en lui « l’interprète de Trump » en Europe : « Le président français émerge comme l’allié naturel, l’interlocuteur principal du président Trump, ce qui sert aussi les intérêts du président Macron puisque, finalement, le président américain a accéléré toutes les initiatives de coopération européennes en matière de défense et de sécurité. »

L’urgence : les questions commerciales et l’Iran

Emmanuel Macron se veut donc désormais porte-parole de l’Europe et de ses intérêts. Mais il va devoir, lors de cette visite d’Etat, aborder avec Donald Trump des sujets sensibles, avec des échéances à court terme. Sur le plan commercial, l’Union européenne a jusqu’au 1er mai pour négocier des exemptions permanentes aux taxes américaines sur l’acier et l’aluminium, que le président américain a décidé d’instaurer au mois de mars.

Autre gros dossier : le nucléaire iranien. Le 12 mai, le président américain doit annoncer s’il rétablit un certain nombre de sanctions contre la République islamique, ce qui pourrait faire voler en éclat l’accord nucléaire de 2015, que la France entend préserver. Donald Trump a lancé un ultimatum aux signataires européens : revenir, avant cette date, sur plusieurs « terribles lacunes » du texte. Il réclame notamment davantage d’inspections et surtout, la suppression des limitations dans le temps imposées à Téhéran sur son activité nucléaire, censées expirer en 2025 et 2030. Emmanuel Macron arrive à Washington après « des discussions avancées au niveau européen », glisse la présidence. D’après l’agence Reuters, les Etats membres de l’UE se seraient dans l’ensemble rangés à l’idée d’imposer de nouvelles sanctions à l’Iran, comme le proposent la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni.

Macron peut-il influencer Trump ?

Emmanuel Macron va donc s’atteler à démontrer qu’un rapprochement est possible entre les positions européennes et américaines. Mais a-t-il vraiment un pouvoir d’influence sur Donald Trump ? « Ce n’est pas son objectif, il a conscience que c’est impossible », assure Martin Quencez, du German Marshall Fund of the United States. « Trump est le président des Etats-Unis et les intérêts des Américains sont plus importants que tout et il ne l’oublie jamais,renchérit Marc Porter, le président de Republicans Overseas France, l’association des sympathisants du Parti républicain en France. Mais c’est vrai qu’il a changé sa position sur plusieurs sujets, alors c’est important d’être à Washington pour faire du lobbying. »

« Parfois je parviens à le convaincre, parfois j’échoue », consentait le président lui-même, au mois de janvier. Sa proximité avec le milliardaire ne le protège pas, un jour, d’un tweet assassin. Ni d’un communiqué de la Maison Blanche, à l’image de ce recadrage récent, lorsqu’Emmanuel Macron a annoncé, peut-être un peu trop vite, avoir « convaincu son homologue de rester dans la durée en Syrie » après les frappes conjointes Etats-Unis-France-Royaume-Uni.

L’Elysée, avec prudence, avoue ne pas prévoir d’engranger d’accord lors de cette visite d’Etat et glisse même que sur l’Iran, « les signaux ne sont pas encourageants ». L’objectif est surtout de « poursuivre et renforcer » les relations franco-américaines. « C’est une visite très politique. L’idée est de dépasser les contingences de l’actualité immédiate, pour regarder l’ensemble de l’histoire des relations entre nos deux pays. »

Rfi.fr

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