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Mort du journaliste franco-sénégalais Jean-Karim Fall

Le journaliste spécialiste de l’Afrique de France 24, grand spécialiste de l’Afrique, est mort brutalement vendredi à l’âge de 59 ans, alors qu’il couvrait le sommet du G7 en Sicile.

Que ce soit pour « Mme Coulibaly », la petite commerçante d’Abidjan et auditrice type de Radio France internationale (RFI) telle qu’il la définissait, ou pour les présidents et ministres du continent africain, Jean-Karim Fall était une personnalité incontournable, une vraie star. Bien rares sont ceux qui s’intéressent un tant soit peu à l’actualité au sud du Sahara qui n’avaient jamais entendu le nom, la voix, du directeur emblématique du service Afrique de RFI de 1996 à 2012 puis l’un des rédacteurs en chef à France 24. « JK », comme le surnommaient ses collègues, est mort brutalement, vendredi 26 mai, à Taormine, en Sicile, alors qu’il couvrait le sommet du G7 pour France 24. Il avait 59 ans.

Enfant unique d’une mère française et d’un père sénégalais, Kader Fall, qui fut ambassadeur et ministre, Jean-Karim Fall était un métis dans l’âme. A cheval sur deux cultures, mais qui par souci d’impartialité s’était toujours interdit de commenter l’actualité sénégalaise. Avant de prendre ses fonctions de rédacteur en chef à RFI, il fut notamment correspondant permanent de la « radio mondiale » en Côte d’Ivoire puis au Gabon.

Journaliste tout-terrain

C’est lui qui annonça le premier la mort du président ivoirien Félix Houphouët-Boigny en décembre 1993, couvrit la première épidémie de fièvre Ebola au Zaïre. Le chef de guerre libérien Charles Taylor, dont il imitait les « you know » d’une voix suave et traînante, le fit prisonnier quelques jours dans son quartier général de Gbarnga en l’accusant d’être un espion de Dakar. Jean-Karim Fall était un journaliste tout-terrain. Aussi à l’aise dans les maquis rebelles que dans les sommets de l’Union africaine et les voyages officiels.

Revenu à Paris, il avait pris la tête du service Afrique de RFI et fut un mentor, un inspirateur pour nombre de journalistes qui se spécialisèrent sur ce continent. L’auteur de ces lignes comme d’autres confrères qui l’ont côtoyé pendant de longues années à la Maison de la Radio l’appelaient « Tonton », se moquaient affectueusement de lui en le surnommant « père Castor » quand il aimait raconter tel ou tel reportage.

Il était surtout un remarquable chef d’équipe, drôle, exigeant mais jamais cassant, capable de tirer le meilleur de ses journalistes, toujours prêt à discuter pendant de longs moments des angles des sujets, des pistes à explorer, avec pour premier souci la rigueur. Le matin quand il appelait les dizaines de correspondants, la grande force de RFI en Afrique, il questionnait chacun : « Qu’est-ce qui se passe chez toi Loulou ? » Si la réponse était par malheur : « Pas grand-chose », fusait alors : « Débrouille-toi pour remuer tes canaris car on ne peut pas rester sans rien sur ton pays. »

Diplomate

Quand il interrogeait des chefs d’Etat, il était toujours respectueux. Pourtant bien des présidents africains le craignaient, car RFI et France 24 demeurent dans nombre de pays où la liberté de la presse est un mirage deux médias d’une grande influence, où peuvent s’exprimer les opposants et les voix contestatrices. Pour éviter que les antennes soient coupées, il savait faire preuve d’une grande diplomatie, gardait pendant de longues minutes au téléphone des ministres furieux d’avoir entendu un sujet qui mettait en lumière les dérives du pouvoir qu’ils servaient. Quel ancien de RFI ne se souvient pas des coups de fil rageurs et quasi quotidiens de Pitang Tchalla, le ministre de la communication du défunt dictateur togolais Gnassingbé Eyadema ?

Jean-Karim Fall avait vécu comme une souffrance son départ de RFI mais avait su rebondir à France 24, où il assurait des chroniques, des interviews avec toujours une attention toujours très particulière pour l’Afrique. Il fut notamment l’un des initiateurs du journal de l’Afrique sur cette chaîne publique. L’homme était pudique mais il était aussi un grand sensible. Il laisse derrière lui une femme et deux enfants. « Tonton », comme l’on dit sur ce continent qui nous est si cher, que la terre te soit légère.

Le Monde

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