Dans un livre d’enquête consacré à son quinquennat, François Hollande dénonce l’évolution du football français qui traverse une grave crise d’identité. Pour le président de la République, l »éthnicisation » de notre football est le miroir des maux de la France.
« Un président ne devrait pas dire ça… », la nouvelle enquête des journalistes du Monde Gérard Davet et Fabrice Lhomme, à paraître jeudi 13 octobre, va créer des débats animés dans tous les milieux : politiques, économiques, judiciaires… mais aussi sportifs !
Désarmant de sincérité, François Hollande délaisse le traditionnel discours policé des hommes roués à la réthorique politique. Tout au long des 662 pages de cette enquête minutieuse nourrie de 61 entretiens privés avec le président de la République, le duo de journalistes d’investigation décrypte avec recul le quinquennat de François Hollande.
Evidemment le sport, notamment le football, sport préféré de l’ancien ailier gauche du FC Rouen, n’échappe pas au droit d’inventaire. Avec des mots forts, inattendus et tranchants. Le petit monde du football français, déjà fragilisé et divisé à tous les niveaux de sa gouvernance, va être fortement bousculé à la lecture de ce livre.
Le président de la République déplore «une communautarisation, une segmentation, une ethnicisation » qui seraient à l’oeuvre en équipe de France, plus que jamais miroir des maux de notre pays selon lui. « Les faits sont terribles », assène-t-il.
En juin 2012, juste après son élection, il suit attentivement le parcours chaotique de l’équipe de France dirigée par Laurent Blanc. Les médiocres résultats renvoient une image désastreuse. Le président confie son courroux aux deux journalistes : « Il n’y a pas d’attachement à cette équipe de France, s’emporte-t-il. Il y a les gars des cités, sans références, sans valeurs, partis trop tôt de la France. »
En connaisseur de l’histoire du foot français, François Hollande vante les valeurs humaines des Kopa, Platini ou Zidane pour mieux dénoncer les mauvaises manières des nouvelles générations d’aujourd’hui. «On voit bien que sur l’expression, il y a une perte de niveau », déplore le chef d’Etat. En cause, selon lui, un grave déficit d’éducation. « Ils sont passés de gosses mal éduqués à vedettes richissimes, sans préparation. Ils ne sont pas préparés psychologiquement à savoir ce qu’est le bien, le mal.»
Le premier des Français aimerait impulser une refonte des moeurs du monde du football : « La Fédération, c’est pas tellement des entraînements qu’elle devrait organiser, ce sont des formations. C’est de la musculation de cerveau. »
Fort heureusement, l’Euro 2016 et la bonne image donnée par l’équipe d’Antoine Griezmann lui apportent un mince espoir pour l’avenir: « Parfois, il y a quand même une capacité à se fondre dans le commun », tente-t-il de se rassurer. Mais il n’oubliera pas la déclaration de Karim Benzemaaccusant Didier Deschamps « d’avoir cédé à la pression d’une partie raciste de la France.» En mars 2016, à la suite de l’affaire de la sextape, mettant en cause l’avant-centre du Real Madrid, François Hollande, dépité, lâche à ses interlocuteurs journalistes : « Moralement, ce n’est pas un exemple, Benzema.»
Dans le monde feutré du politiquement correct, il est rare de lire les propos sans fard d’un président de la République en fonction. Cette fois, il a laissé son costume au vestiaire pour enfiler la tunique d’un supporter lucide, déçu par l’évolution de son sport favori. Evidemment, sa fonction provoquera forcément beaucoup de remous dans un football français déjà en crise d’identité et de gouvernance.
Sources. « Un président ne devrait pas dire ça… » Les secrets d’un quinquennat. Gérard Davet et Fabrice Lhomme. Edition Stock. Prix : 24,50 euros.
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