Au bout d’un demi siècle d’existence, une analyse rétrospective, un bilan partiel, des interrogations, de la prospective s’affirment comme de bons réflexes, voire même des passages obligés afin de mesurer, évaluer, apprécier, renforcer, rectifier pour mieux aborder l’avenir sereinement et durablement. En cet an 2017, Guédiawaye souffle ses 50 bougies; pour un être humain, ce serait l’âge de la maturité. Certains le fêtent et d’autres optent pour la réflexion et méditation sur leur parcours et nous voulons davantage nous placer dans cette posture.
Il y a 50 ans de cela, plus précisément en 1967, le Plan d’Urbanisme Ecochard avait, entre autres objectifs, « d’assainir » certaines zones centres occupées par des bidonvilles qui ne correspondaient pas à l’image que devait refléter une ville-capitale. A cet effet, il fut décider de déguerpir un nombre important de ces quartiers pour les reloger dans la banlieue lointaine, Guédiawaye. Les premiers quartiers de Guédiawaye virent jour ainsi : Aïnoumane, Mbod, Champs de Courses, Ras mission, Baye Gaïndé, Kip coco, Daroukhane…
Le processus d’installation se poursuivit dans les années 1970 avec l’implantation d’autres quartiers : du secteur de limamoulaye, de Fith Mith, de Notaire, des HLM Guédiawaye, des premières unités des Parcelles Assainies, Golf Sud Extension. Dans les années 1980-90, l’habitat planifié va faire son apparition massive le long du littoral Nord : Atépa, Cités Hamo3, 4, 5 et 6, cité des Enseignants, SHS, Air Afrique, Sentenac, Sofraco, Comico…Enfin, le site du Golf club qui s’étendait sur 45 ha sera réaffecté, au début des années 2000, à de l’habitat planifié.
A travers cette brève historique du peuplement, il est aisé d’entrevoir ou d’imaginer les différentes mutations spatiales et sociales que Guédiawaye a subies depuis sa création.
Parallèlement à cette évolution, le côté institutionnel n’a pas été en reste. En effet, après avoir formé avec Pikine une seule et même commune à partir de 1983, Guédiawaye devient une commune de plein exercice le 08 Octobre 1990. Pour, à la suite de la réforme sur la régionalisation de 1996 être érigée en ville avec cinq (05) communes d’arrondissement : Golf Sud, Sam Notaire, Ndiarème Limamoulaye, Wakhinane Nimzatt et Médina Gounass. En 2002, elle bénéficia du satut de département. Enfin, en 2013, avec l’avènement de l’Acte 3, les 05 communes d’arrondissement deviennent des communes de plein-exercice.
Tout cela a été accompagné aussi par la succession de différents Maires (au nombre de 04, jusqu’en 2017 pour la ville) et de conseillers municipaux.
Que de chemins parcourus ! Que de transformations subies par cette ville de la banlieue lointaine dont les habitants étaient taxées de « boys Guédiawaye » (appellation qui renvoyait à une connotation péjorative à l’époque) ! Guédiawaye, ville bâtie sur le système dunaire de la région de Dakar entrecoupée de cuvettes inondables, présente des atouts naturels certains (ouverture sur l’océan, aération…) et sociologiques (organisation sociale ancienne et dynamique traduite par le nombre important d’OCB de diverses natures participant au développement local).
Ces avantages ont été renforcés par un tissu urbain régulier, caractérisé par le tracé correct des rues (à l’exception de Médina Gounass, Darourahmane et Bagdad), œuvre d’un défunt Maire, urbaniste de profession. Cette bonne organisation spatiale a facilité, avec l’appui de projets et programmes négociés par les différents édiles qui se sont succédé à la tête de la ville tels que le PAC, le PRECOL, PADELU, le programme spécial du Chef de l’Etat pour la banlieue, le programme éducation banlieue de Dakar, le PROGEP, le PROMOVILLES, la coopération décentralisée…, à redorer l’image de Guédiawaye.
Ainsi, elle n’est plus cette cité excentrée, peu sûre, sablonneuse, niche de « néo-citadins » en marge de la « civilisation » urbaine regroupant que des « bannis » de Dakar-centre. La physionomie urbaine s’est considérablement métamorphosée avec l’augmentation notable des réseaux (routes, éclairage public, assainissement, téléphone, alimentation en eau potable), des équipements (sanitaires, scolaires, administratifs…). Cette nette évolution, constatée durant ce demi-siècle d’existence, fait distinguer, positivement, Guédiawaye dans l’armature des villes sénégalaises ; en plus de son aura tiré des nombreuses personnalités et compétences remarquables et remarquées, de divers ordres et domaines, qui composent sa population.
Le tableau aurait été parfaitement reluisant si, des risques et contraintes majeurs n’étaient pas identifiés et menaçant fort d’hypothéquer pas mal d’acquis obtenus tout au long de cette longue marche. En effet, on pourrait relever, succinctement :
o Un découpage territorial défavorable du point de vue, étendue spatiale, opportunités fiscales et économiques, disponibilité de réserves foncières pour équipements et infrastructures ;
o Une bande littoral avec son domaine classé de filaos agressé de toutes parts et continuellement (charretiers, VDN, promoteurs immobiliers…) qui disparaît progressivement et expose la ville aux risques d’avancée de la mer, aux effets corrosifs de l’embrun marin, aux vents de sable, aux risques d’accidents, aux inondations ;
o Une insuffisance des équipements et infrastructures face à une population, à majorité jeune et croissante d’année en année ;
o Une gestion urbaine difficile à assumer convenablement par des collectivités locales aux ressources budgétaires faibles : entretien de la voirie, de l’éclairage public, des établissements scolaires, des structures sanitaires, des stades et terrains de sports multifonctionnels, des centres socio-éducatifs… ;
o Une insécurité urbaine grandissante ;
o Un cadre de vie en dégradation continue ;
o Une faiblesse des ressources budgétaires des 05 communes et de la ville ;
o Une économie urbaine dominée par la prédominance des activités de l’informel.
C’est pourquoi, afin de mieux négocier le virage de l’horizon des prochaines années, des réformes et orientations fortes seraient plus que nécessaires et urgentes pour placer, définitivement, Guédiawaye dans les rampes d’un progrès durable.
Certaines seront du ressort des pouvoirs publics centraux comme : l’accompagnement financier conséquent pour l’exercice, sans faille, des compétences transférées, l’appui à la mise en place d’une intercommunalité forte capable de soutenir les communes défavorisées de la région de Dakar, l’introduction d’une péréquation financière pour un meilleur partage des rentrées fiscales entre collectivités locales de la région, l’entrée en vigueur de la fonction publique locale pour relever le niveau des compétences techniques, la hausse du niveau des équipements et infrastructures. D’autres appellent, de la part des différentes communes et de la ville, une gestion rigoureuse, transparente, bien planifiée et ouverte, sans parti pris, aux énormes compétences ; mais également soucieuse de la bonne préservation de l’environnement et du bon entretien du patrimoine communal existant.
Mamadou DIENG
VISION GUEDIAWAYE
Email : mdieng14@yahoo.fr