A moins de trois mois de la campagne de collecte des signatures pour le parrainage électoral, beaucoup de candidats déclarés savent déjà avec certitude s’ils remplissent ou non la première condition pour participer à la présidentielle de février 2019. Le temps du réalisme est donc venu pour tous ceux qui voudraient continuer la compétition mais à qui il ne reste plus que les alliances dans lesquelles ils devront se résigner à occuper un rôle subalterne. Dans l’autre sens, ceux qui auront obtenu leur ticket d’entrée vont ouvrir leurs portes aux coalitions pour se renforcer en vue des deux tours de scrutin à venir.
L’absence d’ancrage idéologique va faciliter ces opérations. Libéraux, socialistes et communistes (entre autres) coexistent au sein de la coalition au pouvoir. La même diversité sera à l’œuvre partout où des candidats éliminés voudront faire campagne sous de faux drapeaux. Un nouveaumercato et des surprises sont en vue. Des abandons aussi seront enregistrés venant de candidats qui voudront arrêter les frais. Cela devrait être le cas de ceux qui limitent leur ambition présidentielle à un mandat unique et de ceux qui avaient pris part à ces joutes sans illusion, juste pour prendre date jusqu’à la prochaine confrontation.
Les résultats du parrainage ne vont pas déterminer ceux du premier tour de scrutin mais ils y contribueront. D’abord parce qu’ils feront la sélection des participants. Ensuite parce qu’ils rendront visible la nouvelle hiérarchie qui est en train de se mettre et qui reflètera une autre réalité que celle issue des législatives contestées de juillet 2017. Encore faut-il, pour cela, que le Conseil constitutionnel, maître de chiffres, fasse preuve d’une compétence dans le décompte que plusieurs camps lui contestent déjà. On peut parier que de nombreux contentieux éclateront, portant sur la validité ou non de signatures. Le temps du contentieux et le temps de la campagne vont se chevaucher.
Les rapprochements entre candidats peuvent se faire par affinité personnelle, similitude des programmes, appartenance à la même classe d’âge ou, simplement, souci commun de faire partir le président en place… Les motivations sont tout aussi nombreuses et variées de s’associer avec le candidat sortant. Elles seront aussi un moment de vérité pour prouver le bien-fondé ou non des soupçons de connivence à l’endroit de certaines candidatures accusées de faire diversion ou de faire déversoir afin de fournir au président Macky Sall le renfort de voix dont il aura besoin, en cas de second tour.
Il est même probable que certaines de ces négociations et transactions pré-électorales aient lieu avant la fin de la période de collecte des signatures. Si la justice déclare irrecevables les candidatures de Karim Wade et de Khalifa Sall, cette non-participation sera une donnée majeure sur le marché des négociations pour alliances et transferts de voix pour les parrainages d’abord puis pour l’élection présidentielle. Ces deux candidatures, encore dans l’incertitude, sont parmi les stocks de voix virtuellement les plus importants. Elles pourraient jouer un rôle d’arbitre.
En dehors des menaces de blocages des élections en cas de rejet par la loi de la participation de leurs candidats respectifs, ceux qui sont habilités à négocier ce potentiel électoral savent qu’à défaut d’être des faiseurs de rois ils seront de redoutables faiseurs de sérieux prétendants au trône.
Chronique Mame Less Camara (SourceA)