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Audition Comey: la journée de tous les dangers pour Donald Trump

Limogé par Donald Trump, l’ex-directeur de la police fédérale américaine James Comey témoigne ce jeudi 8 juin devant le Congrès. Une audition publique présentée comme un tournant dans l’enquête sur les possibles interférences russes dans la campagne présidentielle, et sur les liens de l’équipe Trump avec Moscou. Les élus ont rendu publique la déclaration préliminaire de James Comey. Et cette dernière confirme les révélations de la presse sur les tentatives du président d’influencer le directeur du FBI.

Avec notre correspondante à Washington,  Anne-Marie Capomaccio

Par l’intermédiaire du Congrès, le public américain veut savoir si, oui ou non, Donald Trump a fait pression sur James Comey pour qu’il enterre une enquête concernant sa campagne électorale, Mike Flynn et la Russie. En d’autres termes, le président des Etats-Unis s’est-il rendu coupable d’obstruction, dans une affaire judiciaire qui se rapproche chaque jour un peu plus du Bureau ovale ?

La déclaration préliminaire que James Comey doit prononcer ce jeudi devant les élus du Congrès a été rendue publique mercredi. Ce compte rendu détaillé des rencontres de l’ancien directeur du FBI est accablant pour le président américain. James Comey, un homme extrêmement discret, exprime son malaise grandissant au fil des semaines devant l’insistance de M. Trump.

Dès le début, il se méfie et consigne tous les détails par écrit, informe ses adjoints et classe le mémo. Il avoue avoir fini par demander au ministre de la Justice de lui éviter tout contact direct avec le numéro un du pays. Mais le directeur du FBI n’aura pas eu à se protéger davantage, puisqu’il sera finalement limogé. Un renvoi qui provoque immédiatement un tollé aux Etats-Unis.

De nombreux élus font le lien entre cette éviction et l’affaire russe. Certains d’entre eux demandent la destitution du président depuis les premières révélations sur ce dossier tentaculaire. Ils sont confortés à la lecture du journal de l’ancien directeur du FBI, et devraient poser, lors de son audition, des questions tendant à apporter la preuve que le président a bien fait pression pour enterrer l’enquête.

« Je pense qu’en matière de documentation, James Comey à l’avantage sur Donald Trump »

Avant le témoignage de James Comey, Donald Trump est tendu. Ces derniers jours, il a multiplié les annonces et les déplacements. Certains se demandent, aux Etats-Unis, si le président résistera au désir de répondre, en temps réel sur Twitter. « Il ne se laissera pas traîner dans la boue », explique l’un de ses proches. « C’est une chasse aux sorcières », affirment ses fils à la télévision.

Donald Trump face à James Comey, c’est la parole de l’un contre celle de l’autre. Le président n’a pas usé de son pouvoir pour empêcher le témoignage de l’ancien directeur de la police fédérale. La manœuvre aurait, de fait, sonné comme un aveu de culpabilité. Mais le milliardaire a pris la précaution d’appointer un avocat, qui doit préparer sa défense sur ce dossier.

Ce juriste, connu pour ses méthodes peu orthodoxes, a d’ailleurs pris la parole mercredi après la publication de la déclaration préliminaire de James Comey. La meilleure défense étant l’attaque, il a déclaré que le président était pleinement « satisfait » de la déclaration de James Comey. « Le président se sent complètement et totalement conforté », a-t-il dit.

Matt Lewis, journaliste et écrivain conservateur, reconnait que les enjeux sont énormes pour Donald Trump. D’autant que l’équipe du président ne maîtrise pas le facteur humain. Or, si l’on se fie au texte publié avant l’audition, James Comey l’imperturbable a été blessé par son limogeage brutal et par les noms d’oiseau dont Donald Trump l’a affublé. Il a l’intention de défendre son honneur.

« Comey a pris des notes au fur et à mesure, et a écrit des mémos. Il a donc une documentation. Donald Trump a fait des allusions au fait qu’il a peut-être enregistré les conversations. Mais nous n’avons pas de bande à ce jour, et personne à la Maison Blanche ne veut infirmer ou confirmer leur existence. Donc, je pense qu’en matière de documentation, Comey à l’avantage », explique Matt Lewis.

« Il est possible que cette audition bouleverse la donne et soit même explosive »

« Je pense qu’en termes de réputation, en termes d’honnêteté, d’homme de parole, James Comey a aussi l’avantage », poursuit Matt Lewis, qui en tire une conclusion implacable : « C’est l’une des raisons pour lesquelles l’administration Trump, et des groupes qui soutiennent Donald Trump, ont un objectif avoué : discréditer James Comey. »

Car l’ancien patron du FBI aura des adversaires jusque dans le Congrès bien entendu. Des adversaires féroces. Certains élus républicains vont en effet tenter de le déstabiliser et de mettre en doute son honnêteté, de salir sa réputation. C’est une tactique que l’on voyait poindre dès mercredi soir à Washington. Tout reposera donc sur l’interprétation à tirer des déclarations de James Comey.

« Il y a une manière préjudiciable de présenter les choses, qui insinue que le président a menacé le directeur du FBI et a fait pression sur lui, concède Matt Lewis. Mais l’autre manière de voir les choses, c’est que Donald Trump n’a pas d’expérience et demande à une personne qu’il considère comme un ami, James Comey, d’aider un autre ami, Mike Flynn. »

« Si l’on voit les choses ainsi, les faits sont identiques mais moins formels, moins dévastateurs,analyse le conservateur. Et un autre problème auquel James Comey fera face, c’est qu’il n’a pas démissionné, il n’en a pas parlé au ministre de la Justice, il ne s’est pas exprimé publiquement. Je vois déjà certains lui dire : si vous vous sentiez menacé, si vous pensiez que c’était inadmissible, pourquoi ne l’apprenons-nous que maintenant, après votre éviction ? »

Et le journaliste de conclure : « Il est possible que cette audition bouleverse la donne et soit même explosive. Car l’éventuelle accusation que le président a fait obstruction à la justice est une allégation très grave. Elle plane au-dessus de nous. » Ce qui se cache en effet derrière cette audition, c’est bien la perspective d’une éventuelle procédure de destitution à l’encontre du 45e président des Etats-Unis d’Amérique.

Rfi

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