Alexandre Benalla va passer une première nuit en prison. Un juge a décidé ce mardi de placer en détention provisoire l’ancien collaborateur d’Emmanuel Macron pour ne pas avoir respecté son contrôle judiciaire, dans l’enquête sur les violences du 1er mai 2018 à Paris qui lui vaut d’être mis en examen.
L’ex-chargé de mission de l’Elysée avait été convoqué mardi matin au tribunal de Paris par les juges d’instruction, tout comme son ami Vincent Crase, ancien employé de la République en marche, lui aussi mis en examen. Le 31 janvier, Mediapart avait publié des enregistrements clandestins d’une conversation entre les deux hommes, datant du 26 juillet, soit quatre jours après leur mise en examen et alors que la justice leur avait interdit d’entrer en contact.
Suivant les réquisitions du parquet, les magistrats instructeurs ont choisi de saisir le juge des libertés et de la détention (JLD) qui a ordonné le placement en détention provisoire d’Alexandre Benalla. Le cas de Vincent Crase devait être étudié dans la foulée mardi soir.
« Il n’y a pas de justification à cette révocation », a réagi, à l’issue de l’audience devant le JLD, l’avocate d’Alexandre Benalla, Me Jacqueline Laffont, annonçant qu’elle avait interjeté appel de cette décision. Un référé-liberté, une procédure pour tenter d’obtenir une remise en liberté de façon plus rapide que par la voie de l’appel, a également été déposé, a précisé Me Laffont. « On l’incarcère aujourd’hui pour une prétendue concertation qui aurait eu lieu il y a sept mois. Tout cela est ridicule », a ajouté l’avocate.
L’affaire n’en finit pas d’empoisonner l’exécutif
La défense d’Alexandre Benalla conteste la légalité des enregistrements publiés par Mediapart, estimant leur origine douteuse car ne provenant selon elle ni d’écoutes judiciaires, ni d’écoutes administratives. Ses avocats ont déposé une plainte le 14 février pour « détention illicite d’appareils ou dispositifs techniques de nature à permettre la réalisation d’interceptions », « atteinte à l’intimité de la vie privée », « atteinte à la représentation de la personne » et « faux », selon une source proche du dossier.
Cette contre-offensive intervenait alors que le parquet de Paris a chargé le 4 février la Brigade criminelle d’une enquête pour « atteinte à l’intimité de la vie privée » et « détention illicite d’appareils ou de dispositifs techniques de nature à permettre la réalisation d’interception de télécommunications ou de conversations ». Autrement dit pour identifier les conditions et l’origine de ces mystérieuses captations.
Depuis sept mois, l’affaire n’en finit pas d’empoisonner l’exécutif. Partie des révélations du Monde en juillet sur des violences du 1er mai, elle a connu de multiples rebondissements. En janvier, Alexandre Benalla a de nouveau été mis en examen pour utilisation abusive de passeports diplomatiques après son licenciement. Puis, le 7 février, le Parquet national financier a confirmé avoir ouvert une enquête sur un contrat signé entre Vincent Crase et un sulfureux oligarque russe, dans lequel l’ancien conseiller du président Macron aurait joué le rôle d’intermédiaire. Selon Mediapart, ces investigations visent des soupçons de corruption.
Alors que l’Elysée était déjà dans la tourmente, l’affaire des enregistrements de Mediapart a touché Matignon : le 7 février, la cheffe de la sécurité du Premier ministre, Marie-Élodie Poitout, a présenté sa démission après des rumeurs selon lesquelles cette conversation aurait eu lieu chez elle. Celle-ci a expliqué avoir rencontré Alexandre Benalla avec son compagnon Chokri Wakrim fin juillet à leur domicile, mais assuré ne pas connaître Vincent Crase et n’avoir « aucun lien avec les enregistrements ».
Mercredi, la commission sénatoriale d’enquête, qui a été constituée après les violences du 1er mai, doit rendre publiques ses conclusions sur les dysfonctionnements dans les services de l’État qui ont pu émailler cette affaire.
(avec AFP)