Pardonnez ce titre un peu provocateur qui peut prêter à controverse mais c’est juste pour lier deux évènements majeurs qui ont ébranlé notre pays dans une sorte de concomitance extraordinaire : La disparition brutale de son Excellence Monsieur le Ministre Chef du protocole de la Présidence de la République dans la même semaine de la commémoration du 16ème anniversaire de la catastrophe du bateau LE DIOLA survenu en 2002.
Deux événements incroyables dont la presque simultanéité de la survenue ne peut pas –de mon point de vue – être simplement le fait du hasard.
Bruno DIATTA Ministre Chef du protocole de la Présidence de la République du Sénégal depuis plus de quarante ans est mort après une vie de servitudes au plus haut niveau de la Nation sénégalaise. Tous les témoignages unanimes faits à son endroit par ceux là qui l’ont connu et pratiqué, ont fait la part belle à ses compétences profondes, sa connaissance et sa maîtrise des rouages de l’Etat, sa tenue et sa retenue, son professionnalisme sans concession ainsi que sa courtoisie légendaire entre autres qualités qu’on lui connaît. Il reste et demeure un parfait spécimen rare de l’Homme d’Etat qui tend de plus en plus à disparaître dans notre sphère nationale. Quarante ans dans le Saint des saints de la République avec tout ce qu’on y voit, y entend, y découvre, y pratique, y sent, y perçoit SANS JAMAIS MOUFTER. Il fallait être BRUNO pour le faire. Quand on connaît la propension malsaine du sénégalais à RACONTER, MENTIR, EXTRAPOLER, INVENTER et AFFABULER à qui mieux mieux, on ne peut qu’être ADMIRATIF devant BRUNO qui savait TOUT et qui n’a jamais RIEN DIT… C’est pourquoi de tous les hommages qui lui ont été rendus, tous d’égale dignité parce qu’écrits et prononcés avec le cœur, celui du Président de la République aura assurément été le plus poignant. Prononcée par le Premier Magistrat du pays qui venait de perdre son plus proche collaborateur, cette adresse était plus qu’une oraison funèbre. C’était une élégie que dis-je une Homélie très didactique pour qui sait lire dans l’écrit. …Des voix et des plumes plus autorisées que la mienne ont déjà livré une analyse approfondie de cette merveilleuse prose présidentielle pour m’épargner d’y revenir.
Assurément, Il nous faudra apprendre de Bruno car il va falloir se lever de très bon matin pour trouver encore des sénégalais comme BRUNO LE MAGNIFIQUE.
Le spectacle pitoyable des comportements scandaleux que nous observons dans notre vécu quotidien avec « les révélations» très souvent fabriquées de toutes pièces, juste pour nuire, les insultes, philippiques, pancraces et autres empoignades physiques qui y sont devenus tellement fréquents qu’ils en deviennent banals et tendent à être le lot quotidien de l’Homo sénégalensis. Et cela à toutes les stations de la vie publique, qu’elles soient politiques , religieuses, sociales et j’en passe. Le comportement ordurier et le mot n’est pas trop fort, est devenu une marque de fabrique de l’Homme Public sénégalais qui a tout du Voyou.
AH si BRUNO n’avait pas existé, la République serait dans la rue et dans les poubelles pour sûr. Car s’il y’a une chose que nos compatriotes du moins la plupart d’entre eux ne savent pas garder c’est le SECRET. La preuve, malgré BRUNO, certains secrets qui auraient dû rester d’alcôve sont étalés sur la place publique par ceux là mêmes qui auraient dû être les premiers à les taire. D’où vient le fameux : «nos soucis d’argent sont terminés» ?
Dans ce pays, les langues sont tellement fourchues que tout est mis en œuvre pour savoir quelque chose sur quelqu’un ou sur quelque chose pour s’empresser de le rapporter en s’en délectant avec moult extrapolations, pour démontrer sa « puissance » et donc …sa capacité de nuisance. Au point que c’est la chasse « aux scoops » qui régule quasiment tous les rapports publics entre nous. Certes, certains comportements ou agissements sont hautement condamnables et mériteraient souvent d’être dénoncés mais quand la délation systématique, le mensonge « loghorrique », l’insulte facile et l’indécence crasse dans les propos deviennent presque une NORME, cela devient INQUIETANT très inquiétant. Or la fin ne doit pas et ne peut pas justifier tous les moyens. Ah ! Si chacun disait à tout le monde ce qu’il sait de chacun, où irions-nous ? Et c’est en cela que la vie des Hommes comme BRUNO nous interpelle. Savoir en toutes circonstances GARDER SON CALME ET TENIR SA LANGUE. Savoir se tenir, savoir se retenir, savoir s’entretenir, savoir détenir, savoir maintenir, savoir s’abstenir, savoir sans dire et dire sans contredire ni médire ni maudire. En un mot : avoir du SAVOIR VIVRE adossé à une éducation de base solide et articulée sur des valeurs sociales, éthiques, déontologiques, dogmatiques et républicaines. C’est en fait cela LE PROTOCOLE. Et Bruno l’a incarné au plus haut niveau qui ne sera jamais égalé dans ce Sénégal devenu République des ragots. PAIX A SON AME AVEC LA RECONNAISSANCE ETERNELLE DE LA PATRIE.
L’autre évènement qui justifie le titre de cet article porte sur la commémoration du 16ème anniversaire du naufrage du bateau LE DIOLA disparu au large des eaux gambiennes un funeste soir de 26 septembre 2002. J’ai voulu lier les deux évènements parce que BRUNO était un DIOLA et le bateau éponyme s’appelait le DIOLA. Mais BRUNO était organisé, méthodique, consciencieux, patriote et …Républicain. Le DIOLA est une catastrophe inouïe qui n’a pas encore d’équivalent en termes de victimes dans le monde. Et tout cela par la faute de l’Homme . OUI. Des Hommes, des sénégalais, adeptes du rafistolage, cupides, maîtres dans l’art du trafic, avides de gains faciles, inconscients parce qu’incultes ont, dans un bateau conçu pour cinq cent (500) passagers, vous avez bien lu et dans une insouciance criminelle totale, osé embarquer plus de DEUX MILLE passagers et des tonnes de frets. Il fallait être sénégalais pour le faire.
La suite, on la connait et on continue à pleurer encore nos morts avalés par l’océan Atlantique qui n’en revenait pas tant de recevoir en une seule fois, toute sa livrée annuelle de victimes sacrificielles.
Passée la période de deuil et de douleur nationale qu’avons-nous retenu de cette catastrophe ? RIEN ou presque…Il suffit de voir nos Ndiaga Ndiaye et autres TATA bondés à l’extrême , nos camions hyper surchargés au-delà de toutes les normes requises et dans un état de décrépitude avancée , nos rues sales et encombrées par toutes sortes de détritus et d’agresseurs- vendeurs à la sauvette ; nos véhicules de transport en commun d’un autre âge et qui détiennent par devers eux, des visites techniques validées, pour se rendre compte que nous avons dans nos gènes l’ADN du DESORDRE ORGANISE dans ce pays.. Rien ne se fait selon des règles établies et respectées par tout le monde. Chacun se complaît dans un laissez aller incroyable à tout point de vue et avec une indiscipline totale dans tous les secteurs de notre vie…
On trafique tout et sur tout (visas, permis, pièces d’état civil, diplômes, etc..), on rafistole tout (mécaniciens réparateurs en tout ), on salit partout (rues, murs, stade Amitié etc..), on détruit tout (forêt de Mbao, filaos de Guédiawaye, plages, places publiques etc..).
Bref , on revient à notre véritable nature de « boul faalé » quoi.
Un véritable appel à d’autres catastrophes si on n’y prend garde. Et pourtant le DIOLA a été une véritable illustration de ce qu’il ne faut jamais faire en toutes circonstances. LE DESORDRE engendre toujours la catastrophe. Mais il semble que l’amnésie est la chose la mieux partagée dans ce pays. On ne retient RIEN de nos malheurs et on se plaît à se « suicider » en permanence. Pourtant il suffit de peu, très peu pour éviter toutes ces catastrophes qui endeuillent régulièrement notre pays. Juste de l’organisation, de la méthode, de la discipline et le respect des normes et lois qui régissent la cité. Est-ce si difficile que çà ?
Ah ! Si on pouvait «cloner» d’autres Bruno DIATTA dans tous les domaines de notre pays pour asseoir LE SURSAUT NATIONAL pour un Sénégal véritablement émergent …
DIEU NOUS GARDE ET GARDE LE SENEGAL .
Dakar le 7/10/2018
Guimba KONATE
DAKAR
guimba.konate@gmail.com