Certes l’opposition veut rester dans le registre de la légalité et de l’opposition républicaine et c’est son droit. Cependant elle aurait tort de penser qu’une simple démission du ministre de l’intérieur suffirait à apaiser le désarroi politique dans lequel sa malfaisance en matière d’organisation des élections a plongé les Sénégalais.
Nous pouvons comprendre que notre gouvernement soit radicalement incapable de résoudre le problème du chômage. Nous pouvons lui pardonner son impuissance à prendre en charge la question de l’éducation de nos enfants. Nous pouvons fermer les yeux sur tous les échecs et autres cas de mal gouvernance ! Nous pouvons même supporter que les hauts fonctionnaires de notre légendaire administration soient arrachés à la patrie au profit d’un parti et d’un clan.
Ce que nous ne pouvons en revanche accepter c’est que les fondements de notre république, notre raison d’être en tant que citoyens soient anéantis par des actes à relents politiques dont le seul but est le maintien au pouvoir d’un homme et de son clan. Ce que nous ne pouvons accepter c’est l’assassinat de la démocratie et l’affaiblissement de notre nation pour assouvir les sombres desseins d’une oligarchie. Jamais le Sénégal n’appartiendra à un clan !
Une désorganisation aussi suspecte et calamiteuse d’élections des élus du peuple ne saurait être imputée à une simple incapacité d’un ministre. Ce dernier a été choisi par un président de la république ; il a été maintenu à son poste malgré toutes les légitimes complaintes de l’opposition ! Celui qui l’a choisi était au courant de ce qui s’est passé à Touba durant le référendum, il savait très bien que les griefs portés contre lui méritaient une attention de sa part, mais il est resté de marbre.
Ce que le ministre de l’intérieur a fait est plus grave que ce qu’on reproche à Khalifa Sall. Ce dernier est accusé d’avoir dilapidé des deniers publics là où le ministre de l’intérieur est coupable d’un crime plus grave : détournement de la volonté populaire. En imposant son organisation chaotique des élections à la communauté, il a clairement pris sur lui la responsabilité d’endosser toutes les conséquences qui en découleraient. Au nom de quoi les primo-inscrits sont-ils pourvus de moins de citoyenneté que les autres ? Au nom de quoi les citoyens de Thiès, Matam, Kaolack, etc., ont-ils plus de droit que ceux de Touba ?
Exiger une simple démission d’un ministre politicien pour un crime aussi grave c’est à notre avis être dans la logique d’une compromission. Le moindre châtiment que doit subir le ministre de l’intérieur pour une organisation aussi anarchique des élections législatives, c’est d’être traduit devant la prochaine haute cour de justice. La prochaine législature devra dès son installation s’employer à faire toute la lumière sur cette sombre affaire.
Les citoyens qui les ont élus et ceux à qui on a refusé la chance de voter pour ou contre leur liste méritent que justice leur soit rendue. Car si cette pagaille est passée à pertes et profits, ce sera la porte ouverte à un long congé démocratique pour notre pays. Il faut mettre fin à l’irresponsabilité des ministres dans leur fonction avant de pouvoir asseoir une véritable politique de la fin de l’impunité dans notre pays.
Si cette forfaiture est absoute, c’en sera fini de la démocratie et de la république. Ce serait un signal fort si la prochaine assemblée nationale décidait, après la démission de Abdoulaye Daouda Diallo de le traduire devant la haute cour de justice.
Alassane K. KITANE
Professeur au Lycée Serigne Ahmadou Ndack Seck de Thiès
SG du mouvement citoyen LABEL-Sénégal