Âmes sensibles s’abstenir de jeter un coup d’œil sur les cadavres dont les corps sans vie sont calcinés obligeant les sapeurs-pompiers à les enterrer sur place. 15 victimes ont été enterrées sur place en raison de leur impossible identification. Puis, il y a les grands brûlés du Daaka.
Ils sont vieux pour la plupart, ils ont la chair de la peau arrachée par le feu, ils sont reçus en urgences dans de miteuses salles de soins, les premières thérapies rudimentaires … les douleurs sont atroces. Dans ce coin de Médina Gounass où la température affiche les 41°, même l’air chaud, qui s’abat sur les plaies, est un difficile supplice.
Dans un premier temps, l’Etat a débloqué la somme de 10 millions de FCfa pour la prise en charge médicale et en médicaments des 29 patients de l’hôpital de Tamba. Au moment où le Sénégal ne dispose pas de structures sanitaires spécialisées pour les grands brûlés. La seule radiothérapie pour la prise en charge de malades de cancer ne fonctionne pas.
Dans certains hôpitaux régionaux, il n’y a même pas de scanner. Alors, ces brûlés, qui souffrent dans le silence des salles éthérées de l’hôpital régional de Tamba et du poste de santé de Médina Gounass, n’ont pas de chance.
L’incendie de Daaka, qui a éclairé la forêt de Gounass, a mis à nu la responsabilité des services de l’Etat. Certains d’entre-eux ont montré carence, irresponsabilité, amateurisme. Ces propos sont du Président du Comité d’organisation du « Daaka », qui n’a pas compris que, lors des différents Cdd, il a beau avertir les autorités concernées et que personne n’a réagi.
Seydou Bâ, qui est par ailleurs le maire de Médina Gounass, est en colère contre ceux qui rendent un mauvais service à Macky Sall. D’autant que le «Daaka» est entré dans une nouvelle dimension, depuis l’avènement du Président de la République.
Depuis 2012, il n’a raté aucune édition du «Daaka». Et à chaque fois, le peuple «Puular», qui se déplace en majorité, le hisse et le brandit au sommet du trône comme son motif de fierté. Lui-même joue sur le registre d’appartenance à la communauté « Puular », en s’exprimant, avec ostentation, dans cette langue et multipliant les tête-à-tête avec les chefs religieux venus de divers horizons.
Cette fois-ci, l’émotion était à son paroxysme, en raison des 30 victimes décédées dans le violent incendie qui a emporté la vie de Mauritaniens, de Gambiens ou même de Guinéens.
Emu aux larmes, en évoquant les victimes, le Président Macky Sall a décrété un deuil de trois jours. Alors que certains se sont moqués dans les médias et sur les réseaux sociaux du manque de promptitude des autorités étatiques. Le ministre de l’Intérieur et de la sécurité publique, Abdoulaye Daouda Diallo, s’est déplacé 48 heures après le terrible incendie.
Alors que pour peu que ça, ou un événement qui se passe à 45 000Km du Sénégal lors de la tuerie de Charlie Hebdo par exemple, le Président Macky Sall s’est précipité pour être aux premières lignes des Charlie.
L’on ne revient pas sur toute la polémique, qui a escorté cette visite. En tout cas, dès les premières heures de cette tragédie du «Daaka», les chiffres les plus pessimistes parlaient d’une dizaine de morts. Les autorités devraient prendre le pouls du drame pour se rendre à Médina Gounass. Comme si nos morts ne sont pas d’égale dignité que les victimes de Charlie.
Au-delà de l’émotion, il faut que les autorités religieuses du «Daaka» se mettent au diapason de ce qui se fait de mieux dans l’organisation d’un événement religieux de cette ampleur. Il faut aussi que l’Etat fasse exercer sa force régalienne. Il n’est plus permis que des milliers de pèlerins s’entassent dans des huttes en pailles et en bois secs avec toutes les conséquences désastreuses, qui peuvent en découler. La sécurité ne saurait rimer avec l’indiscipline et l’informel.
Dans ce feu violent et meurtrier, les responsabilités sont partagées. Mais l’Etat, organisateur de cette manifestation religieuse, a une très grande responsabilité. Ce que les observateurs ont oublié de surligner, c’est le coup diplomatique réussi par le Président Macky Sall au «Daaka».
On le savait en froid avec le Président guinéen, Alpha Condé, celui-ci l’a appelé au téléphone en direct, lors de la cérémonie, dans la place forte du « Daaka » prise d’assaut par des milliers de pèlerins et devant le khalife de Médina Gounass.
Condé a même promis sur le coup de lui envoyer le khalife de Labbé pour présenter ses condoléances. Ensuite, en raison des victimes mauritaniennes, le Président Macky Sall a longtemps échangé avec le général Abdoul Aziz, l’homme fort de la Mauritanie, avec qui il était en froid, depuis la gestion du dossier Yaya Jammeh.
Le drame a permis au Président Macky de reprendre la main sur ses voisins, plus enclins à des coups de colère qu’à une approche diplomatique bien élaborée…Mais c’est connu, devant la mort, tout se tasse.
Actusen.com