Excellence Président de la République, permettez-moi de Vous interpeller !
Nous sommes conscients de votre humanisme, mais force est de constater que la réalité des choses est autre avec le camp d’en face. Que l’euphorie de la victoire ne nous amène pas à commettre des erreurs. En politique toutes les erreurs se payent cache. Nous venons de gagner une bataille avec brio.
La « guerre » continue de plus belle manière. Nos adversaires politiques sont plus que déterminés, leur posture d’après la présidentielle en est une parfaite illustration. Nous avons devant nous deux élections, au cours de votre quinquennat.
Le paradoxe sénégalais est plus que palpable. Hier ils nous disaient vouloir une séparation stricte entre la politique et le judicaire ; aujourd’hui on a sur toutes les lèvres des mots du volumineux lexique juridique : la grâce et l’amnistie.
Nous avons la société la plus compliquée et la plus difficile au monde. Société dans laquelle toutes les questions sont épluchées à la place publique avec autour tout un monde de « spécialistes » avérés de « tous les sujets ».
Une opinion publique nouvelle s’est créée avec une vague nouvelle d’experts dans tous les domaines, de journalistes et/ou animateurs, des donneurs de leçons à longueur de journée à l’occasion d’émission qu’ils se plaisent d’animer.
Les politiques et véritables spécialistes, professeurs d’universités tombent le plus souvent dans les pièges de manière aveuglée. Ils ruent devant les micros, courent derrière des invitations d’émissions. Quelle importance pour eux et pour nous autres, citoyens lambda ?
Nous en sommes arrivés dans ce pays où chaque semaine avec son sujet d’actualité dominante qui trônera en tête
Un peu avant l’élection présidentielle de février 2019, le Président Macky SALL arguait lors d’une émission en France avec une télévision du pays de Marianne qu’une éventuelle mesure à caractère humanitaire pourrait être prise, de sa part, dans le cadre des dossiers judiciaires concernant les sieurs Karim WADE et Khalifa SALL. En voilà une sortie à son époque que nous avion réfutée dans son contexte.
Le pouvoir de grâce lui est conféré par la constitution, mais l’exécution des peines prononcées par les cours et tribunaux en est aussi un.
La séparation des pouvoirs est un principe sacrosaint consacré par la charte fondamentale de notre pays, la constitution. Que chaque fasse ce dont il est fait et tout ira bien, disait le grand Victor HUGO.
Nous ne voulons pas renter dans des débats doctrinaires en ce qui concernerait la séparation des pouvoir dans une démocratie parfaite. Il a eu lieu dans d’autres circonstances plus appropriées.
Il y a une pratique qui commence à s’installer au Sénégal. Elle est devenue courante qu’elle commence indisposer plus d’un. Comme qui disait qu’il y a une certaine catégorie de la population qui ne devraient pour rien au monde exécuter la totalité de leurs peines de prison.
De cette horde des privilégies de la justice, il faut citer entre autres les marabouts, les artistes, les hommes politiques et les hommes d’affaires. Une classe à part !
Et pendant ce temps le bas peuple croupit difficilement dans le milieu carcéral avec tous les maux et peines que nous reconnaissons à nos prisons.
Le dossier de Karim WADE est là, patent et toujours ardu qu’il l’était à ses débuts. Aujourd’hui, on cherche la même échappatoire pour Khalifa SALL. Nous sommes certes pour un apaisement du climat social, oui, mais nous sommes également et surtout pour les respects de nos institutions.
Nous disons NON à toute forme de mesure allant dans le sens d’élargir un hors la loi du milieu carcéral sous le manteau des combines politiques.
Nous en interpellons son Excellence Monsieur le Président de la République pour lui demander de ne pas tomber dans ce piège que l’opposition lui tend.
L’opposition demande une séparation des pouvoirs par la main droite et tend une épée par la main gauche pour poignarder l’institution judiciaire en la dérobant toute sa substance.
Il y a dans toutes les prisons sénégalaises des milliers de détenus, pères ou soutien de famille dont la liberté serait un ouf de soulagement pour leurs proches. C’est parce que ces derniers assuraient la dépense quotidienne du jour au jour. Bon DIEU ! Pourquoi laisser ces derniers en prions pour en sortir des voleurs au col blanc. Ceux-là qui ont pillé nos milliards et abusé de notre confiance.
Toute forme de grâce en faveur du sieur Khalifa serait un désaveu de notre système judiciaire. On a l’impression qu’on avait voulu juste l’écarter des élections. Il ne faut nullement donner raison à nos pourfendeurs. Ce sentiment qu’a les opposants nous offusque au plus profond de nous. Poudrant ils savent que nous tous, la magistrature n’a pas changé. C’est les mêmes juges quand eux étaient aux affaires qui sont toujours là.
Le dialogue est une exigence nationale mais en aucun cas, il ne devrait être un tribunal pour tordre la main à la justice de notre pays. Si un citoyen est condamné par la justice de son pays, c’est parce que sa place à cet instant est la prison.
Toute la population sénégalaise devrait se mobiliser pour que Karim WADE et ses coaccusés payent à l’Etat les amendes qui leur ont été infligées. A quoi servirait une justice sans applications des peines ?
Il serait prétentieux, de notre part, de vous demander solennellement de ne pas user des pouvoirs que vous reconnait la constitution de notre pays.
Nous sommes parfaitement en phase avec le Ministre Moustapha DIAKHATE, qui estime que : « Khalifa et Karim doivent subir leurs peines. Ils ont commis des fautes. ».
Il y va de soi que nous sommes farouchement opposés à une éventuelle amnistie de Monsieur Karim WADE fièrement brandie par ses partisans à tout bout de lèvre.
De grâce Excellence Président de la République, pas de grâce pour Khalifa !
De grâce Excellence Président de la République, pas d’amnistie pour Karim !
Vive la justice de mon Pays !
Vive la Séparation des pouvoirs !
Vive la République !
Vive le Sénégal !
Amadou THIAM
Juriste Spécialisé en contentieux des Affaires