Près de six millions d’électeurs sont appelés aux urnes ce matin pour départager près de 30 000 candidats pour des municipales qui n’avaient pas été tenues depuis 13 ans et ou 342 mairies sont en jeu. Lors des dernières municipales contestées par l’opposition en 2005, le camp de feu le président Lansana Conté avait raflé près de 80% des suffrages. Cette année 2018, elles restent très ouvertes, notamment entre le RPG au pouvoir et l’opposition UFDG. Une fenêtre existe également pour les indépendants, autorisés pour la première fois à concourir. Quant aux femmes, elles veulent s’imaginer, elles aussi, un destin politique.
Renouveler la politique de décentralisation de la Guinée et contribuer au développement des localités : voilà en quelque sorte l’enjeu de ces élections qui n’avaient pas été tenues depuis maintenant treize ans.
Après plusieurs reports inexpliqués ou motivés, la tenue de ces élections locales légitimera la politique nationale des collectivités et le cadre d’intervention de tous les acteurs pour soutenir le développement à la base.
La Guinée mettra fin aujourd’hui à une situation inédite en usant de son expérience accumulée au cours de cette longue période d’inertie pour doter les entités décentralisées de conseils communaux légitimes.
Cette élection est donc un rendez-vous pris de longue date par tous les acteurs institutionnels, politiques ainsi que par ceux de la société civile.
Avant d’aller aux urnes, les électeurs devront être guidés, rappelle un responsable de la commission électorale, par le seul intérêt de leurs localités afin de les confier à un homme ou à une femme capable de répondre favorablement aux besoins les plus élémentaires des habitants des différentes localités : assainissement, sécurité, développement local.
Il n’est pas inutile de rappeler que lors des dernières consultations en 2005, le PUP, parti alors au pouvoir, avait raflé plus de 80% des suffrages laissant à l’opposition moins de 20% dont une commune au RPG d’Alpha Condé.
La parité n’est pas encore d’actualité
Ce scrutin est un test pour le nouveau code électoral adopté en juillet dernier et qui supprime notamment l’obligation de présenter un quota de 30% de femmes sur chaque liste, quota jugé « discriminatoire » par la Cour constitutionnelle. Ce que déplorent les associations de promotion de la femme.
Mariam Bailo Barry prépare de la pâte à beignets dans le quartier populaire de Cosa. Elle aimerait voir plus de femmes en politique « parce que la femme connaît notre souffrance ». Et elle n’est pas la seule : « Là, on voit mal l’égalité entre femmes et hommes », regrette en effet cette jeune femme, qui qu’elle « votera pour une femme, ça je peux vous le confirmer, je le ferai ». Et sa voisine de renchérir : « on voudrait qu’il y ait un petit peu plus de femmes encore. Parce qu’on sait que les femmes sont capables. »
Sur près de 30 000 candidats, environ 7000 seulement sont des candidates, selon les chiffres de la Céni. « Je crois que la lecture qu’en a faite la Cour d’extraire cette disposition du code électoral, c’est parce qu’elle estimait que, en prévoyant qu’il y ait 30% de femmes, c’est comme si qu’on avait décidé de limiter la participation des femmes dans le processus à 30% et que ça aurait pu être 50% et pourquoi pas 100% », estime Etienne Soropogui, commissaire à la Céni.
Dans les faits, c’est plutôt 23% de femmes sur les listes. Cette décision représente donc un « recul » pour Moussa Yero Bah, journaliste et présidente de l’ONG Femmes, développement et droits humains en Guinée : « Je me dis qu’on aurait pu avoir beaucoup plus de femmes. On se sert d’elles pour la mobilisation. On les met au premier rang quand il s’agit de danser, de chanter et d’accueillir les leaders politiques, il faudrait que les femmes disent non à être utilisées mais oui à être sur les listes et en bonne position. »
A l’Assemblée, c’est à peine 22% de femmes. Mais des législatives sont prévues pour septembre prochain.
Rfi