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Espagne: la victoire du «survivant» Sanchez et la chute du «vieux routier» Rajoy

En Espagne, le socialiste Pedro Sanchez doit prêter serment ce samedi 2 juin pour devenir le chef d’un gouvernement qu’il doit encore former. Pedro Sanchez, un économiste de 46 ans, a réussi vendredi à renverser le conservateur Mariano Rajoy, au pouvoir depuis 2011, en faisant voter une motion de censure au Parlement. Ce matin, la presse espagnole donne la parole aux gagnants et aux perdants et revient sur les destins croisés de ces deux figures de la politique.

Les médias espagnols reflètent les deux événements marquants : le départ du conservateur Mariano Rajoy et l’arrivée du socialiste Pedro Sanchez. « Rajoy renonce à éviter le désastre, titre le journal El MundoPuisqu’il ne démissionne pas, alors il n’y aura pas de nouvelles élections », explique le quotidien, ce qui fait que l’on va avoir un gouvernement très instable.

« Le Parti populaire de Rajoy doit organiser un congrès extraordinaire », assène le quotidien conservateur ABC : « C’est un échec considérable pour ce vieux routier de la politique qui n’a pas su résister à la motion de censure de Pedro Sanchez ». Le journal poursuit : « Rajoy doit laisser sa place dans le parti aux plus jeunes et pour donner une chance d’avenir à sa formation ».

Avant le vote, Mariano Rajoy a concédé sa défaite. « C’est un honneur de quitter l’Espagne dans une meilleure situation qu’elle ne l’était », a-t-il dit. Mariano Rajoy, obstiné et patient, vu par ses critiques comme immobile et rigide, a déjà survécu à deux mutineries contre lui dans son parti : une récession économique quand il a décroché le pouvoir et la crise catalane qui a inquiété toute l’Europe.

Fragilisé mais pas mort

L’ex-Premier ministre n’est donc pas mort politiquement, juge l’historien et spécialiste de l’Espagne, Benoît Pellistrandi. Et cela pour plusieurs raisons. « Il est très fragilisé, moins par la crise catalane que par les affaires de corruption. Mais personne au sein du parti ne s’est levé contre Mariano Rajoy. Mariano Rajoy tient son parti d’une main de fer, il trouve injuste cette façon d’abandonner le pouvoir et il en est en partie traumatisé, comme le Parti populaire. »

« Par ailleurs, il voit une opportunité politique, souligne le chercheur. Mariano Rajoy veut profiter du délai jusqu’aux prochaines élections pour faire un travail de sape contre le Parti socialiste, et remobiliser l’électorat conservateur au côté du Parti populaire. Il y a une forme d’alliance objective entre le Parti populaire et le Parti socialiste, aussi paradoxale que cela puisse paraître. »

« Les deux formations sont actuellement largement distancés dans les enquêtes l’opinion par Ciudadanos et le parti centriste, rappelle Benoït Pellistrandi. Ils ne veulent surtout pas que les élections aient lieu trop tôt et je crois que le pari que fait l’un, Rajoy, et que fait l’autre, Sanchez, de la même façon, c’est que cette situation provisoire va les renforcer l’un et l’autre. Or il y en a bien un des deux qui se trompe forcément. »

La victoire d’un obstiné

Le socialiste Pedro Sanchez, de son côté, exulte : « C’est un obstiné qui a gagné et qui va prendre les manettes du pays », souligne le quotidien El País, qui rappelle que celui qui va diriger l’Espagne a essuyé mille échecs au cours de sa carrière.

El Mundo abonde dans le même sens, rapportenotre correspondant à MadridFrançois Musseau. « C’est l’arrivée inespérée d’un survivant. Pedro Sanchez ne renonce jamais, reste pour lui à devoir composer désormais avec sept formations différentes et ce sera très difficile, en particulier avec les indépendantistes du Pays Basque et de Catalogne ».

Les difficultés à venir d’un « miraculé »

Car le secrétaire général du Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) revient de loin rappelle l’historien et spécialiste de l’Espagne, Benoît Pellistrandi, qui estime que Pedro Sanchez est « un miraculé », « parce qu’il est mort deux fois, politiquement ».

« En 2014, il devient secrétaire général du Parti socialiste ouvrier espagnol à la faveur d’une primaire et il est en fait le candidat pantin de la direction et des cadres. Il est choisi parce qu’à l’époque, on l’appelle « El guapepe », c’est-à-dire « le beau mec », et les socialistes disent : avec Pedro Sanchez, on a un bon produit marketing. Puis, politiquement, il n’a pas beaucoup de substance. »

La seconde traversée du désert de Pedro Sanchez a lieu en 2016, quand il tente « d’être investi chef du gouvernement avec une alliance du côté de Podemos et des indépendantistes. Il va alors chercher le vote des Catalans ». Une démarche lui vaut les foudres de son parti. « Là, l’appareil socialiste se rebelle contre Pedro Sanchez et le force à démissionner ». Le 1er octobre 2016, Pedro Sanchez démissionne, quitte le Parlement espagnol et part à la conquête de la base.

Son retour se fait en mars 2017, à la faveur des les élections primaires, qu’il gagne. « Il redevient chef du Parti socialiste contre l’appareil. Si bien que Pedro Sanchez a deux problèmes majeurs : un, il n’a pas de majorité pour gouverner ; et deux, il y a une partie du Parti socialiste qui ne lui fait pas confiance ».

Rfi.fr

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