Debout, citoyens sénégalais !
Oui, comme le dit notre Président auto-réélu, il y a urgence à accélérer la cadence. Non pas seulement pour rendre Dakar aussi propre que Kigali, ce qui est utopique, à court terme, ni pour réduire le train de vie de nos gouvernants, qui n’y sont pas encore préparés, comme l’illustrent les exigences de hausse salariale des parlementaires applaudisseurs !
Non ! Tous ces objectifs sont encore trop ambitieux, vu l’état actuel de la gouvernance de notre pays.
Avant ces opérations visant à rendre nos quartiers propres, à lutter contre l’encombrement et l’occupation anarchique de nos avenues, rues et ruelles, il est indispensable d’assainir les mœurs politiques de notre élite nationale.
Il faut rompre définitivement avec cette approche messianique qui veut, qu’un leader, convaincu de sa popularité, à l’issue d’élections certes légales mais tronquées, détienne le monopole de la vérité et s’arroge le droit de chambouler notre charte fondamentale, en vue de s’octroyer encore plus de pouvoirs. Ce qui est troublant dans cette affaire, c’est que la démarche du chef de l’État prend à contre-pied les principes de la Charte de gouvernance démocratique signée par l’ensemble des leaders de la coalition présidentielle.
En dehors de cette suppression du poste de premier ministre, qui enterre définitivement toutes velléités d’abolir ou tout au moins de tempérer l’hyperprésidentialisme obsolète, on observe plusieurs autres tares caractéristiques de la gouvernance apériste.
Même si on estime que la nomination à tous les postes civils et militaires incombe au président de la république, on ne peut que déplorer sa gestion patrimonialiste, caractérisée par l’immixtion de ses proches dans les affaires publiques et aussi, par le fait que les fonctions les plus stratégiques au niveau de l’appareil d’État sont occupées par des membres de son clan (nouveau méga-ministère du développement communautaire, de l’équité territoriale et sociale, caisse de dépôt et de consignation, ministères de l’Intérieur ainsi que ceux de l’Économie et des Finances…). Cette bienveillance envers les siens contraste avec une absence de loyauté et de reconnaissance envers d’autres membres de son parti, défenestrés sans état d’âme, même si la presse officielle les a toujours crédités de bilans élogieux.
Ce qui est le plus insupportable dans la gestion du président Sall, c’est son caractère discrétionnaire et souvent unilatéral, relevant presque toujours du fait accompli. Certains parlent même de dissimulation, car on note une absence totale de concertation avec les alliés, les ralliés, les transhumants et autres naufragés politiques, condamnés à avaler des couleuvres, en attendant quelque bienfait du nouvel Empereur.
Un autre phénomène inquiétant et lourd de risques pour la paix civile est cette tendance pathologique à modifier les règles du jeu: loi sur le parrainage, retouches sur la Constitution, projet de report des élections locales.
Sous prétexte d’émergence et d’efficacité organisationnelle, le président et ses thuriféraires sont en train d’instiller insidieusement le concept d’un régime fort, s’inspirant du modèle rwandais, où les bienfaits d’un développement économique justifieraient le renoncement à nos acquis démocratiques conquis de haute lutte !
Face à cette longue descente aux enfers ainsi qu’aux risques d’instabilité sociale majorés par les menaces sécuritaires et notre nouveau statut de pays pétrolier, les patriotes de notre pays ont l’obligation morale de se dresser.
Pour cela, l’Opposition politique et toutes les forces vives de la Nation doivent s’engager dans une nouvelle démarche pour le développement des luttes populaires, qui ne se limiteraient pas au seul horizon de la démocratie libérale. Cela sous-entend une véritable responsabilisation citoyenne, qui ne se réduit pas à l’exécution docile des directives élaborées par les hauts d’en haut, cherchant à divertir le peuple laborieux.
Il s’agira plutôt, non seulement, de restaurer les libertés démocratiques confisquées par une autocratie en gestation, mais aussi d’œuvrer pour le respect des droits économiques et sociaux des citoyens.
Ces nobles idéaux ne pourront être atteints, que par la réappropriation de l’esprit des Assises Nationales, c’est à dire la rupture avec cette concentration du pouvoir entre les mains d’un seul homme et l’instauration d’une véritable démocratie participative, permettant un contrôle des exécutifs à tous les niveaux.
NIOXOR TINE