Face à la presse, ce mardi 16 octobre 2018, Ousmane Sonko a accusé le directeur des Domaines, Mamour Diallo, d’avoir détourné… 94 milliards de francs Cfa dans le cadre d’une affaire foncière. Non sans ajouter: «Il n’est pas à son coup d’essai car il a été épinglé par d’autres rapports, notamment par l’IGE et la Cour des comptes. J’ai saisi tous les organes de contrôle, mais il n’y a que l’Ofnac qui a réagi. Or, cela est un crime économique.»
Pareille accusation est hallucinante. Sur quelle base le leader de Pastef a-t-il fait son évaluation pour arrêter la somme prétendument détournée au chiffre rond de 94 milliards ? Quel rapport a établi que l’actuel directeur des domaines a détourné cette somme ? Aucun. Evidemment.
Mieux, même au cas où des malversations sont imputées à Mamour Diallo par des organes de contrôle, peut-on le déclarer coupable alors qu’aucune juridiction n’en a ainsi jugé ? Ousmane Sonko se rend-t-il compte qu’il commet une diffamation en accusant un fonctionnaire de faits établis par aucun tribunal ?
Si Sonko fait référence au titre Bertin, pourquoi n’attaque-t-il par Abdoulaye Wade qui, alors à la tête de l’Etat, a pris tous les actes et décisions afférents à ce gros titre foncier ? Est-ce parce qu’il est plus commode de viser un chef de bureau des domaines de Rufisque, minuscule exécutant dans ce dossier ?
Pour finir, au nom de quels principes Sonko s’arroge-t-il le droit de distribuer des bons et mauvais points, des brevets de respectabilité et d’indignité aux uns et aux autres ? Peut-il fonder toute sa stratégie de conquête du pouvoir sur la calomnie et le déballage ?
L’accusation hallucinante proférée contre Mamour Diallo peut aussi s’expliquer par du cynisme tout court. Embourbé dans une controverse après des propos sur les politiciens, Sonko a pu soulever cette polémique contre le directeur des domaines pour faire oublier celle qui le vise lui-même. C’est ce qu’on appelle un contre-feu en communication politique.
Si tel est le cas, comme il paraît fort probable, c’est à désespérer des nouveaux venus qui étaient censés moraliser les moeurs politiques.
Dadi Diop