L’aventure gabonaise des « Lions » et la crise gambienne ont été, sans doute, deux os que le peuple a rongés, depuis quelques semaines, loin des urgences de l’heure.
Maintenant qu’elles ont, respectivement, accouché d’une fin cauchemardesque et d’un règlement sans effusion de sang, le Président Macky Sall va, désormais, devoir faire face à un certain nombre de métastases cancéreuses, que son régime a du mal à résoudre.
Lesquelles ont pour noms : revendications des Syndicats d’enseignants sur fond de préavis de grève, colère noire des Médecins, nécessité de doter le monde rural de vivres de soudures, insécurité des personnes et de leurs biens, processus électoral en cale sèche… Bref, Macky Sall remet les pieds dans le vrai Sénégal.
Depuis plusieurs semaines, le régime du Président Macky Sall a su surfer sur deux leviers et non des moindres, pour faire oublier, momentanément, au peuple les vraies questions de l’heure. Il s’agissait de la crise gambienne et de la participation de l’équipe nationale à la Coupe d’Afrique des Nations.
Mais maintenant que le Président Adama Barrow a rejoint Banjul et que les « Lions » ont, prématurément, raccroché les crampons et ne sont plus bons qu’à aller jouer au babyfoot, le Président Sall doit renouer avec la dure réalité : faire face à la kyrielle de foyers de tensions.
Ces Syndicats qui ont fini de faire l’apprentissage de la déception avec l’Etat et qui ont déjà investi le maquis
Parmi les questions cruciales auxquelles le Chef de l’Etat est appelé à trouver des réponses, figurent les revendications des chevaliers de la craie. Car on se souvient de la colère du Cadre unitaire des syndicats enseignants du moyen et du secondaire (Cusems) qui ne faiblit pas. Et ils menacent de déposer un préavis de grève. Motif invoqué : refus du Gouvernement de respecter ses engagements avec ses membres.
Et inutile de rappeler les engagements ! Car ils ont trait au paiement d’une indemnité de logement, à la création d’un corps d’administrateurs scolaires et à la formation des professeurs d’économie familiale recrutés avec un baccalauréat littéraire. Ce n’est pas tout, parce que les enseignants dénoncent, également, les retards récurrents notés dans le paiement des salaires des maîtres contractuels et les affectations arbitraires et intempestives » d’enseignants.
A ce trop-plein, est venue s’ajouter la menace du Syndicat des enseignants libres du Sénégal (Sels) originel et du Grand Cadre de paralyser le système éducatif. Si, évidemment, rien ne bouge et ne change dans leurs doléances.
Preuve que le Gouvernement de Macky Sall a du pain sur la planche, ces deux organisations syndicales étaient récemment en tournée dans le nord du pays pour consulter les enseignants sur l’état d’application des protocoles signés par le gouvernement.
D’ailleurs, convaincu qu’ils ont affaire avec un Gouvernement qui fait plus dans le dilatoire qu’il ne sache honorer ses engagements, Oumar Waly Zoumarou, Secrétaire général national du Sels originel, a récemment, promis que son Syndicat va déposer un préavis de grève. Ce, aux fins de contraindre le Gouvernement à enjamber le temps pour la satisfaction de la plateforme revendicative de ses camarades.
Dans les Universités publiques, on porte le masque des mauvais jours
Ce n’est pas seulement, au niveau de l’Elémentaire, du Moyen et du Secondaire que ça chauffe. Loin s’en faut ! En effet, les Universités sont, également, dans le maquis. Avec, notamment, le Syndicat autonome de l’Enseignement supérieur (Saes), qui, le mercredi 21 décembre 2016, avait procédé à un débrayage. Lequel avait perturbé les cours dans les 5 Universités du Sénégal.
Objectif recherché, à l’époque, obliger le Gouvernement à satisfaire le seul point parmi les quatre de l’accord portant sur la modification de la loi 61-33 du 17 juin 1961 et du régime du Fonds National de Retraite (Fnr).
A l’origine de ce mouvement d’humeur : ce que le Saes qualifie de faible implication du président de la République dans sa plateforme, l’inertie des ministères concernés sur un certain nombre de questions, notamment la création de nouveaux corps et l’incidence financière consacrée à la mise en œuvre de l’Acte III de la décentralisation, entre autres.
Pis, le Saems constate, pour s’en désoler, que les engagements pris par ces Ministres lors des plénières dirigées par le Premier Ministre n’ont jamais été partagés avec leurs équipes pour leur suivi et leur mise en œuvre.
Pour rappel, le Gouvernement avait, en mai 2016, le Bureau national du Saes avait mis en exergue le seul point de la retraite dans sa ligne de combat. C’était sous la supervision du Chef du Gouvernement. Mais c’était peine perdue. Car la promesse de l’Etat, qui avait amené le Saes à surseoir à son mouvement d’humeur d’alors, a fondu comme beurre au soleil.
Les Médecins, « ivres » de colère
L’autre bourbier auquel Macky Sall et son régime doivent se préparer, constitue la grogne des blouses blanches. Dans la mesure où, en grève de 72 heures, du lundi 19 au mercredi 21 décembre 2016, le Syndicat autonome des médecins du Sénégal (Sames) a organisé une marche nationale, le mardi 20 décembre 2016, de la Place de l’Obélisque au Rond-point de la RTS.
Le Monde rural et son regard rouge, du fait de cette métastase cancéreuse
A ces différents fronts, vient se greffer l’épineuse équation de la mise à disponibilité en vivres de soudure en faveur du Monde rural. Frappé de plein-fouet par les mauvaises récoltes de l’hivernage écoulé. Pour cause, dans bien des localités du pays, pour ne pas dire sur toute l’étendue du territoire nationale, les récoltes des paysans n’ont pas été au rendez-vous. Ce qui, naturellement, augure des lendemains incertains.
On tue, on agresse et on braque au pays de Macky Sall
Autre trou noir du règne de Macky Sall auquel le Président de la République doit remédier : la lancinante question de l’insécurité. En effet, depuis quelque temps, les cas de meurtres ont culminé jusqu’à un niveau insoupçonné. Les agressions, n’en parlons pas ! Elles sont toujours de mises, tout comme les vols à l’arrachée.
Outre ces meurtres et autres agressions physiques, il y a que des bandes d’hommes armés empêchent les citoyens de dormir du sommeil du juste. En attestent les quelques cas de braquages notés ces derniers temps et dont le dernier en date remonte à jeudi passé. Avec, à la clé 111 millions F Cfa emportés par des gros bras encagoulés, après des coups de feu nourris avec les policiers.
Processus électoral en berne
C’est dans ce contexte de complaintes quasi-généralisées que Macky Sall et son régime doivent affronter un autre théâtre d’opérations. Il s’agit du contentieux autour du processus électoral. La Coalition « Mankoo Wattu Seneegal », qui ne lui fait plus confiance, alors pas du tout, surtout au sujet de la sincérité de son ministre de l’Intérieur à organiser des élections libres, transparentes et démocratiques, promet de se battre de toutes ses forces, pour ne pas être victime, dit-elle, d’un hold-up électoral.
D’ailleurs, la décision de l’opposition de déchirer l’invitation que le Président Macky Sall lui a adressée, pour une rencontre, vendredi dernier, est assez révélatrice que les deux parties marchent, lentement, mais sûrement vers un terrible coup de froid dans leurs relations.
En ce sens qu’à quelques mois des élections législatives, l’opposition, qui accuse le Pouvoir de concocter un coup d’Etat électoral, au soir du 30 juillet prochain (date retenue par le Chef de l’Etat pour la tenue des élections législatives), promet de recourir à un plan d’actions d’enfer contre le régime en place.
Ngoya Ndiaye (Actusen.com)