La logique des organisations n’est pas celle des hommes. La logique des hommes étant plus dynamique, elle ne tient que faiblement face aux intempéries et autres chocs exogènes. Et finalement, il n’y a pas une logique d’hommes. Il n’y aura que des postures variables en politique. Ayant pour finalité la conquête du pouvoir, les hommes, et les temps par lesquels on les gouverne ne sont pas immuables. Les moyens et les armes par lesquels on les dirige n’ont pas de valeurs universelles. Ils ne dépendent alors que des hommes du temps.
Donc, pourquoi attendre une logique dans les attitudes des uns et des autres. Les messies et autres personnes influentes de la trempe de Mandela ou de Sankara ou encore Kagamé qui arrivent à trouver la recette magique ne se présentent à nous qu’une fois ou deux fois tous les 50 ans. C’est déjà un miracle qu’on en ait deux contemporains. Les autres sont mortels ; Tanor y compris.
Il ne déçoit pas ou ne peut décevoir que les crédules. Abonné aux défaites depuis le départ de son mentor, Tanor a pris la mesure de son inaptitude à arriver à ses fins. Suffisamment fini pour vaincre un président d’un autre âge, il fait l’option de garder sa retraite de la plus belle des manières non sans cette susceptibilité qui caractérise tous les loosers. Ceux-là n’aiment surtout pas se regarder devant la glace. Incapable de faire face aux contes et légendes d’un parcours sans gloire, la plus petite notes discordantes sonne comme un crime de lèse-majesté. Khalifa Sall et Barthélémy Dias l’apprendront à leurs dépens.
Quoiqu’il en soit, c’est ainsi mieux que de rééditer le scénario proposé par Landing Savané en 2007 : un candidat à l’assaut d’un palais qui abritait tous les jeudis les réunions du conseil des ministres auxquelles il prenait pourtant part et contre toute logique. Si on les compare, on verra tout de suite le camp de la logique et ce sera évidemment celui de Tanor. Et comme ils aiment à le dire, une décision de compagnonnage avec le président prise en toute responsabilité en pleine journée sans s’en cacher et tout en l’assumant est un signe de courage. Quel exploit ! Petit exploit puisque la décision contraire aurait surpris. A l’heure de gouverner, on doit se préparer à assumer le bilan. Finalement ce n’est une surprise pour personne.
On n’élit pas les partis, le peuple fait confiance aux hommes. L’APR n’a pas la maturité d’une formation politique comme celle du PS, pourtant, elle a empêché les dinosaures d’accéder à la magistrature suprême. C’est l’homme et sa trajectoire qui ont été déterminant auprès des populations. Avec une posture plus intelligente mais ferme, Idy aurait pu être le chef du parti qui gagnerait ses premières joutes électorales. L’éternel faiseur de roi a joué aux arbitres en 2000 alors que sa formation naissait quelques mois plus tôt. Finalement, les partis ne sont que des véhicules, la conduite ne dépendra que du conducteur et comme il est seul dans le véhicule, c’est le désert total derrière lui. Tanor se bat pour sa retraite et oublie l’héritage, Moustapha Niasse s’embrouille avec ses jeunes qui affichent la plus petite ambition. L’après Macky SALL laisse entrevoir une situation assez inquiétante. En attendant, un autre phénomène, n’allons pas croire au retour des partis traditionnels. Ils se sont laissés à l’euthanasie pour offrir un avenir à des vieux qui n’en ont plus.
Le champ politique est devenu une jungle où les espèces anciennes sont menacées. Cette école vieille et aussi caduque que ses méthodes donnent pourtant du fil à retordre aux tenants de l’alternance générationnelle. Il est peut-être temps de comprendre que le mal ne se trouve pas forcément dans l’âge des personnes mais dans l’âge des méthodes. Les nouveaux enjeux de la démocratie qui remettent le citoyen au centre des préoccupations et qui font de lui un acteur légitime de la construction du destin exigent une certaine impartialité et une transparence aussi bien dans la conduite des affaires de la cité que dans la dévolution du pouvoir qui le permet.
Ceux qui menacent les vieilles marmites constituent un bloc d’aspirants à une nouvelle méthode avec une façon de faire qui donne le tournis aux intercepteurs de prébendes et à une certaine masse habituée à la facilité du gain et exposé en même temps à une pauvreté chronique. Ce qui fait d’eux des proies faciles à quelques politiciens véreux à qui il doivent le salut. Les plus ambitieux d’entre ceux-là sont ceux qui rêvent d’une permutation pour s’accaparer du rôle d’un vénéré distributeurs de billets. Ils font bonne équipe avec une autre catégorie habituée à être entretenue, composés d’hommes et de femmes qui se confèrent eux même le titre de grand commis de l’Etat ou de bâtisseur d’une République qui n’a fait que les nourrir, les loger, les habiller et à laquelle ils ne croient pourtant pas. Aucun ouvrage, plan ou programme de construction du pays n’est sorti de leurs longues carrières d’étudiants et de grands commis de l’administration. Ils ont bougé au gré du vent en ayant en ligne de mire la verdure qui annonce la prochaine prairie. Transhumant de prairie en prairie, ils finissent par se plaire dans cette situation de parasite.
Gare à celui qui veut leur faire courir le risque de retourner à cette vie normale de tous les Sénégalais et qui, pour eux, est une galère insurmontable.
Actusen.sn