En tournée dans le nord du pays, Maître Alioune Badara CISSE (ABC), par ailleurs Médiateur de la République s’est prononcé la situation du monde rural, notamment dans la région de Matam. Aussitôt, le chef du Gouvernement est monté au créneau, par presse interposée, pour fustiger le comportement du Médiateur et rappeler à ce dernier que l’institution qu’il dirige (Médiature) « n’est pas un organe de contrôle des politiques publiques comme l’Assemblée nationale, l’Inspection générale d’Etat,… ». A cet effet, il convient de rappeler que le Médiateur est une institution créée par la loi n°91-14 du 11 février 1991, qui sera par la suite abrogée et remplacée par la loi n°99-04 du 29 janvier 1999. Selon le législateur, le Médiateur de la République est une autorité indépendante, qui a pour mission de pallier l’insuffisance de la justice administrative, de protéger efficacement les droits et libertés des citoyens et d’améliorer le fonctionnement de l’administration. Ainsi, même s’il est nommé par le Président de la République pour une durée de six (06) ans non renouvelable, ce dernier ne peut mettre fin à ses fonctions qu’en cas d’empêchement constaté par un collectif présidé par le Président du Conseil constitutionnel. De ce fait, le Médiateur n’est responsable, ni devant le Président de la République, ni devant l’Assemblée nationale, encore moins devant le gouvernement (ou son chef !). Son indépendance a fait qu’il ne peut recevoir d’instructions d’aucune autorité (fût-elle législative, judiciaire ou exécutive). Il ne peut non plus être poursuivi, recherché, arrêté ou même jugé à l’occasion des opinions qu’il émet (donc il peut bien émettre des opinions !). Il s’agit là d’une immunité qui couvre le Médiateur dans l’exercice de sa mission. En revanche, le chef du gouvernement est une autorité administrative nommée par décret, chargée de mettre en œuvre la politique définie par le Président de la République. Donc étant une autorité indépendante, le Médiateur ne saurait recevoir d’injonctions ou d’ordres comminatoires provenant d’une autorité dépendante, temporaire (précaire et révocable à tout moment) et responsable devant le Président de la République (limogeage) et devant l’Assemblée nationale (motion de censure). Par ailleurs, un enseignant-chercheur en droit à l’UCAD s’est prononcé sur cette question dans un journal de place, en estimant que le président de la République dispose de trois (03) armes pour se débarrasser de Me Alioune Badara CISSE. Mais notre « Professeur » de droit n’a cité aucun texte juridique pour chacune de ses propositions. Je rappelle également que la notion de « faute grave » n’existe pas dans la loi 99-04 susvisée, ni même dans le droit positif. Seule la n°97-17 portant code du Travail fait référence à la notion de « faute lourde ». Or, la mise en application de celle-ci est bien réglementée en droit du travail.
Kalidou SOW
Sowkalidou75@gmail.com