C’était une promesse d’Emmanuel Macron. Le chef des armées françaises est ce vendredi 19 mai au Mali auprès des militaires de la force Barkhane. Il rencontre notamment les forces spéciales, le service de santé des armées et les forces armées maliennes, qui travaillent avec la force déployée par Paris tous les jours. C’est le premier déplacement hors d’Europe du nouveau chef de l’Etat.
Avant son élection à la présidence de la République, Emmanuel Macron avait promis qu’en cas de victoire, il se rendrait immédiatement auprès des forces françaises sur le terrain. Il s’exécute ce vendredi à Gao, dans le nord du Mali. Pourquo Gao ? Parce qu’il s’agit de la plus importante base de l’armée française sur un théâtre extérieur, explique l’Elysée.
La base avancée du dispositif Barkhane n’a cessé de s’agrandir. En janvier 2013, quand les forces françaises, tchadiennes, nigériennes et maliennes ont libéré la ville, il n’y avait sur place qu’une tour de contrôle et quelques bâtiments couleur ocre où s’abritaient les parachutistes français, ainsi que les forces spéciales qui s’apprêtaient à entrer dans Kidal, puis Tessalit.
Au total, 1 600 militaires français vivent et travaillent désormais sur la base de Gao, que va visiter le chef de l’Etat français. Il ne passera pas par Bamako, mais un entretien en tête à tête avec le président Ibrahim Boubacar Keïta est prévu, alors que la mise en œuvre des accords d’Alger traine en longueur, et que les terroristes étendent leur zone d’action au centre du Mali, au Burkina Faso et au Niger.
L’accord d’Alger tarde à se mettre en œuvre
Si Emmanuel Macron se rend à Gao, c’est donc aussi parce que la lutte continue. Malgré le camp Barkhane, le camps de l’ONU, le camp Castor des Allemands ; malgré des milliers d’hommes, des avions, des hélicoptères et des drones, la paix n’est toujours pas revenue. Le 18 janvier dernier, des terroristes ont frappé le camp du Mécanisme opérationnel de coordination (MOC). Un attentat qui a fait au moins 54 morts.
Sur cette base de Gao, le président Macron doit saluer les 1 600 soldats français et passer avec eux plus de quatre heures ponctuées d’un discours. Mais puisque le chef de l’Etat IBK se déplace pour l’accueillir, nul doute que les deux hommes parleront de l’accord d’Alger signé il y a deux ans. Selon l’entourage du président français, la mise en œuvre de cet accord prend du temps car il y a des résistances dans les deux camps, autrement dit chez les rebelles comme dans le camp du pouvoir.
Plusieurs groupes terroristes font désormais front commun au sein du groupe de soutien à l’islam et aux musulmans et multiplient les attaques dans le centre du pays. Les armes circulent toujours. « Barkhane ne peut pas désarmer de forces les belligérants », souligne-t-on à Paris. Les pays de la région s’organisent, mais l’ennemi est fugace, et se joue des frontières. Le renseignement français estime à 400 le nombre de terroristes dans la zone Sahel-Sahara.
Barkhane n’a pas besoin de plus de soldats. En revanche, la force militaire française doit « pouvoir réagir plus tôt, plus vite, et faire preuve d’encore plus de mobilité », analyse un gradé français cité par notre envoyé spécial Christophe Boisbouvier. « Sans cela, l’ennemi prend l’avantage », concède-t-il. Cependant, comme l’a constaté notre correspondant à Bamako, les Maliens attendent parfois plus qu’une coopération militaire de leur partenaire français pour venir à bout du terrorisme.
Des jeunes plaident pour une lutte en amont
Sur RFI, le président du Conseil national des jeunes (CNJ), Mohamed Salia Touré, donne de la voix et interpelle le président français. « C’est vrai, Macron vient. C’est bien, il vient pour les troupes françaises et c’est un accent, un message pour le combat contre le terrorisme, contre l’insécurité. Mais je voudrais lui rappeler aussi qu’il n’y a pas de sécurité durable sans développement », plaide-t-il.
Pour Mohamed Salia Touré, « la France ne peut pas être en sécurité de façon durable si elle n’investit pas en amont dans l’avenir à donner des perspectives aux jeunes ». Cissé Mahamadou, un autre jeune Malien interrogé par RFI, s’adresse au président français : « C’est un président jeune, qui vient avec des nouvelles idées. Nous, on l’attend particulièrement sur le terrain de l’entreprenariat. Il vient du monde du privé, il est plus susceptible de connaître ces réalités-là. »
« Il y a pas mal de start-up à Bamako. Alors voilà, on attend que les portes s’ouvrent à nous, que les sociétés françaises s’intéressent à ces petites start-up, qu’on puisse peut-être les financer », explique-t-il, alors que d’autres jeunes encore, toujours interrogés par RFI à Bamako, demandent que le chef de l’Etat mette en place une nouvelle politique française sur le continent.
Au centre de leurs préoccupations : le refus de coopérer avec les régimes corrompus ou antidémocratiques en Afrique. Quant à l’ONG Human Rights Watch (HRW), elle plaide pour un renforcement de la lutte contre la corruption et de la justice malienne spécifiquement et espère que le président Macron en discutera avec son homologue malien Ibrahim Boubacar Keïta.
Rfi