Réduire la corruption transfrontalière en Afrique ! Une nécessité, selon Mme Vera Songwe, Secrétaire exécutive de la Commission économique pour l’Afrique (Cea), surtout au moment où la Zone de Libre échange continentale africaine (Zleca) est en train d’être mise en place. Mme Songwe a tenu ces propos, hier, à Nouakchott, lors de la 31ème Session ordinaire de l’Assemblée des Chefs d’Etat et de Gouvernement de l’Union Africaine, qui se tient, depuis le 25 juin, à Nouakchott et prendra fin le 2 juillet. Le thème de ce 31ème Sommet de l’Union Africaine est : «Vaincre la corruption : une voie durable pour la transformation de l’Afrique ».
A l’entame de son discours, la Secrétaire exécutive de la «Cea» a voulu avertir, solennellement, sur l’impact que la corruption pourrait avoir sur le développement de l’Afrique. Et c’est pour dire que «nous devons être conscients que l’Afrique ne sera pas en mesure de tirer parti des possibilités de transformations promises par les différents cadres de développement régionaux et mondiaux si le fléau de la corruption persiste».
Il est, certes, difficile d’indiquer, avec exactitude, le coût de la corruption, mais de récentes évaluations révèlent qu’il pourrait atteindre 1 500 à 2 000 milliards de dollars par an, soit 2% du PIB mondial. Pis, les experts craignent, aujourd’hui, l’impact moins visible, mais encore plus important de la corruption sur le plan social, ainsi que sur les femmes : «la corruption dans la gestion des dépenses publiques affecte aussi la qualité des résultats des services sociaux. Dans les pays les plus pauvres, une personne sur deux paie un pot-de-vin pour accéder à des services de base tels que l’éducation, la santé ou l’eau», a déploré Mme Songwe.
«La corruption affecte plus de 60% des marchés publics en Afrique»
En Afrique, les conséquences les plus inquiétantes de la corruption ont fini de gangréner des domaines, tels que les dépenses publiques, les droits des femmes, le secteur de l’énergie et la propriété intellectuelle. «La corruption affecte plus de 60% des marchés publics en Afrique et gonfle le coût des contrats de 20 à 30%. Dans un monde aux ressources limitées, il s’agit d’un coût de renoncement malheureux et évitable pour des investissements dont nous avons grandement besoin. Nous ne pouvons plus nous permettre de telles pertes », a ajouté Mme Songwe.
En plus de la corruption au sein des pays, il existe, également, un besoin croissant de prendre en compte les liens de corruption entre pays et régions. Selon le rapport de la «Cea», «mesurer la corruption en Afrique : prendre en compte la dimension internationale», l’Afrique a connu au moins 1080 cas de corruption transfrontalière entre 1995 et 2014, dont 99,5% concernaient des entreprises non africaines et dont la plupart étaient des cas d’évasion fiscale.
«Alors que nous travaillons à la mise en place de la «Zleca», nous devons nous assurer que l’Afrique souffre moins de la corruption transfrontalière», a ajouté Mme Songwe, qui a émis l’espoir «qu’à l’horizon des Agendas 2030 et certainement 2063, la corruption ne sera plus le cancer de l’Afrique». A noter que Mme Vera Songwe lancera, ce 30 juin, à Nouakchott, la campagne Honest Service pour des services publics intègres. Visant à mettre en avant les employés de la Fonction publique, qui offrent un service juste, intègre et transparent aux citoyens et clients, cette campagne a pour but d’offrir une approche alternative aux discours sur la corruption en Afrique.
Aminatou AHNE