Certes la démocratie est rythmée par les alternances politiques, mais cela ne garantit guère le bien-être et la souveraineté au peuple. En remplaçant Wade par Macky les Sénégalais croyaient bien faire, mais la réalité politique ne permet plus le moindre doute : le choix de Macky était davantage guidé par l’émotion que par la raison. Les abus politiques que l’on dénonçait sous Wade sont devenus tellement monnaie courante qu’ils sont quasiment inscrits dans le registre de la normalité.
Macky Sall croyait pouvoir tromper les Sénégalais avec sa fameuse histoire de dialogue national : c’était tout juste pour lui une façon de détourner le regard inquisiteur des citoyens et patriotes sur les scandales qui rythment sa gestion. Comment peut-on appeler à un dialogue national sans que la question de la découverte de pétrole et de gaz ne soit inscrite en bonne place dans l’agenda de ce dialogue ?
Macky Sall n’a pas l’aptitude à dialogue sérieux, contradictoire et inclusif : sa psychologie (souvent trahie par son discours) est antinomique à l’altérité. Il sait très bien qu’il n’y a pas de question plus essentielle que celle concernant le pétrole, car elle engage le destin de plusieurs générations. Si Macky Sall était préoccupé par la transparence et la bonne gouvernance, il aurait eu l’amabilité et la clairvoyance d’inviter ses compatriotes à un large consensus sur le pétrole. Il semble que sa véritable motivation était ailleurs : il voulait divertir le peuple et l’empêcher de voir clair dans ses manœuvres.
Macky Sall nous avait promis de rationnaliser les dépenses de l’État, mais ça ne l’a empêché de créer cet aspirateur de poussière politique pompeusement appelé HCCT. Les Sénégalais de bonne foi savent qu’on ne peut pas dissoudre un Sénat, ériger un Conseil économique social et environnemental, puis un HCCT et continuer à parler de gestion sobre et vertueuse. Macky a fait une série de parjures dans toute sa trajectoire politique : il n’y a pas de raison qu’il ne gouverne pas par le parjure !
Macky Sall n’est pas l’homme qu’il faut au Sénégal, notre pays mérite mieux que d’être gouverné par un conglomérat de journalistes, d’affairistes lugubres et de politiciens vampires. Le cartel qui est pouvoir doit, pour l’intérêt du pays, rendre le tablier : plus ils vont persister à vouloir gouverner le peuple par l’obscurantisme et le mensonge médiatique, davantage ils vont rendre la tâche des prochains dirigeant difficile.
Macky Sall n’a jamais été préoccupé par la transparence et la bonne gouvernance. Que fait la CREI depuis le jugement expéditif de Karim Wade ? Qu’a-t-on entendu de la bouche du Premier ministre à propos de l’affaire Lamine Diack ? « Le Sénégal ne va brûler ses stars » disait-il ! Comment un gouvernement préoccupé par la probité et l’image de son pays peut-il avoir une telle position face à un scandale aussi honteux que celui de l’IAAF ? Où en est-on avec l’affaire de la drogue dans la police ? Les dossiers chauds de l’Ofnac ont-ils servi à autre chose qu’à maquiller le vice par les dehors de la vertu ? Que fait Macky Sall avec les décisions de justice qui ne l’arrangent pas ? On l’a vu ignorer la décision de la cour suprême à propos des élèves-maitres radiés par le ministre de l’éducation.
Macky ne dit rien quand Ousmane Sonko révèle que des biens retirés à Karim Wade ont été gracieusement donnés à des proches du régime, mais il le radie de la fonction publique pour le motif qu’il aurait divulgué des secrets que l’État lui-même a bien publiés ! Alors que des biens revendiqués par d’autres avec des titres de propriété légalement établis ont été attribués à Karim Wade dans le seul but de l’envoyer en prison, le régime de Macky Sall veut nous empêcher de lire le nom d’Aliou Sall sur des titres de sociétés constituées par Aliou Sall en personne ! Comment peut-on prétendre vouloir lutter contre l’enrichissement illicite et laisser son frère opérer dans le pétrole comme un ovni ? Comment peut-on créer les ASP, confier cette agence qui étouffe le privé à un compagnon de lutte, et parler de bonne gouvernance ?
Certains moralistes et guides religieux avaient l’habitude dire que Wade a construit des infrastructures, mais il a, au même moment, détruit les conduites vertueuses des Sénégalais. J’aurais aimé les entendre sur les scandales à répétition sous le règne de Macky Sall. Car, pire que ce qu’aurait fait Wade, Macky a avili les belles âmes là où son prédécesseur est suspecté d’avoir « seulement » détruit les belles conduites.
Alassane K. KITANE, professeur au Lycée Serigne Ahmadou Ndack Seck, de Thiès.