La question de la fiabilité du fichier électoral revient comme une girouette réglée sur le modus du contentieux permanent. Encore aujourd’hui, elle est abordée comme elle le fut en 2006. On part du constat que ce fichier contient un stock mort qu’il faut auditer pour l’identifier précisément avant de l’enlever. Ensuite, on décide de repartir à zéro en le reconstruisant à partir d’un nouvel enregistrement des citoyens dans le fichier des cartes d’identité. Et bien sûr, on lance un projet de nouvelles cartes d’identité biométriques à coups de dizaines de milliards de nos francs, supposées plus sures et pouvant supporter d’autres applications. Le tout devra être complété dans un délai court, à quelques encablures des futures élections. Ce contexte d’urgence justifiera tous les raccourcis et compromis techniques, qui à leur tour porteront les germes d’une future situation de fait accompli quant à l’incapacité du dispositif à être pérenne. A quoi bon ? Ne faudrait-il pas régler ce problème une bonne fois pour toutes.
Pour régler le problème du fichier électoral, il faut régler celui de l’Etat civil. Le registre d’Etat civil doit être intégralement informatisé de manière à produire automatiquement la liste des citoyens en âge de voter. Des lors, la carte d’électeur pourra être émise à l’année longue puisqu’il suffira de convoquer le concerné pour compléter les informations sur son lieu de vote. Cette informatisation permettra aussi de rayer les personnes décédées au fur et à mesure, quel que soit le point de déclaration du décès. Sans un tel système, la mise à jour du fichier électoral restera ardue.
Au-delà du fichier électoral, un registre d’Etat civil à jour permet de produire le fichier des personnes dont l’usage pour l’Administration est essentiel dans beaucoup de domaines, incluant l’éducation, la santé, la production de statistiques, etc. C’est un tel dispositif qui existe dans tous les pays modernes, leur permettant de ne jamais se retrouver dans des contentieux récurrents.
Ce dispositif ne peut être bricolé au risque de devoir reprendre le travail au bout de 5 à 10 ans. Les dépenses consenties sont alors plus lourdes. Aux 35 milliards dépensés sur le système actuel, il faut se préparer à ajouter près de 50 milliards que le gouvernement a annoncés comme budget pour le nouveau système de production de cartes d’identité.
Sur le plan technique, le choix d’utiliser la carte d’identité de la CEDEAO est une décision hasardeuse. En effet, cette carte sert principalement à circuler dans les différents pays. En l’Etat actuel, chaque ressortissant peut utiliser sa carte d’identité nationale pour circuler. Donc l’usage de cette nouvelle carte n’a de sens que si elle devient une carte standard avec des caractéristiques techniques communes aux pays et permettant aux systèmes informatiques installés aux frontières de ces pays de pouvoir les lire. Dans ce cas, le Sénégal, devrait attendre la définition de ces normes techniques communes par la CEDEAO et ne pas se précipiter sur sa conception. C’est notre propre président qui déclarait en mai dernier que les pays de la CEDEAO devaient aller vite sur cette question pour des raisons de sécurité commune. Cette interpellation n’a de sens que si les cartes sont standard et accessibles par toutes les polices des frontières de la CEDEAO.
Cette interopérabilité pose aussi des problèmes de confidentialité des données autres que l’identité. C’est pourquoi si un pays veut utiliser la même carte pour y stocker des informations de nature sanitaire, électorale ou autres, il expose ses concitoyens à un usage non autorisé par d’autres pays.
Le Mali a adopté le principe d’un couplage de la carte CEDEAO avec la carte Assurance Maladie. Le Sénégal a décidé de mettre sur l’endos de la carte d’identité des données de nature électorale. Cette décision a d’abord comme effet que certains électeurs auront ces données sur leur carte et d’autres ne l’auront pas parce que le pouvoir veut rayer plus de 2 millions d’électeurs du fichier. Il y a déjà ici matière à stigmatiser des citoyens électeurs et d’autres non électeurs.
On se demande d’ailleurs pourquoi toutes ces informations seraient visibles sur la carte face ou endos, si celle-ci est une carte à puce. L’avantage de la carte à puce est de pouvoir y inscrire des données lisibles par un système informatique. Ces données pourraient être stockées sur la puce en toute confidentialité. Mais encore faudrait-il que la lecture de cette puce soit encadrée pour ne pouvoir être accédée par n’importe quel système au niveau national ou régional.
Le système aux frontières qui accèdera à la puce de la carte du citoyen malien à l’aéroport de Dakar pourrait-il aussi accéder aux données sur l’assurance maladie du porteur concerné ? Ou la carte serait-elle uniquement une carte d’identité, sans aucune autre information sur la puce ?
L’incertitude sur ces questions ne peut être déterminée uniquement par le Sénégal puisque la carte CEDEAO est une entreprise commune et que les expériences en cours ne sont pas guidées ou pilotées par l’instance régionale.
Cette incertitude pourrait aussi peser sur les engagements contractuels entre l’Etat du Sénégal et le prestataire choisi pour la confection des nouvelles cartes d’identité. Contentieux et blocages pourraient encore revenir comme ce fut le cas avec la société Delarue sur les cartes d’identités actuelles.
La position de responsabilité, en l’absence de dispositions claires, devrait consister à garder encore notre carte d’identité nationale pour au moins 5 ans et travailler sur un schéma commun de production de cartes CEDEAO avec l’instance régionale. Cela aurait aussi l’avantage de couter moins cher. Si chaque pays de le CEDEAO, à l’image du Sénégal, casque 50 milliards pour produire des cartes CEDEAO, toutes proportions gardées, c’est un budget total de 750 milliards qui seront dépensés par les pays membres, un gaspillage, surtout qu’aucun plan d’interopérabilité n’est en place.
Nous devrions nous contenter de prolonger les cartes d’identité et d’électeurs en place pour 5 ans encore. Nous avons voté avec ces cartes aussi récemment qu’en 2014. Et, il n’existe pas de problèmes majeurs à émettre de nouvelles cartes puisque que la base de données actuelle est sécurisée avec une identification biométrique. Avec cette solution de prolongation, pendant les 5 prochaines années, la priorité sera d’informatiser intégralement l’état civil de manière à disposer d’un registre unique, sur une base de données unique, accessible à partir de tout point de services d’Etat civil pour enregistrer naissances, mariages, décès et toutes autres mentions sur la situation des personnes. Les cartes d’identité et le fichier des électeurs seront produits ensuite à partir de ce fichier dans 5 ans. Nous aurons aussi le temps d’intégrer les aspects multi application et CEDEAO avec toutes les garanties de succès.
Etant expert international, j’ai eu l’occasion de travailler sur cette question pour une institution internationale dans un pays voisin, comme économiste financier, de surcroit informaticien, je sais tout l’intérêt d’une telle solution durable. Les bailleurs sont prêts à financer une telle opération dont ils comprennent l’enjeu fondamental. Du reste, ce travail permettra d’économiser les coûts de recensement de la population et améliorera les capacités de prévision dans le domaine de l’éducation, de la santé, de la démographie et de l’aménagement du territoire. Rien que ces bénéfices, en ce qu’ils touchent directement la capacité de l’Etat à mieux administrer les populations et leur ciblage, devraient commander une approche plus holistique de nos grands registres dont l’Etat civil est le premier. Malheureusement, l’Etat du Sénégal, continue de prendre une approche qui nous coute cher et nous installe dans un débat politique permanent et futile.
Les politiques qui encadrent la revue du code électoral n’ont d’yeux que sur les élections, et ce faisant, perdent de vue que les données et briques du dispositif qui ne se bricolent pas pour 5 ou 10 ans. Mais personne d’entre eux ne se sent responsable de la situation. Il est plus commode de blâmer l’autre et de faire de la politique sur des questions techniques qui dépassent les élections. Aussi, les milliards à dépenser dans l’acquisition de nouveaux systèmes et les calculs politiques ne sont pas étrangers à ces difficultés. Vivement que la raison reprenne le dessus. Un Etat qui ne maitrise pas ses grands registres est encore à la première marche sur l’échelle des capacités à administrer un pays.
Enfin, il est nécessaire que l’Administration, si toutefois elle décide de maintenir son plan, puisse démontrer aux sénégalais la faisabilité de son plan pour respecter l’échéance de mai pour les élections. Plusieurs difficultés existent :
- La nécessité pour les citoyens de se déplacer pour se faire enregistrer.
- Le besoin d’aller vérifier sa présence sur les listes. Alors que la majorité des citoyens ne sait pas lire.
- Le temps donné aux électeurs pour faire un recours en 15 jours.
- Le délai de 3 mois à respecter pour que le fichier soit prêt avant la tenue des élections en conformité avec le code électoral
- La suspicion des acteurs dans les commissions administratives
- L’illégalité de la radiation des millions d’électeurs qui sera contestée
- Les imprévus naturels avec l’introduction du futur système
Les délais d’enrôlement ne sont pas clairement établis pour assurer que le fichier électoral pourrait être prêt à temps. Serait-ce une raison pour reporter les élections ?
Le 19 août 2016 à 20:48, amadou gueye <amadou.gueye.matookai@gmail.com> a écrit :
Refonte du fichier électoral : Toute loi qui organise la suspension ou la révocation du droit de vote de millions de citoyens est inconstitutionnelle et contestable.
De la même manière que le gouvernement ne peut faire un recensement des sénégalais et décréter que tout citoyen qui ne se fait pas recenser dans ce processus perd sa nationalité, il ne peut aussi décréter une perte de droit de vote parce que le citoyen n’a pas demandé à se faire enregistrer dans le fichier électoral. En effet, le droit de vote et le droit à la nationalité sont tous les deux des droits automatiquement acquis par le citoyen sénégalais. Dans le cas de la nationalité, il est automatiquement acquis à la naissance. Dans le cas du droit de vote, il est automatiquement acquis lorsque le citoyen à 18 ans. Aucun de ces droits ne peut être révoqué par le gouvernement sous le prétexte d’une quelconque opération de nature administrative. En effet, ce n’est pas l’opération administrative qui confère le droit. Elle ne fait que le matérialiser. Cette matérialisation est une obligation de l’Etat. Seule une juridiction habilitée pourrait prononcer cette révocation dans des conditions bien déterminées par la loi. De surcroit, cette application ne porte que sur des cas individuels et non sur des groupes de citoyens. Au demeurant, ni sécurité nationale, ni urgence impérieuse n’existent pour prétendre à une mesure de révocation générale de ce droit pour des millions de citoyens.
Seulement lorsqu’il est manifestement impossible de matérialiser ce droit peut-on trouver au gouvernement des circonstances atténuantes à cette non-matérialisation. Ainsi, si un citoyen ne se fait pas identifier, il peut être compréhensible que cette nationalité ne soit pas matérialisée par un document à cet effet. Mais dès qu’il se fait identifier et satisfait aux dispositions en place, cette matérialisation est définitive. La nationalité du citoyen ne peut être remise en question parce que l’Etat décide de mener un nouveau recensement des sénégalais avec de nouvelles conditions pour la garder ou la perdre. C’est aussi simple que cela.
Pour certains, parce qu’une grande partie des électeurs est désillusionnée par le pouvoir en place, les politiciens et partis politiques de manière générale, ils sont considérés comme un risque. En particulier, le pouvoir en place, faisant l’analyse des résultats du dernier referendum, réalise que la plus grande partie des électeurs n’adhère pas à son offre politique. Or, ces électeurs sont un grand vivier électoral dont l’intérêt pourrait être réveillé par d’autres offres politiques. Ils pourraient aussi décider de voter et ainsi précipiter la chute. Il faut donc les rayer du fichier. Ce forfait est d’une gravité sans précédent. On se croirait dans un régime d’apartheid politique.
Quant à l’abstention, faut-il rappeler qu’elle est consubstantielle au droit du citoyen. Ce n’est ni une faute, ni un délit. L’interprétation politique de son importance et de son impact relèvent de considérations politiciennes pures qui ne peuvent prospérer dans un argumentaire sérieux pour réformer les conditions d’inscription du citoyen dans le fichier des électeurs. Rien que sur cette base, la loi devrait être répudiée pour motifs fallacieux. Si le gouvernement avait la conviction que l’abstention était attentatoire à notre démocratie, alors, il aurait commencé par mener un débat sur le vote obligatoire avant de proposer qu’une loi soit adoptée dans ce sens après amendement de la constitution. En réalité, c’est la dernière chose qu’ils veulent. Faire voter tous les électeurs aboutirait à une chute plus rapide.
Malgré toutes ces considérations, la loi sur la refonte du fichier électoral est passée comme lettre à la poste à l’assemblée nationale. Invoquant l’urgence, le gouvernement a fait jouer sa majorité mécanique pour l’adopter. Les partis de l’opposition, après avoir défendu leurs points de vue, sont retournés à la revue du code électoral, comme si d’autres questions plus importantes devaient y être traitées au-delà de la radiation prochaine de millions d’électeurs. Cette question aurait dû freiner tout le processus. Il ne reste que les forces progressistes pour engager un recours auprès de la cour de justice de la CEDEAO afin de casser cette loi et obliger le gouvernement à la corriger.
Ce recours forcera le gouvernement à plaider devant cette cour en quoi l’abstention justifie de rayer 2 millions d’électeurs du fichier électoral. La radiation massive sera répudiée comme moyen excessif et inacceptable du fait du préjudice qu’elle portera à des millions de citoyens. Lorsque le Burkina a voulu interdire le droit d’être candidats aux citoyens qui soutenaient les changements constitutionnels du régime de Blaise Compaoré, la cour de justice lui demandé de la modifier parce qu’elle avait un effet massif sur les droits constitutionnels des citoyens. Dans le cas qui nous concerne, cet effet est encore plus exponentiel.
Le président a encore la possibilité de ne pas promulguer cette loi et peut encore demander à l’assemblée nationale une nouvelle lecture et sa modification. Mais c’est peu probable du fait qu’il est derrière cette loi qui n’a pas été élaborée par la commission de revue du code électoral.
la seconde partie portera sur les problèmes techniques qui font de la refonte un exercice futile. Dans peu de temps, il faudra refaire le même exercice et dépenser encore des dizaines de milliards. A qui profitent ces crimes économiques ?
Par Amadou Gueye/Nouvelle République
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