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Péril humain au « Daaka » : nous sommes, tous, responsables !

C’est une tautologie de dire que le bilan est lourd. Très lourd, même ! Le « Dakaa 2017» de Médina Gounass restera, à jamais, gravé dans les tristes annales du Sénégal. Avec ses 23 morts. Ou du moins, provisoirement, à ce jour. Car, eu égard à la gravité des brûlures enregistrées chez les victimes, ce bilan déjà ô combien macabre pourrait s’alourdir. Malheureusement. Et il ne reste plus qu’à croiser les doigts pour que le nombre de 23 victimes ne grimpe pas. Amen !

Alors, l’heure n’est plus seulement à s’apitoyer sur les nombreuses pertes en vies humaines du drame de Médina Gounass. Pardon, du péril humain ! Loin s’en faut ! Il est plutôt grand temps, aujourd’hui plus qu’hier, de prendre toutes les dispositions idoines. Afin que pareil drame ne voie plus le jour au Sénégal. Osons le clamer, haut et fort : nous sommes tous coupables.

Que l’on nous comprenne : loin de nous toute idée de remettre en cause la sacralité de l’évènement. Pas question pour nous de critiquer la pertinente idée des vénérées autorités religieuses de la localité d’organiser une retraite spirituelle sur le Site. Où, comme le veut l’Islam, il n’y a aucune possibilité de voir des hommes et des femmes se côtoyer, durant toute la durée du pèlerinage. Tout comme, loin de nous toute volonté de remettre en doute la commémoration annuelle de ce pèlerinage qui revêt un cachet religieux d’une importance capitale chez une bonne partie des Sénégalais. Alors, entendons-nous bien !

D’abord, il faut constater qu’en ce mois d’Avril, où il fait excessivement chaud dans les régions du Sénégal ; avec à la clé, un vent hyper sec, il y avait quelques risques, si minces, soient-ils, qu’en cas d’incendie, les dégâts soient colossaux. En effet, le pèlerinage mobilise des milliers de fidèles au milieu d’une brousse en pleine Saison sèche. Où l’on prépare les mets. Et où la moindre étincelle peut provoquer un péril humain.

Cependant, pour éviter, dans le futur, une tragédie nationale de cette ampleur, il est crucial d’étudier les voies et moyens de tenir, prochainement, la célébration du «Dakaa» sur un Site, qui ne soit pas un tapis herbacé et qui, donc, ne présenterait pas des risques potentiels d’incendie. Si l’emplacement actuel devait être maintenu, il faudrait, alors, que toutes les mesures soient prises, pour que celui-ci soit désherbé. Totalement, d’ailleurs !

Ensuite, il faudrait que certains pèlerins soient davantage responsables et respectueux des normes établies par les autorités religieuses de Médina Gounass. Une introspection est d’autant plus indispensable chez eux que la Cité religieuse incarne les valeurs musulmanes dans toute leur sagesse et s’écarte, du coup, de tous les interdits. Au point que tout pèlerin, qui ne peut pas être en règle avec les principes édictés sur cette terre sainte, doive se garder de souiller la localité, qui symbolise toutes les lettres de noblesses, en termes de pureté.

D’autant que, daprès les premiers éléments de l’origine du drame rapportés par la presse, il ressort que le sinistre a comme origine un pèlerin, qui surpris en train de griller une cigarette, a jeté celle-ci sur la paille. Et le reste se passa de commentaires. On ne peut être fidèle à un guide spirituel et être enclin, coûte que coûte, à travestir ses recommandations et autres prescriptions.

Enfin, vient l’Etat. Lequel a encore étalé ses limites à trouver la clé à ses errements. En effet, il est inconcevable que l’Etat, garant de la sécurité des personnes et de leurs biens, puisse autoriser la tenue d’un rendez-vous annuel sur un tapis herbacé, tout en étant certain qu’en cas d’incendie, il tutoierait le ridicule, dans son combat à circonscrire les flammes.

Même si la faute est à rechercher du côté du pèlerin cupide et indélicat qui a, selon la presse, jeté un mégot de cigarette sur de la paille sèche, objet de tous nos malheurs, il n’en demeure pas moins que le manque de liquide précieux, auquel les sapeurs pompiers ont été confrontés, constitue la goutte d’eau de trop. Bref, sans eau en quantité suffisante, toutes les conditions étaient quasi-réunies pour que l’incendie puisse se propager à une vitesse de l’éclair et causer autant de morts d’hommes.

L’office des forages ruraux s’est fendu d’un communiqué pour dire que, « cette année, 16 camions citernes de 8 à 10m3 ont été mis en place ; 26 bâches à eau livrées pour la circonstance. Le nouveau forage du village de Médina Gounass a été équipé de matériel d’exhaure et d’une potence pour augmenter la production ». Mais la vérité est plus prosaïque !

Outre le manque d’eau, l’Etat est encore tombé dans les travers de sa gestion du plateau sanitaire du pays. La preuve, plusieurs victimes, qui ont été transportées vers l’hôpital de Tambacounda, n’ont pas pu être prises en charge. Parce que l’infrastructure ne répond pas aux normes élémentaires requises pour soulager certains blessés qui souffrent de brûlures du 3ème degré.

On ne le dira, jamais assez. La Couverture Maladie Universelle, c’est bien beau. Le refrain sonne mélodieux et séraphique. On n’en disconvient guère. Mais ç’aurait été excellent que les différents régimes, qui se sont succédé à la tête du Sénégal, songent à doter les capitales régionales d’hôpitaux dignes du nom. Qui soient en mesure de prendre en charge les premiers soins des patients de quel que sinistre que ce soit. Quid de vols disponibles susceptibles de convoyer à Dakar les victimes du «Daaka» ? Allez savoir…

Daouda Thiam (Actusen)

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