La sortie médiatique de l’association sénégalaise pour la promotion de l’astronomie ce 09 mai 2018 sur l’apparition du croissant lunaire notamment sur la date de début du ramadan me permet de revenir pour une deuxième fois sur ce sujet. La première fois, c’était quand elle avait annoncé la date de la korité bien avant la réunion de la commission nationale de concertation sur le croissant lunaire et la décision des khalifes généraux.
Pour cette année l’association des astronomes du Sénégal a informé que le ramadan débutera le jeudi 17 mai. Cette fois encore, bien avant que la commission nationale de concertation sur le croissant lunaire ne se réunisse et que les khalifes généraux concernés ne se décident de la date du début du ramadan, elle s’est fait remarquer à nouveau comme si elle ne guettait que cette occasion pour se mettre sous les feux de l’actualité.
Cette association a du mérite qu’il faut sans ambages reconnaître. Cela étant dit, en tant qu’association de professionnels de l’astronomie, je n’arrive pas à saisir en toute franchise les véritables raisons de leurs interventions médiatiques fracassantes sur l’apparition du croissant lunaire. Ce qui est bizarre, c’est qu’elle agit toujours sans pour autant y mettre la forme qui sied et sans être invité à le faire par la communauté musulmane.
Partout, ici comme ailleurs, la liberté d’opinion et la liberté d’expression ont des limites à ne pas franchir sans quoi on risque de soulever des problèmes dont on ne peut pas deviner les conséquences sur la vie d’une nation. Supposément que l’association ait dans ses statuts, l’observation de l’apparition du croissant lunaire, cependant, elle n’est pas encore l’autorité que l’on écoute et que l’on suit lorsqu’il s’agit de débuter le ramadan ou d’y mettre fin ou de célébrer la korité ou la tabaski ou la tamxarit. Cette autorité indiscutable revient exclusivement aux Khalifes généraux.
C’est ahurissant quand elle prend sur elle-même sans en avoir l’autorité pour dire que le croissant lunaire apparaîtra à telle date plutôt qu’à telle autre surtout que tel jour sera le début du ramadan et que tel autre sera la fête de korité ou la fête de tabaski ou la fête de tamxarit. Sur ce, en annonçant la date exacte avant l’observation du croissant lunaire, il me semble qu’elle s’attribue une place qui n’est pas la sienne dans un domaine réservé à d’autres compétences. Pourquoi choisit-elle ces mois (de ramadan ou de korité ou de tabaski ou de tamxarit) pour effectuer des sorties médiatiques sur l’apparition du croissant lunaire ? Depuis l’année dernière où était-elle ?
En effet, lorsqu’il s’agit pour l’association d’une stratégie de communication pour faire la promotion de l’astronomie et par ricochet pour se rendre visible, elle est entrain de bien le réussir cependant, malgré ces retombées médiatiques appréciables, elle court le risque de l’effet boomerang sur son visage qui découlerait de cette mauvaise stratégie, aux effets potentiellement désastreux sur l’opinion publique et la communauté musulmane qui vont indubitablement se manifester un jour.
Par ailleurs, si elle pense par contre, qu’en effectuant ces sorties médiatiques et en donnant d’avance les dates de début et de fin du mois de ramadan ou de célébration de la fête de tabaski ou de la tamxarit,elle contribue à aider la communauté musulmane à résoudre son problème de contradiction interne, au contraire, elle participe peut-être sans le savoir à créer les conditions d’un conflit d’intérêt notoire avec la communauté musulmane dont elle est censée aider pourtant.
Le Sénégal a la particularité d’avoir un islam confrérique pacifique et tolérant dont les effets bénéfiques transcendent la raison. Cet islam confrérique incarné par Sérigne Touba, El Hadj Malick SY, El hadj Ibrahima Baye NIASS, EL hadj Oumar Fuoutiou TALL, Issa LAYE ont sauvé l’âme du Sénégal de l’enfer. Ils ont mené une résistance culturelle fatalement victorieuse face à la machine destructrice et assimilatrice qu’est la colonisation.Les générations présentes et futures doivent savoir que ces grandes figures religieuses ont permis le Sénégal d’être ce qu’il est devenu aujourd’hui : un havre de paix où des communautés religieuses différentes vivent ensemble dans l’harmonie et la solidarité agissante depuis plusieurs décennies.
Aussi, il faut noter que la pluralité des confréries au Sénégal témoigne de cette liberté du culte érigée en valeur constitutionnelle. Contrairement à ce qui se passe dans certains pays, dans le nôtre, il n’y a pas une autorité ou une seule autorité religieuse qui décide du début et de la fin du ramadan ou de la célébration de la fête de tabaski ou de tamxarit. Chaque disciple obéit à son guide sans denier le droit de l’autre d’obéir à son guide à lui différent de l’autre.
Dans ce contexte de pluralité de khalifes généraux qui est un bien, de fait faut-il le rappeler, il ne peut exister une seule autorité qui décide du début et de la fin du ramadan ou de la célébration de la fête de tabaski ou de tamxarit. Cette pluralité de références est à l’origine de la mise en place de la commission nationale de concertation sur le croissant lunaire constituée des membres de toutes les confréries.
Sur ce chapitre, que peut apporter l’association des astronomes du Sénégal dans la recherche de solution au problème de division notée chez la communauté musulmane pour débuter le ramadan ou y mettre fin ou pour célébrer la fête de tabaski ou la tamxarit ? Elle n’est pas une association de statut religieux même si l’observation de la lune est l’une de ses matières. A cela il faut ajouter qu’elle ne décide pas quand il faut débuter un évènement religieux quand il faut y mettre fin. A sa décharge, je pense qu’elle n’en pas la prétention. Quelle est la plus-value d’annoncer à la communauté musulmane nationale des dates d’apparition du croissant lunaire si on n’a pas le pouvoir de décision ?
Dans ce cas, on peut se demander logiquement, quelle est l’importance de la commission nationale de concertation sur le croissant lunaire si on sait d’avance avec certitude les dates d’apparition du croissant lunaire ?
En conséquence, il faut supprimer cette commission dont l’existence ne se justifie plus à mon avis à partir de ce moment. Cela étant dit, heureusement que ces annonces médiatiques sur les dates de début et de fins des événements religieux des astronomes sénégalais n’empêchent pas, il faut également le dire, la communauté musulmane d’observer l’apparition du croissant lunaire comme elle a coutume de le faire depuis des temps immémoriaux.
Ce que je crois, malgré la solidité de leurs arguments scientifiques, les astronomes sénégalais se mettent sur une position délicate qui n’en vaut pas la peine. Au finish, si le croissant lunaire apparaît à date annoncée, ils en tirent une fierté légitime et gagnent un point de crédibilité devant l’opinion publique. Et si le contraire arrivait, ils sortiront d’autres arguments pour expliquer l’absence du croissant lunaire au rendez-vous escompté.
Ce travail de qualité si important de l’association des astronomes du Sénégal sur l’apparition du croissant lunaire aurait beaucoup plus de sens à tout point de vue s’ils communiquaient leurs informations à la commission nationale de l’observation du croissant lunaire en s’abstenant de toute forme de publicité sur ces informations en faveur de leur entité. Car ce qui est certain, la possession de ces informations n’empêchera point la communauté musulmane sénégalaise d’observer le croissant lunaire.
Mais si l’association des astronomes du Sénégal cherche autre chose à travers son travail sur l’apparition du croissant lunaire que d’aider la communauté musulmane par le truchement de la commission nationale de concertation sur le croissant lunaire, elle peut toujours continuer de faire ses annonces médiatiques sur les dates de début et de fin de nos évènements religieux (korité ou tabaski ou tamxarit) jusqu’au jour où on leurs dira,sans nul doute d’arrêter d’user de la religion pour bâtir leur popularité.
Vive le Sénégal !
Vive la république !
Par Baba Gallé DIALLO
Email : babadedianaàgmail.com