« Ceux qui ont un génie assez étendu pour pouvoir donner des lois à leur nation…., doivent faire de certaines attentions sur la manière de les former.
Le style en doit être concis Il est essentiel que les paroles des lois réveillent chez tous les hommes les mêmes idées » (Montesquieu, « De l’Esprit des lois », Livre XXIX, Chapitre XVI : « Choses à observer dans la composition des lois »)
« Quand les lois sont obscures, les juges se trouvent naturellement au-dessus d’elles, en les interprétant comme ils veulent » (« Pensées inédites de Rivarol sur la souveraineté du peuple et la philosophie moderne », p. 13)
L’on se souvient de la polémique qui s’était ouverte sur l’avis du Conseil constitutionnel concernant le référendum organisé en février 2016 dans le cadre de l’article 51 de la Constitution.
Aujourd’hui, une controverse s’est installée à propos du début et de la fin du mandat du président de l’OFNAC qui, faut-il le rappeler, doit ses fonctions à la confiance placée en lui par le Président de la République.
La pluralité d’interprétation des textes n’aurait pas dû exister, si les exposés des motifs et les textes des lois avaient été bien rédigés et, surtout, si le législateur sénégalais s’était intéressé à la forme rédactionnelle et au contenu de chaque article de loi, tout en exigeant de ses commissions compétentes des travaux préparatoires sur les projets de loi soumis au vote des députés.
Il est suggéré :
Au niveau du Gouvernement
1) d’utiliser la compétence consultative de la Cour suprême prévue par la loi organique du 8 août 2008 sur la Cour suprême :
a) l’article 29 alinéa premier de la loi organique précitée dispose que « la Cour suprême, réunie en assemblée générale consultative, donne au Gouvernement un avis motivé sur les projets de lois et projets de décret soumis à son examen » ; pour rappel, avant l’alternance politique de 2000, les projets de loi étaient soumis de manière presque systématique à l’avis du Conseil d’État de l’époque, avant qu’ils ne soient examinés par le Gouvernement en Conseil des ministres, puis par le Parlement. Il en était de même pour les décrets d’application des lois avant leur examen en Conseil des ministres ;
b) en vertu de l’alinéa 2 de l’article 29 de la même loi organique, «… la Cour suprême donne un avis motivé sur la légalité des dispositions sur lesquelles elle est consultée… » ;
c) en application de l’alinéa 3 du même article 29, « la Cour suprême …. donne également son avis au Président de la République … chaque fois qu’elle est consultée sur les difficultés apparues en matière administrative ».
2) de hiérarchiser les décrets en distinguant dans les textes de loi les décrets simples des décrets à édicter après avis de la Cour suprême et les décrets à délibérer en Conseil des ministres (ces derniers décrets pouvant, par ailleurs, être des décrets à prendre après avis de la Cour suprême) ; au cas où aucun texte ne prévoit la consultation de la Cour suprême, rien ne s’oppose à ce que le Gouvernement et la Cour suprême s’entendent pour inclure un décret parmi ceux à soumettre à la Cour, dès lors que la nature ou l’importance de ce décret le justifie.
Au niveau de l’Assemblée nationale
1) de recourir au droit d’amendement, le cas échéant :
les députés ont un rôle à jouer dans l’amélioration de la qualité de la loi. Il ne doit pas être perdu de vue que l’exercice du droit d’amendement des députés peut conduire à rendre les textes de loi plus clairs ; en effet, l’amendement entraine une suppression, une nouvelle formulation, un remplacement ou l’introduction d’articles additionnels ;
2) de réorganiser le travail législatif en instaurant des travaux préparatoires pour chaque projet de loi :
le travail parlementaire au sein des commissions de l’Assemblée nationale doit être réorganisé ; afin de limiter, dans certains cas, les difficultés d’interprétation de la loi, il doit exister des travaux préparatoires de la commission permanente compétente sur lesquels on s’appuie quand le sens de certaines dispositions législatives n’est pas clair ; l’intérêt de ces travaux préparatoires est également d’aider le juge à mieux « interpréter » les dispositions législatives ambiguës ou obscures.
En résumé, le Gouvernement et l’Assemblée nationale ont le devoir de tout mettre en œuvre pour éviter une dégradation de la loi.Mamadou Abdoulaye SOW Inspecteur principal du Trésor à la retraite, Ancien Directeur général de la Comptabilité publique et du Trésor,Ancien ministre.Courriel : mamabdousow@yahoo.fr