Cher Président Sortant
Vous venez de boucler le 7ème exercice de votre magistère à la tête du Sénégal et sollicitez le renouvellement de votre mandat pour les cinq prochaines années.
En tant qu’observateur neutre de la scène politique sénégalaise, quoi de plus légitime que d’étudier votre demande de renouvellement du bail de façon objective.
Monsieur le Président
De prime abord, nous nous permettons de vous rappeler quelques points saillants des engagements que vous aviez pris au soir de votre élection à la tête du Sénégal le 25 mars 2012 :
- « Je m’engage à réduire mon mandat de sept à cinq ans et de le bloquer sur 02 ;
- Je ne protégerai personne. Toute personne impliquée dans une quelconque affaire devra répondre de ses actes devant la Justice ;
- Le gouvernement ne dépassera pas 25 ministres et je supprimerai toutes les institutions et agences inutiles pour réduire le train de vie de l’Etat ;
- Je m’engage à une gestion sobre et vertueuse des deniers publics dans la plus grande transparence ;
- Je m’engage à privilégier la patrie avant le parti dans toutes les décisions à prendre ;
- Je m’engage à assurer des meilleures conditions de vie aux populations avec comme priorité le soulagement du panier de la ménagère ;
- Je m’engage à assurer aux jeunes 500 000 emplois par an ;
- Je m’engage à poursuivre les chantiers lancés par mon prédécesseur et à entreprendre l’édification d’infrastructures de dernières générations pour le Sénégal ;
- Je m’engage à veiller à la sécurité des personnes et des biens tout en combattant l’injustice dans le pays ;
- Je ne mêlerai pas ma famille dans la gestion des affaires publiques ; »
Monsieur le Président,
Force est de reconnaitre que votre élection à la tête du Sénégal a coïncidé avec une décision de la majorité des sénégalais de combattre l’injustice résultant de la validation par le Conseil Constitutionnel de la 3ème candidature du Président Abdoulaye WADE et pour laquelle des manifestations préélectorales ont causé la mort de 12 de nos concitoyens(Paix à leurs âmes).
C’est votre mérite d’être le bénéficiaire de ce qu’on peut appeler un« référendum » contre le Président Abdoulaye WADE sur la liste de ses 13 adversaires de 2012.
Monsieur le Président,
Une analyse objective de votre bilan nous impose de passer en revue son actif et son passif
- A l’actif de votre bilan, on ne peut que s’en réjouir de relever que :
- Le taux de croissance économique du Sénégal est passé de 3,5% en 2012 à 6,8% en 2018 ;
- Plusieurs infrastructures de qualité ont été achevées ou construites sous votre magistère : AIBD, MUSEE DES CIVILISATIONS NOIRES, PÔLE URBAIN DE DIAMNIADIO (avec notamment CICAD, DAKAR ARENA, GARE DES GROS PORTEURS et autres …..), ARENE NATIONALE, ILA TOUBA, AUTOROUTE DIAMNIADIO-AIBD-MBOUR, PROLONGEMENT DE LA VDN, LOGEMENT DES ÉTUDIANTS, TER, PONT DE FARAFÉGNÉ….
- Beaucoup de programmes ont été mis en œuvre pour améliorer les conditions de vie des populations notamment la DER, le PUDC, LE PUMA, PROMOVILLES, LA CMU, LE PROGRAMME DE MODERNISATION DE CITÉS RELIGIEUSES, LE PRODAC, les ENO…
- Le séjour au Sénégal des plusieurs Chefs d’Etats, de Gouvernement ou de Royaumes durant votre magistère (USA, ALLEMAGNE, FRANCE, CHINE, QATAR, TURQUIE, MAROC…)
- L’arrêt des coupures intempestives d’électricité ;
- La création et le démarrage des activités de la compagnie AIR SENEGAL SA ;
- La création de l’OFNAC pour lutter contre la corruption ;
- La diminution de plusieurs denrées de première nécessité ;
- Les avancées significatives en termes de production agricole notamment le riz, l’arachide, les fruits et légumes ;
- La suppression du Sénat et de plusieurs agences qui ne servaient qu’à caser un personnel politique ;
Nonobstant le fait que l’actif de votre bilan soit reluisant, le passif n’en est pas moins lourd ;
- Au passif de votre bilan
Monsieur le Président,
Votre magistère a été marqué par :
- Le non-respect de votre engagement de réduire la durée de votre mandat de 7 à 5 ans. L’artifice de l’avis du Conseil Constitutionnel a été usitée uniquement pour « mackyiller » le reniement de votre promesse. La raison de votre revirement est toute simple : vous n’aviez pas de bilan à présenter aux sénégalais en 2017. La valse d’inauguration d’infrastructures entre décembre 2018 et janvier 2019 en est une parfaite illustration ;
- Le fait que le Sénégal, qui fait partie des 30 pays les plus pauvres du monde, compte 84 ministres sans compter les postes de conseillers ou d’envoyé spécial du Président ;
- Malgré la création de l’OFNAC, la corruption au Sénégal a atteint des proportions jamais égalées ;
- Le taux de chômage des jeunes a connu une hausse passant de 12,7% en 2011 à 15,7% en 2017 (chiffres disponibles sur le site de l’ANSD) ;
- Des scandales judiciaires dont les 03 plus marquants sont les affaires Imam Alioune NDAO, Khalifa SALL et Karim WADE. C’est sous votre magistère qu’on a emprisonné un enseignant et érudit de l’Islam, le traitant de terroriste, le transférant dans toutes les prisons du Sénégal, le maltraitant pendant près de 03 ans pour finalement l’acquitter en le déclarant innocent.
En ce qui concerne l’affaire Karim WADE, sans entrer dans les considérations purement politiques, nous avons suivi le Procureur près de la CREI d’alors brandir une liste de 25 personnalités de l’ancien régime devant faire l’objet d’enquête pour le compte du peuple sénégalais. Le respect des concitoyens, dont leurs impôts et taxes ont permis de financer tous les frais de procédure de la CREI, ainsi que le parallélisme des formes auraient voulu que votre régime fasse le bilan des fonds recouvrés par le biais de la CREI. Outre Karim WADE, seul Tahïbou NDIAYE a été inquiété. Qu’en est-il des 23 autres dossiers ? Qu’est devenue la CREI ?
Pire encore, la première personne physique sénégalaise à être condamnée à payer à l’Etat du Sénégal la somme de 138 milliards de francs CFA a été graciée et tard dans la nuit,il a été escorté pour sortir du pays à 2h du matin.
Monsieur le Président, vous dites sur la chaine française France 24 que si Karim WADE rentre au Sénégal, il va retourner en prison en vertu d’une éventuelle procédure de contrainte par corps.
Autrement dit, tant qu’il reste à l’étranger vous lui dispensez le paiement des 138 milliards qu’il doit au peuple sénégalais.
Monsieur le Président, les sénégalais sont unanimement d’accord pour sanctionner toute personne reconnue coupable de malversations dans la gestion des deniers publics. Néanmoins, toute personne de bonne foi reconnaitra que Khalifa Ababacar SALL ne serait jamais inquiété s’il avait accepté de travailler pour votre réélection.
N’est-ce pas là une preuve parfaite de la manipulation de la justice ?
- La mise sous le coude des rapports de l’OFNAC, de l’IGE, de l’IGF épinglant des hauts responsables de votre parti au COUD, au PRODAC et à la POSTEentravant leur transmission au procureur à des fins de poursuites. Paradoxalement, c’est un rapport de l’IGE qui a constitué le commencement de preuve ayant entrainé l’emprisonnement de Khalifa Ababacar SALL.
- La politisation des postes de direction des grandes sociétés ou agences nationales (ARTP, COSEC, PORT, COUD, AEROPORT, IPRES, POSTE, IMPÔTS, CDC, PRODAC, ANPEJ, DER, PROMOVILLES, PUMA, ONAS, CDP, ANAMO, FONGIP, FONSIS…)
- La création d’institutions comme le Conseil Economique Social et Environnemental, le Haut Conseil des Collectivités Territoriales et le Haut Conseil du Dialogue Social ainsi que plusieurs agences budgétivores et qui ne sont nullementindispensables à l’accomplissement de la mission qui vous est confiée ;
- Le manque de transparence dans la gestion de plusieurs dossiers publics PETRO-TIM, ARCELOR MITTAL, NECOTRANS, CONTRATS D’EXPLOITATION DU PETROLE ET DU GAZ AVEC TOTAL, BICTOGO…
- L’apologie de la transhumance couronnée par une amnistie intégrale de toutes les fautes commises par ceux qui vous rejoignent ;
- Les membres de votre famille qui étaient inconnus du grand public avant votre élection de 2012 sont subitement devenus des personnalités hyper-puissantes de ce pays.
Monsieur le Président,
Nous ne vous pardonnerons jamais votre participation à la marche de Paris du 11 janvier 2015 contre les attaques de Charlie Hebdo. Par votre présence aux côtés du Président François HOLLANDE à cette honteuse manifestation, vous transmettiez le message consistant à montrer à la face du monde que le Sénégal rendait hommage à ceux qui ont fait de la carricature de notre illustre Prophète Mohamed (sws) leur fonds de commerce. Ce qui est totalement erroné.
A la lumière de tout ce qui précède, il appartient àtous les sénégalais de prendre leur entière responsabilité dans ce tournant décisif de la vie de notre cher pays.
Que le meilleur gagne pour que vive le Sénégal !
Ababacar SY DIAGNE
Juriste