En République démocratique du Congo (RDC), l’activiste Luc Nkulula, membre du mouvement de la Lutte pour le changement (Lucha), est mort à Goma dans la nuit de samedi à ce dimanche 10 juin dans l’incendie de sa maison. L’origine de l’incendie n’est pas encore connue. Les activistes n’écartent pas la piste criminelle.
Ce jour-là, Luc Nkulula avait passé, comme souvent, la plus grande partie de sa journée à former des jeunes – 87 jeunes issus de 14 quartiers de Goma – à l’engagement citoyen de proximité, dans le cadre du Chemin de la paix, l’initiative du célèbre docteur Mukwege.
Le jeune homme vivait dans une concession clôturée à Himbi avec un membre de famille. Ce dernier a affirmé ne pas être couché quand l’incendie a pris. Selon les témoignages recueillis par RFI, ce parent dit être sorti par la porte arrière de la maison pour se rendre aux toilettes qui se trouvent à l’extérieur, dans le jardin.
Quand il revient quelques minutes plus tard, la maison est déjà en flammes, il n’arrive pas à rentrer et prévient, par la fenêtre, Luc Nkulula qui était dans sa chambre. Le jeune homme ne peut déjà pas sortir par le salon, l’incendie, trop violent, l’en empêche.
Il cherche à faire sauter les barreaux de sa fenêtre, parvient tout juste à faire passer au travers des documents, son ordinateur, avant que la maison ne s’écroule sur lui aux environs de 00h15. C’est le moment où la plupart des voisins réalisent qu’un incendie est en cours.
L’un d’eux, un personnel de la Monusco, prévient les pompiers onusiens qui arrivent peu avant une heure du matin. Mais il est déjà trop tard et ils ne peuvent que constater les dégâts et éteindre l’incendie, sans être en mesure sur le coup de déterminer son origine.
La Lucha pleure une de ses grandes figures
Luc Nkulula, 33 ans, licencié en droit de l’université de Goma, était un activiste pro-démocratie très engagé. Esprit rebelle, combatif, plusieurs fois arrêté… Il avait notamment été le principal porte-parole du mouvement lors de la rencontre, à Goma, avec le chef de l’Etat, Joseph Kabila, en août 2016.
« Luc, c’est pour nous un héros qui avait du courage, qui avait de la passion pour la nation. Il était toujours indigné de voir comment les gens étaient tués à Béni, comment les gens étaient tués sur toute l’étendue du territoire de la RDC. Depuis 2012, il a toujours été là au premier front, dans les marches que nous avons menées contre le pouvoir de Kabila. Pour lui, l’alternance était l’un de ses grands combats. Il voulait un pays où un jour il y aurait plus de démocratie, avec des valeurs qui respecteraient la dignité et la justice sociale », témoigne Ghislain Muhiwa, membre de la Lucha à Goma.
« Luc représente l’incarnation d’un courage, d’un engagement sincère et crédible, estime Bienvenu Matumo, l’un des piliers du mouvement que Luc Nkulula avait recruté. Luc a été parmi ses pionniers de Lucha qui ont construit ce mouvement, qui l’ont bâti sur des valeurs, sur des principes. Luc est de ces jeunes qui croient au changement, à l’alternance politique au Congo. Il est parmi ceux qui militent au premier rang pour qu’on ait véritablement de bonnes élections au Congo. »
Bienvenu Matumo se dit sous « le choc » mais compte bien poursuivre la lutte en mémoire de son camarade. « La seule façon de l’honorer, c’est de continuer ce combat, continuer à rêver comme il le faisait pour que le Congo de demain soit plus fort. Je ne suis désolé que Luc ne puisse pas vivre dans le Congo pour lequel il s’est battu, pour lequel il a dépensé toute son énergie. Mais nous qui sommes encore vivants, on va continuer à l’honorer pour que nos fils puissent vivre dans ce Congo nouveau que Luc espérait. »
Des interrogations
C’est la tristesse qui domine dans les rangs du mouvement, depuis ce samedi matin. Tristesse, mais aussi beaucoup de questions.
Les origines de cet incendie ne sont pas encore connues, mais au regard des éléments factuels disponibles les activistes n’écartent pas la piste criminelle. Il n’y avait pas d’électricité au moment des faits ni de gazinière allumée.
En tout cas, le gouverneur de Nord-Kivu, Julien Paluku, a déclaré à RFI avoir demandé à la police l’ouverture d’une enquête. Origine criminelle ou accidentelle, il a rappelé que les incendies sont fréquents dans cette partie de la ville où les maisons sont principalement en bois.
Rfi.fr