A l’issue du sommet historique entre les dirigeants nord et sud-coréen, Kim Jong-un et Moon Jae-in ont annoncé qu’ils souhaitaient signer un traité de paix d’ici la fin de l’année pour mettre formellement fin à la guerre. Ils ont aussi proclamé leur volonté de dénucléariser la péninsule, mais sans accompagner cet engagement de mesures concrètes de démantèlement ou d’un quelconque calendrier. Comment ces images étonnantes de sourires, de bavardages main dans la main, ont-elles été reçues ?
« C’est une véritable personne ! », s’extasie ainsi une trentenaire citée par le quotidien Korea Herald. Elle ajoute : « C’est rafraîchissant de le voir parler de nouilles froides, plutôt que d’armes nucléaires ou de guerre. » « Il semble amical », « il a le sens de l’humour », « on dirait un nounours »… les réactions recueillies par l’agence AP sont révélatrices.
En faisant oublier qu’il dirige l’un des régimes les plus répressifs de la planète, Kim Jong-un réussit ainsi une spectaculaire opération de communication. Mais ça, c’est pour la perception du public. Ce samedi 28 avril 2018, la presse sud-coréenne prend davantage de recul, même si elle salue l’aspect historique de la rencontre.
Alors que le journal Joongang montre en Une, sur toute la page, sans un seul titre, cette photo incroyable des deux dirigeants traversant la frontière main dans la main, la plupart des quotidiens rappellent que l’accord de vendredi n’est qu’un premier pas et qu’il reste à voir si le dirigeant nord-coréen est « sincère » dans ses engagements, notamment de dénucléarisation.
« Continuer sur sa lancée au lieu d’être trop obéissant vis-à-vis de Washington »
La Chine aussi, a applaudi la détermination et le courage du leader nord-coréen et du président sud-coréen, explique notre correspondante Heike Schmidt. La porte-parole du ministère des Affaires étrangères Hua Chunying a cité un poème du célèbre écrivain Lu Xun : « Après toutes les vicissitudes traversées, nous restons des frères. Lorsqu’on se revoit, un sourire chasse la rancune. »
La presse officielle, tout aussi élogieuse, parle d’un « sommet brise-glace » : « Le résultat montre la détermination des deux côtés d’écrire un nouveau chapitre de l’histoire », s’exclame l’agence Chine nouvelle. Mais Pékin, allié traditionnel de Pyongyang, et longtemps accusé de ne pas en faire assez pour raisonner Kim, ne compte pas pour autant se laisser écarter dans le jeu politique.
La République populaire de Chine n’est pas pour rien dans ce rapprochement, estime en effet l’éditorialiste de Chine nouvelle. « Pendant des décennies, la Chine – partie prenante dans les affaires de la péninsule – a travaillé dur pour jouer son rôle de pivot en contribuant à une paix durable », rappelle-t-il.
Le Global Times remarque que les résultats du sommet restent « fragiles, parce qu’un autre acteur de poids, le président américain Donald Trump, doit encore faire son entrée sur scène ». Suite à la promesse de Pyongyang d’en finir avec ses essais nucléaires, il serait temps maintenant pour Washington de cesser ses exercices militaires dans la région.
Le quotidien Global Times, porte-voix du Parti communiste chinois, donne ce conseil à la Corée du Sud du président Moon Jae-in : « Séoul devrait continuer sur sa lancée au lieu d’être trop obéissant vis-à-vis de Washington. »
→ Écouter sur RFI : Le sommet inter-coréen, une percée diplomatique ?
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