Le Séminaire portant sur le nouveau Code de la presse, dont les rideaux viennent de tomber à saly, est riche en enseignements et en décisions.
Pour vous aider à avoir un aperçu sur les décisions-phares issues du Projet de texte qu’un Comité restreint, composé des brillants membres du Comité scientifique et des Organisations professionnelles de la presse devra peaufiner, prochainement, Actusen.com vous livre les quelques morceaux du très séduisant Rapport produit et lu devant les médias par le brillant juriste Bouna Manel Fall.
Lesquels morceaux vont de la teneur des différentes plénières aux sanctions contenues dans le Projet de Code 2016, à compléter par des amendements et à présenter aux députés, dans un avenir proche.
Plénière sur « la méthodologie, les enjeux et le contexte de la Réforme »
La plénière portant sur « la méthodologie, les enjeux et le contexte de la Réforme » a été présidée par l’ancien ministre Bacar Dia et a été animée par le très brillantissime magistrat Bamba Niang, par ailleurs Président du Comité scientifique. Et à la simple évocation du nom de ce juriste, tous les acteurs de la presse conviennent du fait que si l’on est arrivé à ce document-là, c’est parce que Bamba Niang a abattu un travail de titan, depuis des années. Et n’a jamais rompu, quand il s’est souvent agi de blocages dans les travaux liés au Projet de Code.
« Au cours de la première plénière qui a suivi la cérémonie d’ouverture, la présentation portant sur « la méthodologie, les enjeux et le contexte de la Réforme », Monsieur Mouhamadou Bamba Niang, Magistrat, président du Comité scientifique, est revenu sur le parcours et les péripéties qui ont jalonné l’évolution du projet de code, objet de la présente rencontre.
Il a également rappelé le substrat juridique à l’origine de la réforme, au travers notamment de la déclaration de Windhoek de 1991 relative à une presse africaine indépendante et pluraliste », a rappelé le Rapporteur Bouna Manel Fall, dont la qualité du travail a été particulièrement saluée par tous les participants.
L’insuffisance de la loi 96-04du 22 février 1996 portant sur la profession de journaliste et de technicien de la communication sociale a été, selon lui, l’élément déclencheur de la pré-concertation sur la réforme du cadre juridique de la presse au Sénégal. C’est ainsi qu’au terme de ces concertations un projet de code a été rédigé en 2010.
Monsieur Niang a souligné que le travail fait en amont du séminaire, s’est réalisé « pied au plancher » et que la présentation du draft devra être suivie de corrections par les participants avant la présentation finale du texte, débarrassé de ses scories.
Outre Mouhamadou Bamba Niang, pourquoi cet autre membre du Comité scientifique a marqué les esprits
Outre Bamba Niang, le Comité scientifique compte, également, un éminent Professeur aux états de services irréprochables, selon tous les participants. Il s’agit du Professeur Mamadou Niane, Agrégé des Facultés de Droits. Brillant esprit, l’universitaire a axé son exposé sur les Dispositions générales, le Statut de l’Entreprise de Presse, le Financement de la Presse, ainsi que le Statut du journaliste.
En introduisant la présentation, le Professeur Mamoudou NIANE a tenu à insister sur le fait que son intervention serait axée essentiellement sur les innovations et changements apportés par rapport à la version précédente du projet de code de la presse.
A ce titre, il a mis l’accent sur deux innovations majeures, notamment :
- le Modèle économique des entreprises de presse et le financement,
- le Droit de réponse et de rectification.
Première innovation :
Concernant le modèle économique actuel des entreprises de presse, M. Niane a fait remarquer que ce dernier ne garantit pas leur viabilité.
A titre d’exemple, il a évoqué d’une part, le cas de la presse écrite qui est fortement concurrencée par la presse en ligne, et d’autre part, le cas des entreprises publiques et privées qui partagent un marché publicitaire dont les ressources sont limitées.
A cet égard, la politique de financement est axée sur un principe et sur une méthode:
- Le principe est celle de la libre détermination du modèle économique ;
- La méthode porte quant à elle sur les modalités relatives aux recettes publicitaires, au parrainage, à l’abonnement, et aux subventions ;
Quant à l’aide à la presse :
- Le principe repose sur la mise en place du Fonds d’appui et de développement de la presse ;
- La méthode porte quant à elle sur l’éligibilité et les modalités d’aide (fiscalité, distribution et modernisation)
Concernant précisément l’aide à la presse, elle ne sera plus octroyée dans les conditions actuelles, mais plutôt suivant de nouvelles modalités, notamment :
- D’abord, une partie fixe attribuée à tous les bénéficiaires,
- Ensuite, une partie destinée à appuyer les projets innovants,
- Enfin, un mécanisme de garantie.
Pour les détails relatifs aux modalités, il a été retenu qu’ils seront fixés dans la partie règlementaire.
Quant aux innovations en matière de financement, elles portent sur :
- les subventions directes de l’Etat,
- l’autofinancement,
- la publicité réaménagée,
- les redevances,
- la fiscalité allégée,
- l’aide au portage,
- le crédit d’impôt.
Deuxième Innovation :
Pour le Droit de réponse et de rectification, le code comporte une nouvelle disposition visant la diligence dans la réponse et la rectification.
La finalisation de la nouvelle orientation normative est articulée à :
- L’adoption du Code de la presse;
- La mise en place des textes d’application (Décrets et Arrêtés);
- La Réforme de la Loi sur la publicité;
- Le Plaidoyer pour l’appropriation du Code par tous;
- La mise en place des structures prévues par le Code.
Quand le texte sera adopté, désormais, qui est journaliste et qui ne le sera plus?
Présidée par Bacary Domingo MANE, Président du CORED, la plénière sur « Statut du journaliste » a été animée par Mouhamadou Bamba NIANG, Magistrat, Président du Comité Scientifique
Dans sa présentation, souligne le Rapport du juriste Bouna Manel Fall, le Président du Comité scientifique a énoncé les principes directeurs à savoir la définition du statut du journaliste suivant la formation ou l’assimilation, à compléter par la loi sur l’accès à l’information qui a d’ailleurs connu une avancée significative dans son processus d’élaboration, voire d’adoption ; la transparence et honnêteté dans l’exercice du métier ; le respect de la vie privée, de la diversité et de la cohésion sociale ; l’indépendance du professionnel de l’information ; l’interdiction de faire de la publicité et la distinction entre espace éditorial et espace commercial
Quant la plénière axée sur la presse en ligne et présentée par Ibrahima Lissa Faye, elle a été présentée l’éminent Professeur Mamoudou Niane. Morceaux choisis de cette présentation, articulée autour des innovations apportées et des constantes maintenues dans le projet de code :
Les innovations ont porté sur :
- Au niveau de la forme, sur la Réduction quantitative des articles
- Dans le fond, sur la définition par l’article 150 du service de presse en ligne
Les constantes quant à elles ont porté :
- Dans la forme, sur la constitution sous forme d’entreprise de presse, l’édition à titre professionnel et l’intervention de journalistes professionnels.
- Dans le fond, elles ont porté sur le contenu multimédia interactif renouvelé, et régulièrement daté, la finalité s’appuyant sur l’intérêt général et la conformité avec l’ordre public, ainsi que la non prise en compte des sites internet et blogs personnels.
Dans les principes innovants il y a eu allégement du texte initial par la suppression de la responsabilité du Directeur de publication, la rationalisation des obligations et l’introduction d’une sanction nouvelle : la déchéance.
Dans les contenus innovants, il y a l’obligation de modération, d’identification des éditeurs de la presse en ligne, de conservation des données.
De même les contenus innovants prennent en charge le droit de rectification et de réponse en ligne et l’exclusion du bénéfice des avantages liés au statut d’entreprise de presse.
Suite à la présentation du Pr Niane, le président de l’APPEL a tenu à rappeler que l’organisation professionnelle a élaboré des contributions qui constituent du grain à moudre pour le comité de rédaction finale du projet de code de la presse.
Les intervenants ont mis l’accent sur le problème de l’anonymat des articles de la presse en ligne, la nécessité d’ouvrir la possibilité de contrôle à priori des contenus injurieux par les responsables de sites, de trouver une solution à la reprise in extenso et sans autorisation des articles de la presse écrite par la presse en ligne et des contenus audiovisuels, à travers le respect des droits d’auteurs.
Les intervenants ont préconisé le renforcement de l’arsenal répressif en vue de garantir l’obligation de modération à priori sur les forums des sites, obligation qui incombe aux responsables d’organes de presse en ligne. Ils ont aussi, proposé de rétablir l’immédiateté du droit de rectification,
Secteur de l’audiovisuel, de son financement et de son statut
Quid du Secteur audiovisuel, de son financement et de son statut? Il a été présidé par Mamadou Diop Decroix et présenté par le magistrat Mouhamadou Bamba Niang. Cette partie a fait l’objet d’une réécriture entièrement nouvelle à l’aune de l’avènement de la Télévision numérique terrestre (TNT). A cet égard, le cadre général et les rapports entre les acteurs ont été définis suivants les principes suivants :
- Définition statut et détermination des obligations qui pèsent sur les acteurs de la chaine audiovisuelle,
- Séparation des statuts des acteurs de la chaine de valeur,
- Détermination de nouveaux modes de distribution des ressources radioélectriques,
- Instauration d’un dispositif de protection des publics sensibles,
- Procédure d’octroi de la licence à compléter par les cahiers des charges,
- Pour les distributeurs de services (satellite ou télévision mobile personnelle),
- Pour les producteurs, respect du droit d’auteur et droits voisins
- Prise de participation dans l’actionnariat du service audiovisuel à hauteur de 51% par les nationaux
- Exclusion de la concentration,
- organisation de la règlementation sur la publicité,
- doter les entreprises du secteur public d’un financement stable et conséquent », précise le Rapport.
La plénière portant sur les Sanctions présentée par le Professeur Mamoudou Niane a été axée autour de deux points : l’option du Projet de Code de 2010 et celle du Code de 2016.
L’exemple de la diffamation a permis d’évoquer la nécessité :
Pour le dernier point, il a été prôné la restauration des peines privatives de liberté pour les infractions commises par la voie des moyens de diffusion publique.
A ce titre, les innovations ont porté sur :
- l’instauration de sanctions administratives spécifiques telles que la saisie, la suspension ou la fermeture des organes de presse traditionnels, et le blocage des contenus manifestement illicites pour la presse en ligne
- la consécration de la responsabilité des personnes morales en matière d’infraction commises par la voie des moyens de diffusion publique.Quant aux constantes, il a été question de :
la reprise des infractions spécifiques à l’audiovisuel (exploitation sans licence, fabrication ou importation de matériels non homologués, violation de droits exclusifs…),
- la responsabilité en cascade,
- le renvoi au code de procédure pénale pour le régime procédural des infractions de presse.
Après la présentation, plusieurs intervenants se sont prononcés sur les points suivants :
- Contrariété entre le projet de code et la loi de 2008 en ce qui concerne la sanction de la violation des droits d’auteurs et droits voisins,
- La condamnation systématique au niveau des cours et tribunaux du Sénégal des journalistes en dépit du fait qu’ils apportent la vérité des faits allégués,
- Insécurité juridique relative aux circonstances exceptionnelles qui permettent de déclencher des actions répressives à priori et risques de dérives futures comme la fermeture d’organes de presse », fait noter le Rapport.