La Turquie commémore, ce samedi 15 juillet 2017, le coup d’Etat manqué contre le président Recep Tayyip Erdogan il y a un an. Un événement qui a entraîné des purges massives dans le pays, et bouleversé le quotidien de la Turquie. On apprenait vendredi soir que plus de 7.000 policiers, soldats et membres de ministères avaient été limogés en Turquie, en cette veille des commémorations du putsch manqué du 15 juillet 2016. A Ankara, il n’y a désormais plus qu’un maître: Tayyip Errdogan.
Depuis un an, la Turquie est une société en état de choc. Cette tentative ratée de coup d’Etat a été très massivement dénoncée au sein du pays, y compris d’ailleurs par les opposants à Recep Tayyip Erdogan. C’est une société également marquée par les purges et les arrestations qui se poursuivent. Vendredi soir encore, plusieurs milliers de fonctionnaires ont été limogés.
On parle depuis un an de plus de 50 000 personnes emprisonnées, 100 000 fonctionnaires licenciés, 170 000 procédures judiciaires ouvertes. Enfin, c’est une société encore plus polarisée qu’auparavant, explique notre correspondant à Istanbul, Alexandre Billette. Car le référendum remporté de justesse par le président en avril dernier a débouché sur la présidentialisation du régime.
« Le gouvernement a mis en place un régime de contre-coup d’Etat »
Recep Tayyip Erdogan contrôle désormais tous les leviers. Installé aux Etats-Unis, son ancien allié devenu ennemi, le prédicateur musulman Fethullah Gülen, est hors-jeu. Avec les purges, c’est également l’opposition pro-kurde, notamment du parti HDP, qui a été décimée. L’autre parti d’opposition, le CHP, compte lui aussi un député en prison. Depuis un an, les contre-pouvoirs à la présidence ont disparu. Ils ont été affaiblis ou éliminés les uns après les autres.
De quoi donner au chef de l’Etat une énorme marge de manœuvre et un contrôle maintenant quasi total sur la vie politique du pays. Pour le politologue Ameth Insel, qui enseignait à l’université Galatasaray et qui est aujourd’hui chroniqueur au journal Cumhurriet, « on peut considérer qu’à partir de la mise en place de l’état d’urgence, le gouvernement a mis en place un régime de contre-coup d’Etat ».
Turquie, « une sorte d’autocratie de plus en plus despotique » ?
Selon le chercheur, le président a profité de la légitimité de l’état d’exception pour « étouffer toutes les libertés démocratiques en Turquie, incarcérer toutes les personnes qui d’une manière ou d’une autre le gênent, y compris des députés ». « C’est une fuite en avant, parce que nous ne savons pas comment le gouvernement peut s’arrêter désormais. »
« On ne sait pas comment le gouvernement pourrait passer à une situation normale, parce qu’il y aura une explosion de demandes de justice. Actuellement, toutes ces décisions ne peuvent pas être contestées devant les tribunaux. Du coup, le gouvernement, et Tayyip Erdogan en tête, est dans une sorte d’autocratie de plus en plus despotique », conclut Ameth Insel.