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Affaire des 6 policiers brûlés vifs lors de la manifestation du 16 février 1994 : énième dossier sans coupable

Cela fait 29 ans aujourd’hui que 6 policiers furent tués lors d’une manifestation autorisée aux Allées du Centenaire. 29 ans que leurs familles pleurent leur mort alors que personne n’a jamais été condamné pour ces crimes. En effet, les seules personnes qui ont été arrêtées dans ce dossier ont été élargies quelque temps après. Révélations sur les circonstances atroces dans lesquelles les six flics ont été lâchement assassinés.

Des membres de la Société civile et certains acteurs politiques ne cessent de réclamer justice pour les 14 victimes des manifestations de février-mars 2021, et pour cause. Deux ans se sont écoulés mais aucune arrestation n’a été notée. Mais force est de reconnaître que ce ne sont pas seulement ces 14 morts qui sont restées, jusque-là, impunies. Les victimes des événements du 16 février 1994, aussi, n’ont jamais obtenu justice. Ce jour-là, 6 policiers à bord de leur véhicule de sécurisation ont été brûlés vifs par des individus lors de la manifestation autorisée du 16 février 1994. Un dispositif a été mis en place comme c’est le cas dans toutes les manifestations, autorisées ou non autorisées, et un groupe est installé dans un véhicule comme réserve pour les cas de débordements, selon certaines sources.

« Les manifestations commencèrent dans la banlieue où des échauffourées avaient éclaté entre, d’une part, des militants de l’opposition, du Pds notamment, des membres de la dahira des Moustarchidines et des Moustarchidates et, d’autre part, les forces de l’ordre’’ 

Un témoin de cette période douloureuse dans l’histoire politique du Sénégal apporte des précisions : « En vérité, les manifestations commencèrent dans la banlieue où des échauffourées avaient éclaté entre, d’une part, des militants de l’opposition, du Pds notamment, des membres de la dahira des Moustarchidines et des Moustarchidates et, d’autre part, les forces de l’ordre. De violentes manifestations ont eu lieu en fin de journée et en début d’après-midi. Habib Sy du Pds fut arrêté dans ces conditions. » Notre interlocuteur poursuit : « Un meeting se tenait aux Allées du Centenaire, à Gibraltar précisément. Les figures de proue de l’opposition prenaient part à cette activité politique au lendemain des élections présidentielles et législatives gagnées par le candidat sortant du Parti socialiste, Abdou Diouf devant Me A. Wade ; le Parti socialiste remporta également les Législatives. L’opposition réunie autour du Pape du Sopi, Me Wade avait rejeté les résultats proclamés par la Commission nationale de recensement des votes et entérinés par la Cour Suprême dirigée le président Kéba Mbaye. C’est dans ce contexte que fut également assassiné Me Babacar Sèye, greffier de la Cour d’Appel. L’opposition mettant en œuvre sa stratégie d’unité d’action déroulait ses plans d’action installant le pays dans une situation très tendue.

Le meeting de ce 14 février s’inscrivait dans ce plan d’actions. Me A. Wade, Landing Savané , Abdoulaye Bathily, Amath Dansokho, Mouhamadou Bamba Ndiaye du MSU du patriarche Mamadou Dia figuraient en première ligne.  Les violences se sont étendues atteignant la capitale. Les forces de l’ordre, celles de la Police ont été mobilisées pour arrêter la déferlante, l’émeute qui progressait armée de coupe-coupes et de machettes. Le véhicule de police saccagé, après être tombé en panne. Au finish, les émeutiers ont eu raison de ses occupants.

Les 6 policiers étaient à bord de leur véhicule de sécurisation, quand celui-ci fut subitement tombé en panne de carburant

L’on peut se demander si c’est sur injonction ou avec l’assentiment de Me Abdoulaye Wade que les manifestants qui voulaient marcher sur le Palais ont attaqué les policiers. Ils sont nombreux à soutenir que ce sont les tenants du régime socialiste qui avaient développé cette thèse pour motiver l’arrestation de Wade, Dansokho, Savané, Bathily, Habib Sy. Pour ce dernier, on parle même d’une malheureuse confusion car, c’est ce patronyme qui a induit en erreur les flics qui l’avaient pris pour un membre de la Famille Sy qui porte le même nom.

«Vous voulez marcher, eh bien marchez», avait, en effet, dit Abdoulaye Wade au micro. Et comme des loups affamés, certains jeunes, qui avaient quitté la banlieue avaient ciblé directement des forces de défense et de sécurité. Et pourtant, ils étaient assis, les uns chapelets à la main, dans leur véhicule dans l’objectif de maintenir l’ordre parce qu’il n’y avait aucun débordement. Seulement ils seront tués par les manifestants en plein mois de Ramadan. Il s’agit de l’adjudant Moustapha Dieng, le lieutenant Mamadou Diop et les gardiens de la paix, Daouda Ndour, Abou Hann, Gorgui Seck et Ibrahima Faye. D’autres aussi ont été blessés : Boucar Diouf, Amadou Camara, Babacar Ndiaye, Mbaye Niang, Alioune Diallo.

Les défunts flics étaient assis, les uns chapelets à la main, dans leur véhicule dans l’objectif de maintenir l’ordre. Mais ils ont été lâchement assassinés

Malheureusement, 29 ans après, aucune décision de justice n’a été rendue dans cette affaire. Pire, personne n’a été jugé encore moins condamné. Les seules personnes qui ont été arrêtées ont été élargies : Me Abdoulaye Wade, chef du Parti démocratique sénégalais et Landing Savané, chef du Parti africain pour la démocratie et le socialisme, furent interpellés, le 18 février, en compagnie d’autres personnalités politiques. Certains responsables de cette manifestation avaient fui leur village ou leur ville, dès que la traque a commencé. D’autres ont quitté Dakar pour la Gambie. Ceux qui ont été arrêtés sont poursuivis pour atteinte à la sûreté de l’Etat mais il n’y a jamais eu de procès et ils ont été élargis quelques temps après. Il n’y a pas un seul coupable qui a été jugé ou condamné pour ces crimes. A la place, les autorités ont entamé un dialogue social pour rétablir le climat social.

Un policier tué à coup de briques dans la petite côte

Autre crime concernant un policier et qui n’a jamais fait l’objet d’un procès ou d’une condamnation, l’affaire du brigadier qui a été tué à coup de briques dans la petite côte par la population. Ce jour-là, des trafiquants qui l’ont reconnu l’ont présenté comme un voleur à la population. C’est dans ces conditions qu’il a subi la furie de la population avant de passer de vie à trépas.

Du côté des manifestants aussi, deux d’entre eux ont été tués. Et voulant éviter tout type de vengeance, les responsables de la police n’ont pas informé le renfort de la mort de leurs collègues. Ce n’est qu’une fois de retour à la base que tout le monde a été mis au courant.  En tout état de cause, il y eut mort de policiers et de manifestants civils.

Me Abdoulaye Wade, Landing Savané et Cie, arrêtés puis élargis sans jugement ; Habib Sy interpellé à cause d’une confusion de patronyme qui a induit en erreur les flics qui l’avaient pris pour un membre de la Famille Sy qui porte le même nom.

Quant aux leaders de l’opposition, ils furent arrêtés dans leurs domiciles respectifs et embastillés. Une longue grève de la faim fut entamée. Les partis de l’opposition et les toutes premières Organisations de la société civile ont commencé à réclamer la libération des détenus politiques. On peut retenir principalement l’engagement des universitaires tels Pr Babacar Diop Bouba, Alioune Tine, Fallou Ndiaye, Me Mamadou Lô, Mamoussé Diagne.

Ce sont les premières initiatives et actions concrètes de la Raddho et de la Lsdh qui ont réussi la jonction entre les partis politiques et les patriotes et démocrates sans partis. Abdoulaye Wade, Landing Savané, Amath Dansokho, Habib Sy furent libérés après une longue grève de la faim. D’ailleurs à leur sortie, Landing savané et Habib Sy furent pris en charge au Centre psychiatrique des Mamelles.

Seynabou Fall (Actusen.sn)

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