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Agissements sans merci entre pouvoir et opposition dans les médias : décryptage de l’analyste politique Mamadou Albert Sy

La classe politique sénégalaise s’entredéchire. Les agissements médiatiques entre l’opposition et le pouvoir défraient la chronique, ces jours-ci. Après la sortie musclée des leaders de la coalition ‘’Yewwi askan wi’’ (Yaw) affirmant que l’investiture de Khalifa Sall sur les listes en vue des législatives du 31 juillet est «non-négociable», Mimi Touré lors de la conférence des leaders de ‘’Bby’’ a lynché Ousmane Sonko, leader de Pastef. C’était hier, le tour de la coalition Wallu Sénégal. Selon Mamadou Albert Sy, analyste politique, les approches sont certes différentes mais deux facteurs expliquent cette tension dans l’espace public : les élections législatives et la situation sociale et économique intenable des Sénégalais.

Extraits !

Avoir Khalifa Sall comme tête de liste, ça peut être un atout extrêmement important pour Yaw à l’occasion de ces joutes.

La coalition Yewwi askan wi (Yaw) se positionne comme principale force de l’opposition parce qu’elle vient de sortir d’une victoire aux élections locales. Elle prépare les législatives. Elle voudrait rééditer le coup des élections locales, avoir une percée au niveau de l’assemblée. Quid à penser même que c’est possible à l’état actuel des rapports de force entre le pouvoir et l’opposition, que c’est possible qu’il y ait une cohabitation avec une majorité parlementaire qui serait issue des législatives.C’est un enjeu énorme pour l’opposition en général, particulièrement pour Yaw qui se considère comme un pôle majeur de l’opposition. Cette coalition met en avant aujourd’hui la question des droits civiques et politiques de Khalifa Sall, la question de la protection d’Ousmane Sonko face au procès qui se dessine à l’horizon. Donc, ce sont deux questions très difficiles pour le pouvoir, et ‘’Yaw’’ va agiter ces deux questions pour essayer d’avoir Khalifa Sall comme tête de liste aux Législatives prochaines. Et avoir  Khalifa Sall comme tête de liste, ça peut être un  atout extrêmement important pour Yaw à l’occasion de ces joutes.

Karim Wade comme tête de liste, un atout majeur pour le Pds

La coalition ‘’Wallu Sénégal’’ est sur le même chemin. Elle sait que ces résultats, à l’issue des dernières élections, sont relativement satisfaisants, mais insuffisants. Mais le Pds sait que c’est un moment extrêmement important pour l’opposition. Le Pds va, lui aussi, mettre en avant la question de Karim Wade. Que ce dernier retrouve ses libertés civiques et politiques. C’est une stratégie de radicalisation du Pds qui se dessine et qui explique la présence du Pds au-devant de la scène politique. Il est assez expérimenté. Il sait que la situation est défavorable au pouvoir en place. Il va tout faire pour réorganiser, consolider la coalition Wallu, mettre en avant la question de Karim Wade pour qu’il retrouve ses libertés civiles et politiques. Karim, tête de liste d’une coalition, ce serait un atout majeur pour le Pds, pour que Sopi  sorte de sa situation de parti en léthargie qui n’arrive pas à se stabiliser. Si le  fils du Maître Wade retrouve sa liberté, il est évident que ça va être un second souffle pour le Pds.

La défaite de ‘’Benno aux Législatives, une catastrophe pour le président de la République. Une cohabitation, ce serait très difficile à gérer par le président de la République et sa majorité politique. Avoir un premier ministre issu de l’opposition, Macky Sall, peut-être, ne l’envisage pas. Ça sera la fin de son deuxième mandat.

Pour les enjeux de la majorité présidentielle, Benno bokk yakaar (Bby) sort d’une grande défaite dans les grandes villes à l’issue des élections locales. Donc, le pouvoir est aujourd’hui mal positionné sur le plan politique. Même s’il dit, par ailleurs, qu’ils (les gens du Bby) ont gagné la majorité des collectivités territoriales, il est évident que Bby est en mauvaise posture. Parce qu’il y a une division interne, des conflits internes, des égos dedans, des divergences peut-être entre l’Apr et ses alliés. C’est donc, un moment très critique pour Benno. Le retour de cette coalition devant la scène médiatique, c‘est d’appeler à l’unité, à une préservation du pouvoir. Benno sait que la défaite aux  prochaines élections législatives va être catastrophique pour leur avenir. Elle ne peut pas envisager  de perdre l’Assemblée nationale. Une cohabitation, ce serait très difficile à gérer par le président de la République et sa majorité politique. Donc, c’est un enjeu important pour Benno. Mais aujourd’hui, l’opposition devient une véritable menace.

Dans cette opposition ‘’Benno’’ cible ‘’Yaw’’ qui émerge comme pôle le plus important du point de vue électoral. Aujourd’hui la critique de Benno cible essentiellement Yaw et particulièrement Ousmane Sonko. Là, c’est un enjeu important de déstabiliser Yaw qui pourrait faire des résultats assez importants aux prochaines élections. A côté de ces enjeux pour Benno, il y a un enjeu politique extrêmement important. On est à un tournant décisif. Si la majorité perd les législatives, ça voudra dire beaucoup plus de problèmes à gérer par le président de la République. Avoir un premier ministre issu de l’opposition, Macky Sall, peut-être, ne l’envisage pas. Ça sera la fin de son deuxième mandat. Là, Benno a un enjeu, mais le président de Benno, de l’Apr par ailleurs chef de l’Etat, aura un problème sérieux sur le plan politique. Ça justifie amplement  que l’Apr se remobilise et déploie des missions à travers le pays. La majorité veut reprendre l’initiative.

La situation socio-économique intenable des populations. Si vous regardez la flambée des prix, si vous regardez la situation des familles sénégalaises, la situation de la jeunesse, des syndicats. C’est des situations économiquement difficiles à gérer pour le pouvoir. Et ça peut, à tout moment, déraper, influencer la situation politique de notre pays

Il faudrait au-delà de ces positionnements politiques du pouvoir et de l’opposition, intégrer la situation socio-économique du Sénégal. C’est un facteur qu’on ne prend pas en compte dans les agissements du pouvoir et de l’opposition mais à mon avis, la situation sociale et économique du Sénégal, c’est vraiment ça qui sous-entend tous ces agissements-là. Le pouvoir est en mauvaise situation. Si vous regardez la flambée des prix, si vous regardez la situation des familles sénégalaises, la situation de la jeunesse, des syndicats. Mais c’est des situations économiquement difficiles à gérer pour le pouvoir. Et ça peut, à tout moment, déraper, influencer la situation politique de notre pays. Ça joue dans la stratégie du pouvoir. Et on le voit d’ailleurs. Depuis quelques jours, le gouvernement semble dire que la situation est mitigée, l’économie est de plus en plus mieux gérée, qu’on sort de la pandémie. Ces discours-là montrent qu’il y a une préoccupation réelle par rapport à la situation sociale et économique.

Mais l’opposition également, si elle agit, met en avant une stratégie. Elle sait que la défaite de la majorité aux locales provient du fait qu’il y a une situation socio-économique quasi intenable des populations. C’est pour cela qu’il y a un vote sanction. Et je crois que l’opposition regarde de près les conditions de vie des sénégalais et elle sait que s’il y a sanction aux législatives, la sanction pourrait provenir de la situation socio-économique des populations. Le mécontentement de ces derniers joue en faveur de l’opposition. Et elle va jouer cette carte de dénonciation des conditions difficiles des populations, particulièrement celles de la jeunesse. L’opposition va tout faire pour dresser un tableau noir qui va assombrir l’horizon du Sénégal. C’est une bataille politique que les acteurs sont en train de mener.

Amar DIAGNE (Actusen.sn)

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