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Amadou Bâ sur la loi interprétative de la loi d’amnistie : «elle vise uniquement les atteintes graves aux droits de l’homme»

Après la commission des Lois, de la Décentralisation, du Travail et des Droits humains, l’Assemblée nationale a examiné la proposition de loi portant interprétation de la loi d’amnistie. Initiateur de la loi interprétative, Amadou Bâ a indiqué, lors des travaux en commission que « le champ d’application de la loi d’amnistie était restreint aux seules infractions qui répondaient à une motivation politique ou à celles commises en lien avec l’exercice d’une liberté politique. La volonté du législateur n’a jamais été de laisser impunies des infractions de droit commun, sans aucun lien avec une motivation politique ». Aussi, poursuit-il, la loi d’amnistie n’a pas entendu exclure de son champ d’application la prise en charge des droits des victimes par le biais d’une indemnisation juste et équitable, indépendamment de la possibilité d’une mise en jeu de la contrainte par corps ».

« Aïssata TALL Sall avait, en commission, indiqué que les actes de tortures ou de traitements dégradants sont bannis et exclus du champ d’application, mais… »

Et concernant la loi interprétative, Amadou Bâ a fait savoir qu’elle vise « à clarifier le champ d’application du texte initial afin d’éviter que la loi nationale puisse entrer en conflit avec les accords internationaux régulièrement ratifiés par le Sénégal. Elle vise à circonscrire le champ d’application de la loi n° 2024-09 du 13 mars 2024 portant amnistie afin de lever toutes les équivoques et controverses sur les catégories d’infraction qu’elle couvre ». Sur le contexte et l’objet de la proposition de loi interprétative, le député a souligné que lors de l’examen du projet de loi portant amnistie en 2024 par la Commission des Lois, de la Décentralisation, du Travail et des Droits humains, le Ministre de la Justice, Garde des Sceaux (Aïssata TALL Sall), avait indiqué que les actes de tortures ou de traitements dégradants sont bannis et exclus du champ d’application dudit texte, avant de préciser que des sanctions seront prononcées s’il existe des preuves les attestant ».

« Cette exclusion n’a pas été matérialisée dans le texte final qui a été adopté en séance plénière »

Seulement, lors de la plénière, déplore le député, Toutefois, « cette exclusion des infractions sus-évoquées n’a pas été matérialisée dans le texte final qui a été adopté en séance plénière. Ce qui contrevient aux obligations internationales du Sénégal en matière de protection des droits fondamentaux de l’homme ainsi qu’à l’évolution récente de la jurisprudence internationale y relative ». Amadou Bâ se veut très clair. Pour lui, « les atteintes graves aux droits fondamentaux de l’homme, notamment le droit à la vie, le droit de ne pas subir de tortures, de traitements cruels, inhumains ou dégradants, ne sauraient être couvertes par une amnistie ».

« L’indemnisation de l’ensemble des victimes constitue un préalable à la réconciliation »

Outre les cas de torture et atteinte aux droits de l’homme, le député est aussi, largement revenu sur la question de l’indemnisation des victimes. Sur ce, il a affirmé que toute loi amnistiante, qui ne prévoit pas de mécanisme d’indemnisation, est supposée nulle. C’est la raison pour laquelle, précise t-il, le Ministre de la Justice « Aïssata T’alla Sall) avait annoncé la mise en place d’une commission d’indemnisation pour les victimes ». Amadou Ba reste convaincu que l’indemnisation de l’ensemble des victimes constitue un préalable à la réconciliation.

« Le législateur dispose de la liberté de ne pas attendre qu’il y ait une controverse jurisprudentielle pour user de ses prérogatives d’interpréter une loi » 

S’agissant de l’absence d’une jurisprudence discordante devant justifier l’opportunité d’interpréter la loi portant amnistie, le député a fait remarquer que le législateur dispose de la liberté de ne pas attendre qu’il y ait une controverse jurisprudentielle pour user de ses prérogatives d’interpréter une loi qu’il juge ambiguë ou obscure: « Il s’agit de clarifier le champ d’application dans le souci d’éviter, d’une part, toute interprétation erronée de la loi portant amnistie au détriment des intérêts des victimes et, d’autre part, que le Sénégal ne puisse pas voir sa responsabilité engagée au niveau des juridictions internationales pour absence de recours effectif pour les victimes ou leurs ayants droit qui souhaiteraient saisir les tribunaux nationaux ».

« La sacralité de la vie humaine est incomparable à un quelconque bien matériel dont la perte peut être remplacée, quelle qu’en soit sa valeur »

Par rapport à la non-prise en compte des pertes de biens matériels, Amadou Bâ a soutenu devant ses collègue que « la sacralité de la vie humaine est incomparable à un quelconque bien matériel dont la perte peut être remplacée, quelle qu’en soit sa valeur ». Donc, précise t-il, « cette proposition de loi vise uniquement les atteintes graves aux droits de l’homme ».

Relativement à la question de l’incidence financière, il a soutenu que « le propre d’une loi interprétative consiste à ne rien ajouter ou retrancher dans la loi qu’elle interprète. Par conséquent, une telle loi ne saurait comporter une incidence financière puisqu’elle se limite tout simplement à clarifier le sens de la loi à laquelle elle se rapporte ».

« Une loi interprétative ne saurait comporter une incidence financière puisqu’elle se limite à clarifier le sens de la loi à laquelle elle se rapporte »

Amadou Bâ s’est, aussi, expliqué sur l’expression « motivation politique ». Sur ce, il a indiqué que « la proposition de loi interprétative ne fait que reprendre une expression initialement contenue dans la loi afin de repréciser son sens. Par ailleurs, il a souligné que « la loi interprétative n’est pas l’expression d’une justice des vainqueurs. Elle ne vise ni les Forces de Défense et de Sécurité (FDS) ni les autorités politiques de l’ancien régime, d’autant plus que la loi a un caractère général et impersonnel. En revanche, son objet consiste à lever toute ambiguïté ».

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