20 ans de réclusion criminelle ! C’est la lourde peine requise par le ministère public contre le chauffeur Youssoupha Ndiaye. Accusé d’association de malfaiteurs, de détournement de mineure avec fraude ou violences, de viol collectif sur mineure et de pédophilie, il faisait face, hier, au juge de la chambre criminelle de Dakar. L’affaire est mise en délibéré au 18 mai prochain.
Chauffeur de taxi-clando, Youssoupha Ndiaye a été appelé à la barre de la chambre criminelle de Dakar pour répondre des faits de viol sur une mineur de 14 ans. Mais, à l’achèvement de la lecture de l’ordonnance de renvoi, l’un des conseils de la défense, en l’occurrence Me Djiby Seydi, a soulevé une exception d’incompétence du tribunal sur le viol qui est reproché à son client. En effet, fait-il remarquer, à l’époque des faits, notamment en 2018, l’infraction de viol qui constituait un délit n’était pas encore criminalisée.
«Au moment des faits, le viol était un délit et non un crime», a révélé Me Djiby Seydi qui a soulevé cette exception d’incompétence du tribunal à juger cette affaire.
Cependant, invité à faire ses observations sur les constatations de la robe noire, le procureur a fait savoir qu’au-delà des faits de viol et de pédophilie pour lesquels Youssoupha Ndiaye est poursuivi, il y a les faits d’association de malfaiteurs qui est autonome et criminelle. Sur ce, précise le parquetier, «il faut tenir compte de ça et rejeter l’exception soulevée par la défense».
Le suivant au pied de la lettre, le tribunal rejette ledit exception en tenant compte du crime d’association de malfaiteurs comme l’a souligné le parquet. Ainsi, le juge a ordonné la poursuite des débats.
Concernant les faits qui ont occasionné l’arrestation de l’accusé, il est ressorti de l’enquête que le chauffeur de taxi-clando et deux de ses amis en cavale ont été accusés courant décembre 2018 d’avoir violé une jeune fille de 15 ans. Étant le plus malchanceux du trio, Youssoupha a été le seul à être alpagué avant d’être inculpé pour viol. Les faits ont eu lieu à Diamniadio vers la station Oil Libya aux environs de 3 heures du matin.
Youssoupha Ndiaye, à bord d’un véhicule, en compagnie de deux autres individus non identifiés, ont intercepté la gamine, A. Ba. Marchande de fruits, cette nuit-là, comme d’habitude, la victime était à la recherche d’éventuels clients. Mais, soudainement, une voiture dans laquelle se trouvaient Youssoupha Ndiaye et ses acolytes s’est garée à côté d’elle.
Ces trois hommes qui sont sortis de nulle part, sous la menace d’une arme, l’ont enlevé avant qu’ils ne prennent la direction de la forêt de « Déni Guedji » de Diamniadio. Une fois à destination, ils ont, à tour de rôle, satisfait leur libido sur elle avant de fondre dans la nature. Hélas, lorsque la voiture incriminée quittait en trombe l’endroit où ils ont kidnappé la mineure, le nommé Mamadou Dame Diallo qui avait vu la scène a pris la peine de noter le numéro de la plaque d’immatriculation.
Muni de cette information, il s’est rendu à la gendarmerie de Diamniadio pour les informer. Ainsi, les agents enquêteurs qui se sont lancés à sa recherches ont trouvé la fille dans un piteux état abandonnée en pleine forêt. Toutefois, comme la voiture dans laquelle se trouvait la victime appartenait à une autre personne, cette dernière, lorsqu’elle s’est présentée devant les flics a été interpellée.
Mais, il a raconté aux gendarmes avoir prêté son véhicule à Youssoupha Ndiaye. Ce, avant qu’ils ne lui demandent de lui dire d’aller se présenter à eux. C’est dans ces circonstances qu’il a été alpagué et le propriétaire de la voiture relâché.
Présente à la barre pour narrer sa mauvaise aventure à laquelle elle n’arrive toujours pas à se ressaisir, À. B éclate en sanglots. Selon elle, c’est l’accusé qui l’a violé en premier avant que ses comparses ne lui emboîtent le pas. «Il révélait même que ses acolytes étaient faibles contrairement à lui qui était, selon lui, le meilleur».
À peine a-t-elle prononcé cette phrase que, de chaque œil, coula une longue traînée de larmes qui alla mourir à une commissure des lèvres. Poursuivant, la jeune fille ajoute qu’au moment où ses bourreaux la tiraient, ils l’ont fait croire qu’ils allaient la conduire à la police puisque c’était une infraction le fait de vendre à cette heure de la nuit. Mais, dès qu’ils l’ont fait monter dans le véhicule, indique-t-elle, Youssoupha et ses amis qui avaient des couteaux, pistolets et de l’essence dans leur véhicule ont pris la direction de la forêt.
Par ailleurs, la victime qui dit reconnaître l’accusé car ayant été lucide au moment des faits renseigne : «je suis une gamine et c’était la première fois que j’ai eu des rapports sexuels. C’est la même nuit que les agents enquêteurs m’ont conduits à l’hôpital». Le certificat médical révèle une défloration hyménale récente, lésions ulcéreuses sur les grandes lèvres ainsi que le périnée et une présence de sperme sur les habits de la victime.
Poursuivi pour association de malfaiteurs, détournement de mineure avec fraude ou violences, viol collectif sur mineure et pédophilie, Youssoupha Ndiaye, âgé de 25 ans, a contesté tous les chefs d’accusation en soutenant que rien n’est avéré sur ce qu’on lui reprochait. Non sans donner une version pour se soustraire à sa responsabilité pénale.
«Il y avait deux individus qui avaient loué mes services pour les conduire à Toubab Dialaw. Mais, en cours de route, ils m’ont demandé de leur laisser le temps d’aller boire un verre dans le bar d’à côté dénommé « Columbia ». Ce que j’ai fait en restant dans ma voiture. Mais au moment où je les attendais, j’ai aperçu la fille qui était assise devant un bâtiment en construction être attaquée par des jeunes armés de machette vers 3 heures du matin».
À en croire l’accusé, ces agresseurs l’ont menacé de me tuer s’il refusait de les embarquer avec la gamine dans la voiture pour ensuite les transporter dans la forêt. «Je ne pouvais rien faire puisque je n’étais pas armé. Nous avons quitté Diamniadio pour aller à Sebi Ponty. Ils m’ont éconduit du véhicule avant d’accomplir leur sale besogne. Je connais l’un des présumés violeurs que j’avais embarqués dans mon véhicule. Il s’appelle Ousmane», se dédouane-t-il.
- Bâ, le père de la victime a réclamé un dédommagement de 5.000.000 de francs. Le représentant du ministère public pour qui les faits reprochés à Youssoupha ne souffre d’aucun doute a requis contre celui-ci une peine de 20 ans de réclusion criminelle. À la suite de la défense qui estime qu’il n’y a aucun élément probant dans le dossier, le tribunal a mis l’affaire en délibéré au 18 mai prochain.
Adja K. Thiam (Actusen.sn)