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Covid-19 : Quelle place pour l’Afrique dans la coopération sanitaire internationale ?

Le continent africain fait indéniablement face à beaucoup de défis à relever dans le domaine sanitaire ; l’un d’entre eux et à bien des égards des plus importants à relever, voire le plus important, est le renforcement du système de santé (RSS) afin d’assurer l’accès universel à des soins de qualité. En effet, certaines épidémies causées par le paludisme, la tuberculose, le VIH/Sida, la rougeole ou encore la maladie à virus Ebola ont comme conséquence un nombre important de pertes humaines. Pour faire face à ces crises sanitaires, l’Afrique a toujours compté sur l’aide internationale à travers une coopération sanitaire sous l’égide de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS). La gestion de l’épidémie à virus Ebola en 2014 en est un exemple patent dans la mesure où une importante solidarité internationale fut mobilisée afin d’arrêter la propagation de la maladie en Afrique de l’Ouest. D’ailleurs, cela laisse présager une aptitude des pays africains à gérer et à mettre en place une riposte efficiente contre les épidémies et les pandémies.

Pourtant, avec la pandémie de la Covid-19, certaines difficultés à la mise en place d’une coopération sanitaire internationale peuvent être relevées. Si l’Afrique semble jusqu’à présent relativement épargnée par le virus, il reste que l’OMS s’inquiète pour son avenir au regard de la progression du nombre de cas contaminés ainsi que des conséquences économiques et sociales de la pandémie. La solidarité internationale s’exprimant à travers la coopération internationale pourrait être indispensable au continent africain si jamais les inquiétudes de l’OMS venaient à se confirmer : l’Afrique, prochain épicentre de la pandémie de la maladie à coronavirus (Covid-19). Cette coopération se présente principalement sous deux formes. Tout d’abord, elle se concrétise à travers le Règlement Sanitaire International adopté en 1951 lors de la 4ème Assemblée Mondiale de la Santé et révisé en 2005 dans le but de coordonner l’action de l’Organisation Mondiale Santé (OMS) au niveau international. Ensuite, la coopération sanitaire internationale se matérialise aussi généralement par l’aide apportée par les pays développés sous forme d’accords bilatéraux ou multilatéraux.

Néanmoins, cette pandémie voit le jour dans un contexte international de crise du multilatéralisme ayant des conséquences négatives sur la coopération sanitaire internationale. Ainsi, le système multilatéral mis en place au lendemain de la Seconde Guerre mondiale est vivement remis en question et vit des moments assez flous quant à sa pérennité. Cette crise, amorcée par les Etats-Unis et accentuée par l’arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche, remet en perspectives les jeux de pouvoirs sur la scène internationale allant jusqu’à remettre en cause le développement de la coopération sanitaire internationale dans un contexte de pandémie de la Covid-19. Ainsi, le 14 avril 2020, le Président américain annonçait suspendre ses versements à l’OMS car la jugeant trop favorable à la Chine et en critiquant sa gestion de la pandémie.

La création de l’OMS répondait principalement à un enjeu qui était de limiter et de lutter contre la propagation des maladies infectieuses dans le monde sachant que les crises sanitaires ont souvent des impacts internationaux. La solidarité internationale en matière de santé trouve ainsi tout son sens dès lors « que toutes les occasions pour les nations de travailler ensemble, d’échanger leurs expériences, de faire circuler une information de bonne qualité et relativement indépendante, de proposer des directions communes, voire des règles communes, améliorent l’efficacité et l’efficience des actions de santé » (Yves Charpak, 2009). De ce fait, les États sous-développés et/ou qui souffrent de mal gouvernance – dont la grande partie se trouve en Afrique – ne sont pas laissés pour compte dans les avancées en matière de santé. Par ailleurs, une autre raison à la nécessité d’établir une coopération sanitaire internationale à travers la création d’une organisation sanitaire mondiale demeure sans doute – comme l’explique si bien Yves Charpak – dans le fait que ne pas aider les États pauvres, sous-développés reviendrait à « prendre le risque que leurs enjeux sanitaires nous reviennent en boomerang d’une façon ou d’une autre… En effet, certains enjeux sanitaires sont mondiaux » (Kant 1991).

S’il est vrai que certaines critiques peuvent être émises à l’encontre de l’OMS – comme sa gestion de l’épidémie à virus Ebola de 2014 pour laquelle il lui a été reproché d’avoir tardé à alerter sur la gravité de la maladie lui laissant ainsi le temps de progresser ou alors le fait qu’elle ait largement hésité à qualifier la pandémie de la maladie à coronavirus d’Urgence de Santé Publique à Portée Internationale (USPPI) – il n’en demeure pas moins que l’OMS est très présente dans la lutte contre les maladies transmissibles ainsi que dans l’aide aux pays en développement dans le renforcement de leur système de santé et l’application des mesures dans le cadre du RSI (2005). En 2014, c’est grâce à la mise en place d’une coopération sanitaire internationale avec l’appui technique de l’OMS que l’épidémie à virus Ebola a pu être contenue en Afrique de l’Ouest avec des conséquences économiques et sociales moindres.

De ce fait, il apparaît que priver l’Organisation de contributions financières la mettrait certainement dans des difficultés pour faire face à la pandémie et continuer à offrir son assistance technique si essentielle aux pays pauvres et en développement pendant cette crise sanitaire internationale.

Références bibliographiques :

Yves Charpak, « 57. L’OMS et la mondialisation des enjeux sanitaires », Pierre-Louis Bras éd., Traité d’économie et de gestion de la santé, Presses de Sciences Po, 2009, p.523.

 Ibid., Plus généralement, et comme l’a déjà noté Kant en 1795, l’interdépendance entre les différents acteurs mondiaux est qu’« un droit violé quelque part est ressenti partout » ; Emmanuel Kant, Vers la paix perpétuelle, traduction de. J.-F. Poirier et F. Proust, Paris, Flammarion, 1991.

Sokhna Fatou Kiné Ndiaye

Doctorante en droit public mention droit international public

Institut de Droit public, Sciences politiques et Sociales (IDPS)

Université Sorbonne Paris Nord

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