Ce mercredi 2 avril 2025, Aliou Top, le patron du site d’information Sunugal 24, a comparu devant le tribunal des flagrants délits de Dakar. Il est poursuivi pour diffusion de fausses nouvelles et discours incitant à la discrimination, des accusations particulièrement sensibles dans un contexte social déjà marqué par des tensions identitaires. Les propos tenus par le journaliste, qui a évoqué un prétendu projet de domination politique d’une sous-région par des présidents peuls, ont provoqué l’indignation et la consternation.
Lors de l’audience, le prévenu a expliqué avoir été “induit en erreur par sa source”, un aveu qui souligne l’importance de la rigueur dans le travail journalistique. Aliou Top a présenté ses excuses, affirmant qu’il n’avait pas l’intention de nuire, mais de sensibiliser à ce qu’il croyait être un projet en cours. “Je suis halpular. Je fais partie de cette communauté. Mon intention était de sensibiliser”, a-t-il déclaré, précisant que “ce n’est pas toute la communauté qui soutient le projet”. Toutefois, cette tentative de justification a été perçue comme insuffisante face à la gravité des accusations.
Le procureur a quant à lui mis en lumière l’irresponsabilité du journaliste, soulignant qu’il avait affirmé détenir des enregistrements audio pour soutenir ses affirmations, avant de se rétracter en justice. Le parquet a requis une peine de six mois de prison, dont trois mois fermes, estimant que les excuses du prévenu étaient avant tout un moyen de se disculper. Le procureur a rappelé l’importance de la gravité des propos de Top dans un contexte où les discours ethniques sont scrutés de près, mettant en danger la cohésion nationale. La défense, tout en reconnaissant la faute de son client, a sollicité la clémence du tribunal, arguant que ses excuses étaient sincères et présentées dès que les faits ont été connus. Me Sayba Danfakha et ses collègues ont insisté sur le fait que Top, après douze ans d’exercice, était victime d’une erreur humaine dans une profession exigeante et de plus en plus sous pression.
Les propos d’Aliou Top ont particulièrement heurté les membres de la communauté halpular, représentée à l’audience par plusieurs figures de proue, dont le professeur Ousmane Ndiaye. Ceux-ci ont estimé que ses déclarations avaient porté atteinte à l’harmonie sociale. L’avocat des parties civiles, Me Saly Mamadou Thiam, a rappelé l’importance de la responsabilité journalistique, affirmant que “ce n’est pas toute la communauté qui soutient le projet” ne justifiait en rien les propos publics du prévenu.
La question centrale dans cette affaire dépasse le seul cas de figure d’Aliou Top. Elle soulève des enjeux cruciaux sur la liberté d’expression et la responsabilité des médias. “C’est une coupure de vidéo”, a répondu le journaliste lorsqu’il a été confronté à ses propos. Mais ces excuses suffiront-elles à effacer les effets de ce discours, jugé dangereux pour la cohésion nationale ? La réponse viendra le 16 avril 2025, lorsque le tribunal rendra son verdict.
Aïssatou TALL (Actusen.sn)