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Histoire similaire à celle d’Astou Sokhna : deux agents de Nabil Choucair traînés en justice

La négligence médicale dans les centres de santé de Dakar est de plus en plus déplorée. Alors que le problème qui oppose les six sages-femmes de Louga à la famille de Astou Sokhna n’a pas connu son épilogue, un dossier similaire est évoqué, hier, par le juge de la 4ème chambre correctionnelle du tribunal de Dakar. Cette fois-ci, c’est le sieur Amsatou Diallo qui traîne à la barre une sage-femme et un gynécologue exerçant au centre de santé Nabil Choucair de Patte d’oie. Il leur reproche le délit d’homicide volontaire sur la personne de son épouse Aminata Cissé. Le verdict sera rendu le 2 juin prochain.  

Alors que le tribunal des flagrants délits de Louga statuait sur le sort des six sages-femmes à Louga hier, dans l’affaire de la dame Astou Sokhna, une de leurs collègues et un gynécologue ont été appelés à la barre de la Chambre Correctionnelle du tribunal de grande Instance de Dakar. Nadia Atinouke Tehevidemi Maliki Raimi et Marième Gueye puisque c’est d’elles dont il s’agit répondaient du chef d’homicide involontaire sur Aminata Cissé. Cette dernière qui a perdu la vie en 2014, un jour après la mort de son fils, a accouché selon l’accusation dans des conditions atroces.

Époux de la défunte : «elle m’a dit que deux individus lui tenait les jambes pendant qu’une sage-femme manœuvrait sur son bassin pour faire sortir le bébé»

À en croire le mari de la défunte, Amsatou Diallo, sa femme qui avait commencé le travail, a été acheminée très tôt à l’hôpital Nabil Choucaire. Plus précisément à 6h du matin. D’après l’époux éploré, la sage-femme qui les a accueillis lui a demandé de patienter sans lui fournir aucune explication. Pendant ce temps, son épouse qui devait obligatoirement être opérée du fait du poids du bébé se tordait de douleur dans la structure. Ce n’est que vers 13 heures qu’on lui annonce la naissance par voie basse de son fils qui n’a pas survécu.

Venu s’enquérir de l’état de la santé de sa femme, il constate que celle-ci avait une inflammation des lèvres. Fatiguée, la dame lui fait part des sévices qu’elle a subies au moment de son accouchement. «Elle m’a dit que deux individus lui tenait les jambes pendant qu’une sage-femme manœuvrait sur son bassin pour faire sortir le bébé. Ce dernier qui avait commencé à sortir la tête avait les épaules coincées du fait de son poids (5kg400)», narre Amsatou Diallo.

La mère du défunt : «elle était en position assise et elle a rendue l’âme étant toujours assise en se tordant de douleur»

Des déclarations approuvées par Fatoumata Mbaye, la maman de la défunte. Selon elle, c’est avec beaucoup de difficultés qu’elle a pu voir sa fille après son accouchement. «Quand je suis arrivée dans la salle, elle pleurait. Je croyais qu’elle le faisait à cause de la perte de son bébé mais elle m’a convaincue que non. En effet, elle m’a dit qu’elle a failli mourir en salle d’accouchement. Elle m’a raconté que deux gaillards tenaient ses jambes alors que la maïeuticienne appuyait sur son ventre. D’ailleurs, quand on m’a remis les habits qu’elle portait au moment de l’accouchement, je les ai jetés car ils étaient imbibés de sang. Elle était en position assise et elle a rendue l’âme étant toujours assise en se tordant de douleur», a raconté la dame qui renseigne que sa fille a laissé 4 orphelins.

La prévenue qui conteste les faits qu’on lui impute soutient que pendant 20 ans de service, c’était la première fois qu’elle voyait un enfant naître avec 5kg400

Entendue, Marième Gueye 57 ans, conteste le chef d’homicide involontaire qui lui ai reproché. Selon elle, la patiente était dans le jargon médical, une malade médecin. Confortant ainsi les dires du mari de la disparue. Mais elle précise que le bloc où elle devait opérer n’était pas opérationnel. C’est par la suite dit-elle que la dame qui avait le col dilaté a commencé à accoucher. Face à cela poursuit-elle, elle avait l’obligation d’assister la dame car la tête du bébé était déjà sortie.

«Quand j’ai vu que le bébé était coincé, j’ai préparé la table de réanimation car je savais qu’il y aura des complications. On avait mentionné dans le carnet qu’elle ne devait pas accoucher par voie basse. Mais elle est arrivée dans notre structure quand elle a commencé le travail. Ce qui est tard pour son cas. Car la patiente présentait quatre pathologies. Elle était diabétique, obèse hypertendu etc. Elle devait être prise en charge à 36 semaines», s’est défendue la sage-femme qui avait, au moment des faits, fait 20 ans de services.

D’ailleurs elle ajoute que durant tout le temps qu’elle a exercé, c’était la première fois qu’elle voyait un enfant naître avec 5kg400. Sur les complications de la dame suite à son accouchement, elle renseigne que la Nadia, qui était en spécialisation en gynécologie et stagiaire au moment des faits, a essayé de contacter le sous astreinte mais en vain. «Après l’accouchement, c’est la gynécologue qui a consulté la patiente après son accouchement et n’avait constaté aucune complication. Quand j’ai des patientes comme Aminata Cissé, chaque fois après le service, je contacte la relève pour m’enquérir de leur état. Ce jour là, ma collègue m’a rassurée sur l’état de Aminata. C’est au lendemain qu’un autre stagiaire en spécialisation gynécologie, en l’occurrence Dr Biaye qui a constaté les complications. La dame avait une déchirure utérine et il fallait l’opérer d’urgence. Une intervention risquée aussi à cause des pathologies qu’elle avait», souligne la sage-femme.

Venu témoigner, Dr Biaye qui a réussi à son examen final contrairement à Dr Nadia qui a été recalée, explique : «si le diagnostic de la déchirure utérine était fait précocement, elle pouvait s’en sortir. Toutefois, les facteurs de morbidité qu’elle présentait ne militaient pas en sa faveur». Celui-ci a constaté la déchirure utérine quand la patiente se plaignait de douleurs. Il était de garde à cet instant. Quant à l’anesthésiste, il affirme que l’opération était risquée mais elle était la seule alternative pour sauver la dame.

La partie civile réclame 100.000.000 de francs de dommage et intérêt

L’avocat des parties civiles qui n’a pas su dissimuler sa désolation face à la souffrance de la dame Aminata Cissé, dénonce une négligence médicale manifeste. « Les indications pour une césarienne étaient absolues. La sage-femme a plus d’expérience elle aurait pu dire non face à la décision impertinente de la gynécologue. En la forçant à accoucher par voie n’y a-t-il pas une responsabilité ?  Il faut que cela cesse. Il faut qu’on soit plus responsable dans nos prises de décision. Il faut qu’on soit conscient que la vie humaine est sacrée. Aminata Cissé n’est pas morte de diabète ni d’obésité. Elle est morte à cause d’insuffisance cardio-pulmonaire.  On l’a fait accoucher dans des conditions inhumaines. On aurait pu éviter cette situation en se comportant correctement», a plaidé l’avocat de la partie civile qui a demandé que les prévenus soient toutes les deux condamnées.

Il a réclamé 100.000.000 de francs CFA pour chacune des parties civiles en guise de dédommagement. Même s’il reste convaincu que tout l’argent du monde ne va pas ramener Aminata Cissé.

Mais le maître des poursuites estime que la responsabilité de la sage-femme Marième Gueye n’est pas pénale. Selon le substitut du procureur de la République, celle-ci obéissait aux ordres de la gynécologue même si elle était plus expérimentée qu’elle. Ainsi, le représentant du ministère public a requis 2 ans d’emprisonnement ferme plus un mandat d’arrêt contre Nadia et la relaxe pure et simple pour Marieme Gueye.

Me Demba Ciré Bathily a formulé la même demande pour sa cliente. «Nos structures médicales sont totalement dégarnies. Qui est responsable quand on n’a pas de plateaux médicaux adéquats ? C’est l’Etat. On n’a pas assez de personnels. C’est l’état qui est encore responsable.  La dame n’a pas suivi toutes les consultations médicales. Quand elle est arrivée à l’hôpital, elle était déjà en travail. On reproche à ma cliente d’avoir assisté le gynécologue», a relevé Me Bathily.

L’affaire mise en délibéré, le jugement sera rendu le 2 juin prochain.

Adja K. THIAM (Actusen.sn)

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