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Macky Sall : «le Sénégal peut être secoué, mais il résistera»

Après avoir entretenu le suspense pendant des mois, le président sénégalais a annoncé qu’il ne serait pas candidat à l’élection présidentielle de février 2024. Dans un entretien exclusif au «Monde», il s’explique sur son choix.

A moins de huit mois de la présidentielle de février 2024, Macky Sall a annoncé, lundi 3 juillet, qu’il ne briguerait pas un troisième mandat en février 2024. Cette question avait électrisé le débat et alimenté les violences de ces derniers mois ; l’opposition considérait en effet cette candidature comme « illégale ». Dans un entretien exclusif au Monde, le président sénégalais explique les raisons de son renoncement, ses ambitions pour l’avenir et fait le point sur ses relations avec ses opposants et avec la France.

Qu’est-ce qui vous a décidé à renoncer à un troisième mandat ?

Je n’ai subi aucune pression. Dès 2018, j’avais écrit dans un ouvrage, Le Sénégal au cœur (Le Cherche Midi, 2019), que je briguais mon dernier mandat. Mais dès ma victoire, il y a cinq ans, certains se sont empressés de lancer des campagnes mensongères autour d’un prétendu troisième mandat. J’ai par ailleurs reçu de nombreux soutiens d’élus qui m’ont supplié de sauter le pas. Dimanche 2 juillet, 512 élus m’ont remis une pétition allant dans ce sens. Que certains s’agitent sur ce sujet ne m’a pas dérangé, c’est la démocratie. Mais cela a fait courir la rumeur.

Pourquoi avoir attendu aussi longtemps avant de clarifier votre décision ? Le flou que vous avez entretenu n’a-t-il pas contribué à la crispation politique, ces derniers mois ?

Je ne pouvais pas dire plus tôt que je ne me représenterais pas. Sinon, le pays aurait cessé de travailler. Les tensions politiques de ces derniers temps n’ont rien à voir avec la question du troisième mandat. Le fond du problème, c’est une affaire judiciaire qui a débuté en mars 2021 avec l’arrestation d’un opposant [Ousmane Sonko était poursuivi pour viols contre une employée d’un salon de massage et a été condamné en juin à deux ans de prison ferme pour « corruption de la jeunesse »]. Il a appelé les gens à descendre dans la rue pour protester contre la justice et il y a eu des morts. En juin, lors de son procès, les mêmes appels à l’insurrection ont été lancés avec les mêmes conséquences.

Vous n’avez jamais été tenté par un troisième mandat ?

Non. La seule raison pour laquelle j’aurais pu me représenter, c’est si le pays avait été confronté à une menace sérieuse pour sa stabilité. Mais cette menace n’est pas arrivée.

Dans votre discours à la nation, vous avez insisté sur l’importance des valeurs républicaines. Estimez-vous qu’elles sont menacées ?

Oui. Certains appellent à l’insurrection, à prendre le pouvoir par des méthodes antidémocratiques pour saper les fondements de la République. Ce sont des dangers pour notre pays. Mais même si le Sénégal peut être secoué, comme tous les pays, il résistera pour continuer sa marche.

Après la condamnation d’Ousmane Sonko, les affrontements entre manifestants et forces de défense ont fait au moins 23 morts, selon Amnesty International. Le ministre de l’intérieur a évoqué la présence de « forces occultes » sur le sol sénégalais. Quelles sont-elles ?

Une enquête est en cours, mais nous savons qu’il y a eu des complices qui ont tenté de déstabiliser le Sénégal. Parfois à l’étranger. En France, [le parti] La France insoumise a soutenu ces violences. C’est une ingérence inadmissible.

En mars 2021, il y avait déjà eu de fortes tensions politiques qui avaient fait 14 morts. Les familles des victimes attendent toujours une enquête judiciaire. Où en est-elle ?

Cela est en bonne voie. Mais je ne suis pas habilité à commenter un dossier judiciaire.

Amnesty International a dénoncé un « usage disproportionné » de la force lors de la répression des manifestations de juin. N’y a-t-il pas un problème avec le maintien de l’ordre au Sénégal ?

Je ne le pense pas. Quand des personnes attaquent des brigades pour prendre des armes, est-ce une manifestation démocratique ? Pourquoi détruire des mairies, des prisons, des tribunaux ? Quand des manifestants incendient des maisons, Amnesty International condamne-t-elle ces actes ? Quand on appelle la jeunesse à mourir, à se sacrifier, où est cette organisation ?

Il y a eu des morts par balles à Ziguinchor…

Je ne le nie pas. La justice va faire la lumière là-dessus, des enquêtes sont en cours.

Les forces de défense seront-elles sanctionnées si ces enquêtes les mettent en cause ?

Attendons que l’enquête établisse les responsabilités. Il y a une telle insistance pour désigner des coupables !

Une demande d’enquête pour « crimes contre l’humanité » a été soumise à la Cour pénale internationale (CPI) contre vous et d’autres responsables sénégalais par Juan Branco, l’avocat français d’Ousmane Sonko. Que répondez-vous à ces accusations ?

C’est ridicule. Le Sénégal est le premier Etat au monde à avoir ratifié les statuts de la CPI. Nous n’accepterons pas d’entrer dans ce jeu de diversion.

Le Monde 

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