L’Etat du Sénégal s’est vu reprocher son manque de communication par rapport à des dossiers pendants qui l’interpellent, directement. Eh bien, ce mardi, le Gouvernement a décidé de rectifier le tir. Neuf ministres, qui sont directement cités dans les problèmes de l’heure feront face à la presse. Ce, pour ergoter sur les maux du moment, qui ont pour noms, émigration clandestine, pénurie d’eau, problèmes environnementaux, licences de pêche, chômage des jeunes, campagne arachidière et importation de sucre. Une rencontre aux relents d’une foire à problèmes, sachant qu’au-delà des explications qui vont être données, les Sénégalais attendent surtout des solutions et la vérité, rien que la vérité.
C’est la première fois, depuis que Macky Sall a été élu à la Magistrature suprême, que le Gouvernement prenne une telle initiative. Seulement, c’est un pari risqué, dans la mesure où il y a encore beaucoup de non-dits par rapport à des dossiers pendants qui ont englouti beaucoup d’argent.
Antoine Félix Diome, svp, dites-nous la vérité, toute la vérité sur le nombre exact de jeunes avalés par l’Océan Atlantique, dans le cadre de l’émigration clandestine
La conférence de presse de ce mardi sera une occasion de dire aux Sénégalais la vérité sur le bilan exact de l’émigration clandestine. Le ministre de l’Intérieur est la personne la mieux indiquée pour le faire. En effet, même si la Marine nationale intervient en mer pour arrêter les candidats à cette forme de migration, il n’en demeure pas moins qu’elle laisse toujours à la Police et à la Gendarmerie de mener des enquêtes pour connaître le nombre de victimes et les circonstances dans lesquelles des centaines de candidats à l’émigration ont perdu la vie ou sont portés disparus.
Or, depuis que le phénomène de l’émigration a repris, les forces de défense et de sécurité se sont abstenues de donner un quelconque chiffre, se limitant à démentir ceux donnés par l’Organisation internationale de la migration. De même, les Autorités sénégalaises n’ont pas dit combien a été investi pour lutter contre ce fléau en matière d’équipements, de protection et de sauvetage.
Abdoulaye Diouf Sarr, de grâce, ôtez vos gants et dissipez nos doutes liés à la maladie mystérieuse !
L’autre dossier brûlant de l’heure, c’est, bien sûr, la maladie mystérieuse qui a frappé des centaines de pêcheurs. Jusqu’au moment où l’on parle, les autorités sont incapables de dire de quelle pathologie il s’agit, exactement. Les réponses sont attendues, particulièrement, du Ministère de la Santé et de l’Action sociale. Les Services d’Abdoulaye Diouf Sarr devront, entre autres, révéler le résultat des tests effectués par l’Institut-Pasteur et dissiper définitivement, les doutes liés à une probable contamination. Ce qui permettra de situer les responsabilités dans cette affaire. Le Ministère de l’environnement s’est déjà prêté à cet exercice en publiant les résultats qu’il a réalisés, ce samedi 21 novembre. Malheureusement, les esprits sont confus aujourd’hui plus qu’hier.
Alioune Ndoye, pitié, parlez-nous des licences de pêche et des navires chinois !
Les questions qui seront posées au ministre de la Pêche et de l’Economie maritime vont sans doute fuser de partout, sachant qu’Aliou Ndoye est interpellé sur la plupart des dossiers évoqués ci-haut. Il y a, d’abord, la problématique des licences de pêche dont ont bénéficié des navires étrangers, même si c’était sous le magistère de vos prédécesseurs. L’opinion a le droit de connaître la vérité, au nom de la gestion vertueuse dont se targe ce régime, le nombre de licences de pêche filées à des navires étrangers. Vous ne devez une vérité absolue, car cette question est intimement liée à l’émigration clandestine.
Face à la rareté des ressources halieutiques, certains pêcheurs se tournent vers le transport des migrants irréguliers. Il y a aussi le fait que les transports maritimes sont directement interpellés dans l’affaire de la maladie mystérieuse, qui frappe les pêcheurs. Les premiers éléments de l’enquête menée par la Direction de l’environnement et des établissements classés laissent penser que les bateaux, qui transportent des produits chimiques ne sont pas exempts de tout reproche. Donc, le ministre-maire de Dakar-Plateau doit être en mesure de dire quels navires sont susceptibles d’être à l’origine du problème et quels produits ils transporteraient, lors des faits, s’ils étaient mis en cause.
Serigne Mbaye Thiam, au nom du Ciel, donnez-nous une date proche pour la fin de la pénurie d’eau qui balafre la conscience collective !
La pénurie d’eau, qui sévit dans plusieurs quartiers de Dakar, fait partie des actualités brûlantes. Même si la société, qui a gagné le Contrat d’affermage qui est le plus souvent cité, l’Etat a, bien sûr, une très grande part de responsabilité dans cette histoire. En effet, c’est à la Sones de s’assurer que le réseau fonctionne bien. La concession ne s’occupe que de la gestion et de l’entretien. Ainsi, les explications de Serigne Mbaye Thiam relativement aux travaux, qui sont en train d’être effectués, permettront de pouvoir situer les responsabilités.
Dame Diop, au nom du Créateur, où est passé les sous de l’Ue destinés à l’insertion des migrants ?
Le Ministère de l’Emploi devra tâcher de convaincre l’opinion qu’il a fait beaucoup d’efforts pour juguler le problème du chômage, notamment celui des jeunes. Dame Diop devra surtout trouver les mots justes pour inciter les Sénégalais à davantage rester chez eux pour se bâtir un lendemain meilleur. Pour ce faire, il faudra surtout démontrer que les sommes colossales investies notamment par l’UE pour la réinsertion des migrants ont été utilisées à bon escient. Ce bilan, nous souffle-t-on, est attendu aussi par les Européens, qui, à travers une note envoyée à certaines Organisations, avaient tenu à dénoncer ce fait.
Moussa Baldé, refilez vie et envie aux paysans inquiets de la campagne arachidière
Le ministre de l’Agriculture fait face à une levée de boucliers des producteurs d’arachide. Ces derniers ont émis de nombreux doutes par rapport à la fixation du kilogramme à 250 Francs Cfa. Moussa Baldé devra, donc, rassurer son monde qui pense que cette somme est dérisoire. Il est aussi attendu sur la question de la taxe à l’exportation.
Le monopole de la CSS en danger ?
Ces derniers temps, il a beaucoup été question de la suppression de milliers d’emplois à la Compagnie sucrière sénégalaise. Le ministre du Commerce est censé rassurer ces travailleurs que leurs emplois seront préservés. Ce qui sous-entend une meilleure protection de la Compagnie sucrière sénégalaise qui a toujours bénéficié d’une situation de monopole pour pouvoir écouler son stock et assurer sa pérennité.
Quid des conditions qui ont permis à d’autres importateurs de pouvoir vendre leur sucre sur le marché sénégalais ? Ce contrat est-il pertinent, étant donné que la concurrence permet aux consommateurs d’avoir une large palette de choix à des prix plus compétitifs ? Aminata Assome Diatta à la lourde charge de répondre à ces questions et les réponses qu’elle donnera permettront de savoir quelle orientation l’Etat compte-il donner à sa politique commerciale.
Cette conférence de presse inédite est un changement d’approche de la part des autorités qui rendaient compte, jusque-là, à l’Assemblée nationale qui devait, à son tour, faire passer le message. Aujourd’hui, le Gouvernement veut apparemment sauter les étapes, en parlant directement à la population à travers la presse. Ce qui s’apparente à une sorte de campagne de communication gratuite. Mais attention ! Ce ne sera pas un simple jeu d’enfants. Car dans le navire Sénégal, ça fait mal et ça rouspète dans tous les compartiments ou presque.
Omar Ndiaye (Actusen.sn)
