Cet homme âgé de 27 ans vous domine déjà par sa taille et sa forte corpulence qui lui donnent les allures d’un athlète. Sans être un déménageur, il a plutôt la mine joviale, le sourire en permanence comme pour apprécier les bonheurs souvent étanches de ce monde. Jeux de lynx, casquette bien visée sur le chef, Djibril Camara, puisque c’est de lui qu’il s’agit, s’active avec sérieux dans son périmètre maraicher qu’il nous a fait visiter.
Ce jeune soninké a très tôt cru à l’entrepreneuriat en milieu rural. C’est en effet dans cet environnement champêtre qu’il a fait ses humanités. D’abord en décrochant son certificat d’entrée en sixième à Bakel à l’école élémentaire de Hamady Ounare. Quatre ans après, en 2008, il obtient son Bfem avant de réussir au Baccalauréat de la série G en 2011. Orienté à la Faculté des sciences et économiques et Gestion (FASEG de l’université de Cheikh Anta Diop, l’enfant du Fouta fait un parcours honorable.
De son intérêt pour l’entreprenariat agricole, il raconte : « Vous êtes 4000 étudiants dans l’amphi, tout le monde ne réussira pas dans les études. Il faut former des groupes et aller entreprendre » avait conseillé, leur professeur Danckoko, enseignant à l’UCAD. Ce message n’est pas tombé dans l’oreille d’un sourd. En effet, le jeune étudiant comprend la justesse des propos de son professeur et décide de quitter les amphithéâtres. Ceci coïncidera avec les évènements tragiques consécutifs à la mort de son camarade Bassirou Faye assassiné dans le campus. Il retourne dans son Fouta natal, précisément à Hamady Ounare. Durant ces périodes de doutes, le jeune Camara a connu des hauts et des bas. Surtout qu’il est rentré au Fouta avec zéro franc en poche, mais avec un brin d’espoir à l’idée de s’investir dans l’agriculture en se lançant avec de maigres moyens.
Son ascension devient fulgurante et celle-ci est ponctuée par un succès éclatant sur le terrain. Il développe différentes types de variétés avec la culture du riz et celle maraichère. Mieux, chaque année, 4 hectares de terre sont réservés à la culture du riz durant la saison hivernale. 3 hectares étant cultivés en hors saison avec la culture vivrière. Voyant grand, surtout avec la culture du riz, 3 hectares de terre d’oignon sont destinés à la commercialisation. Djibril Camara tient aussi son poulailler au sein du domicile familial où plus de 200 poussins sont élevés. Un produit réservé au marché local.
Face à son dévouement, il s’impose pour se tailler une place de choix dans la Centre de Gestion et de l’Economie rural Matam et Bakel où il occupe un poste stratégique.
Le courage et d’abnégation en bandoulière, le jeune entrepreneur, qui a résisté à plusieurs bourrasques, a réussi à faire son entrée dans le cercle fermé des jeunes entrepreneurs de la région de Matam.
Imbu des valeurs de son terroir tirées de son éducation, d’une déroutante simplicité, la modestie en bandoulière, le patron de Camara Agronome s’est aménagé un temps pour les loisirs et un autre pour le travail. Ceci, tout en étant rigoureux et ponctuel. Passer 5 minutes avec cet homme jovial, on y sort avec le gout de l’entrepreneuriat. Il participe également à la promotion de l’emploi des jeunes de sa zone.
Son ambition est de bâtir un empire agricole en étant du gratin des jeunes entrepreneurs de la région de Matam et au niveau international. A Hamady Ounaré son fief, l’homme continue de faire de la terre sa raison de vivre. Son nouveau challenge, la labellisation du riz local par une politique du consommer local.
Auteur : Djibrirou Mbaye, journaliste