Un jeune homme de 21 ans, répondant au nom de Youssou Faye, a comparu, hier, à la Chambre criminelle du tribunal de Dakar pour répondre du crime de meurtre. Au courant de l’année 2017, il avait tué à coups de ciseaux son oncle, Aliou Faye. Il risque, aujourd’hui, 20 ans de réclusion criminelle.
Deux choses, la colère et l’ivresse, privent l’homme de la raison et le rendent semblable aux bêtes. Youssou Faye ne dira pas le contraire. Il a été appelé, hier, à la barre de la Chambre criminelle du Tribunal de la grande instance de Dakar pour répondre des faits de meurtre. Youssou Faye a commis un homicide sur la personne d’Aliou Faye, le petit-frère de son père. Les faits ont eu lieu le 17 octobre 2017.
Tout est parti d’une dispute qui opposait l’accusé à son épouse. Il est rentré ivre et a commencé à violemment tabasser son épouse. Ses oncles, les frères de la victime, étaient présents au moment des faits, mais ils avaient décidé de ne pas s’en mêler. Car, d’après eux, il avait l’habitude d’agir de la sorte. Sa femme, voulant échapper à la violence que lui faisait subir son mari, était venue chercher refuge chez eux.
Naturellement, ils se sont interposés pour les partager. C’est ainsi que Youssou a commencé à les charger d’insultes et à jeter des pierres dans l’enceinte de la maison. Excédés par son comportement, ils ont réagi pour mettre fin à ses insultes et des pierres qu’il lançait. Ils se sont chamaillés et Youssou est sorti de la maison. Aliou, le défunt, de tempérament chaud, l’a poursuivi pour qu’il arrête. Ce qu’il n’aurait jamais dû faire de sa vie. Car 5 mn, plus tard, il est revenu avec des blessures.
Acheminé à l’hôpital, il a succombé à ses blessures. Le certificat médical révèle que sa mort fait suite aux coups qu’il avait reçus de son neveu. Devant le prétoire, les frères du défunt, venus se constituer partie civile, ont exprimé la douleur atroce qui les habite depuis la disparition de leur frère Aliou Faye.
Aboubacry Sadikh Faye, frère du défunt : «ce n’est pas la première fois qu’il menace de nous tuer. Nos voisins peuvent en témoigner. C’est une préméditation».
Cheikh Diène Faye, qui a pris la parole le premier, a été inconsolable. Il a pleuré de toutes ses larmes devant le juge. Présent au moment des faits, il a raconté, en sanglots, le déroulement des faits qui ont coûté la vie à son frère «Je suis le frère d’Aliou Faye. Le jour des faits, Youssou était en train de frapper sa femme, avec violence. Il était en état d’ébriété. Premièrement, on n’a pas voulu intervenir.
Mais quand les affaires ont commencé à empirer, on s’est interposés et il nous a tous insultés et lancé des pierres. Pour nous défendre, nous lui avons dit d’arrêter. C’est sur ces entrefaites qu’il est sorti de la maison et Aliou l’a suivi. Nous ne savons pas ce qui s’est passé en dehors de la maison, mais Aliou est revenu dans la maison avec des blessures, demandant de l’aide. C’est ce qui a provoqué sa mort», dit-il, le cœur gros.
À l’image de leur frère, Samba Faye et Aboubacry Sadikh Faye ont fait les mêmes témoignages, tout en insistant sur l’utilité qu’avait leur frère dans leur modeste vie. D’ailleurs, pour Aboubacry Faye, ce n’était guère la première fois que leur neveu se comportait ainsi. Il les a plusieurs fois menacés de mort. «Nos voisins peuvent en témoigner. C’est une préméditation».
L’accusé : «si ça ne tenait qu’à Aliou et moi, il n’y aurait aucun problème, car nous sommes amis»
Habillé d’un pullover blanc, Youssou est resté debout à côté de ses oncles. Il avait la tête baissée jusqu’au cou. Ses oreilles bourdonnaient de témoignages. Il était très gêné face à ses oncles. Tailleur de profession, Youssou Faye a aussi donné sa version des faits. Selon lui, ce sont ses oncles qui ont voulu attenter à sa vie. « J’ai frappé ma femme, parce qu’elle me jalousait. Mais, si ça ne tenait qu’à Aliou et moi, il n’y aurait aucun problème, car nous étions amis. Quand je frappais ma femme, personne n’est intervenu. Aliou m’a dit que je suis impoli et ils m’ont suivi, Dieylani et lui. Il tenait une barre de fer et Dieylani une pelle. Ils m’ont poursuivi jusqu’à ce que je sois fatigué. Ne pouvant plus courir, je me suis arrêté et j’ai ramassé un objet par terre avant de le lui asséner», narre-t-il, disant qu’il ignorait l’objet dont il s’agissait.
Le Parquet : «un ciseau ne se ramasse pas fortuitement dans la rue. Il est tailleur et on sait que son outil de travail c’est le ciseau»
Pour le procureur, Youssou disait tout sauf la vérité, car il avait, deux fois affirmé, devant la police et le juge d’instruction, qu’il l’a poignardé à l’aide d’une paire de ciseaux. «Un ciseau ne se ramasse pas, fortuitement, dans la rue. Il est tailleur et on sait que son outil de travail, c’est le ciseau. Il était armé d’un ciseau. C’est un drame familial. Il voulait porter atteinte à la vie d’un de ses oncles et c’est tombé sur Aliou Faye.
Avant de regretter, il faut faire un discours cohérent. Il lui a volontairement administré des coups de ciseau», a estimé le Parquet. Non sans demander au tribunal de le déclarer coupable des faits de meurtre. Car, pour lui, ni l’alcool, ni la jeunesse ne peuvent justifier son acte. Il a ainsi requis 20 ans de réclusion criminelle contre l’accusé.
Prenant la parole, l’avocat de la défense, Me Bamba Cissé, a jugé le réquisitoire du Parquet très sévère. Pour lui, condamner son client à une peine supérieure à ce qu’il devait subir semble relever d’une injustice. Il a alors demandé au juge une application extrêmement bienveillante de la loi pénale. Finalement, l’affaire a été mise en délibéré jusqu’au 25 janvier.
Adja Khoudia Thiam, (Stagiaire Actusen.sn)