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Presque pas de trace des  »sans domicile fixe », dans les programmes des candidats à la mairie de Dakar : les grands oubliés

Ils sont les grands oubliés de la campagne électorale. Seul un candidat à la Mairie de Dakar les a inclus dans son programme. Or, vous les croisez forcément presque tous les jours si vous habitez dans la capitale sébégalaise, sans les voir. Sans domicile fixe, sans-abri, grand exclus, gens de rien, vivre dans la rue, clochards, vagabonds, indigents, mendiants, nomades, marginaux, personne sans chez-soi etc… Les appellations ne manquent pas pour qualifier ceux qui n’ont pas de famille ou de toit  pour les accueillir. Ils trouvent refuge dans les sous-ponts ou dans les places publiques. Pour les rencontrer, votre quotidien SourceA,  a fait le déplacement.

Reportage !  

En cette période marquée par la campagne électorale pour les élections locales, le défilé des candidats est incessant dans les rues de la capitale. Pourtant, tous les jours, ils passent devant des concitoyens dont la situation les interpelle tous. 

En cette période marquée par la fraîcheur, l’atmosphère est glaciale; le froid s’intensifie, il dicte sa loi à Dakar. Au moment où tout le monde ou presque est dans sa maison, Ben Coulibaly, lui, se couche sur un banc qui a la forme d’un cercle. Il est 23h, ici à Fenêtre Mermoz, plus précisément, sous le tout nouveau pont situé sur la Vdn. Le lieu est calme et beau. Les lampes accrochées sur le pont illuminent  l’espace. A part  quelques personnes qui passent de moins en moins, ce sont seulement les bruits des voitures qui perturbent la tranquillité notée dans cette partie de la capitale dakaroise. Le sans abri qui porte un blouson bleu-rouge, un jean gris et des sandales se lève aisément dès notre arrivée. Ainsi après quelques échanges, ce monsieur d’une chevelure poivrée déclare: « Ça fait cinq mois que je suis ici. Je dors dans la rue. Ça commence à faire  un beau moment que je vis dans la rue. Je suis dans la rue mais au préalable je dormais, quelque part, sous un toit pendant un an et presque trois mois. Donc, presque 15 mois, je dormais sous un toit, même s’il n’était pas une habitation dans les normes. Parce que ce n’était pas dans de bonnes conditions mais c’était au moins un toit. »

Ben Coulibaly : « Je ne suis pas logé dans un habitat. Alors ça me gêne et ça me fait mal. Parce qu’il y a des situations qui m’ont amené là »

Ben Coulibaly fait partie des innombrables sans-abris qui squattent la rue ou des abris de fortune. Une situation qu’il vit très mal. Même s’il n’a pas le choix, semble-il, il lâche, résigné : « Des parents, il y en a beaucoup, idem aussi pour les amis mais je ne peux pas aller ailleurs parce que c’est toujours les mêmes déceptions.» Il indique : «Nous traversons une période où l’actualité de tout un chacun fait que moi j’ai peur de me fixer  sous un toit parental parce que je ressens que tout le monde est habité par un égo. C’est ça qui me fait peur. Parce que là où je suis, je traverse une période de ma vie, c’est comme si je me trouvais sur une lame de couteau. Alors la moindre glissade, je prends un coup, que Dieu nous en garde. Et pour que Dieu m’en garde, je fais attention. Je suis très attentif dans la vie. J’ai trop de sensibilité. » 

Ben Coulibaly d’affirmer : «Je suis dans la rue. Ce n’est pas aujourd’hui. Ça fait un bon bout de temps. Je suis dans la rue!» Pourquoi ? « Mais il y a un fait qui l’explique. S’il n’y en avait pas, je ne me retrouverais pas dans la rue. Je fais partie des sans domicile fixe. C’est relatif, c’est ça qui me ramène là. Mais est-ce qu’ au fond je suis un SDF ?  Se questionne-t-il : « oui, au moment où je vous parle, je suis un SDF. Je ne suis pas logé dans un habitat. Alors, ça me gêne et ça me fait mal. Parce qu’il y a des situations qui m’ont amené là. Lesquelles ? C’est de la méchanceté! Je suis de Dakar et j’étais locataire ici à Dakar durant des années. Et j’ai exercé ma profession. J’ai une profession. C’est laquelle ? 

Le sourire accompagnant un mouvement de sa tête. Nonobstant tout ce qui peut s’en suivre après cette interview.» «Ce n’est pas que j’esquive la question, non. Je prendrai du plaisir à y répondre mais du coup je me confonds dans vos questions et moi dans mes réponses. Parce que les questions que vous posez, je me retrouve du coup dans votre personnage et les réponses que je donne, je me retrouve, si vous voulez, dans une situation crypto-sociale», a précisé M. Coulibaly avant de déclarer dans la foulée : «Je travaillais pendant des années ». Où ? C’est ce que j’ai dit à l’instant sur une expression « nonobstant tout ce qui peut en découler  après cette interview. Je reste aussi observateur et je garde un oeil  par rapport à n’importe quelle conséquence  qu’il  peut y avoir   contre ma personne.»

 « On a basculé  ma vie. Tu ne peux pas comprendre comment je souffre. Vous voyez là où je suis vers 2H et 3h du matin avec la fraîcheur? C’est très difficile. Et il m’arrive  de passer une journée sans avoir une seule pièce de 100F pour acheter de la cacahuète. Alors que j’avais une vie décente, sobre !»

Ben Coulibaly ne pouvait pas résister à ces questions  qui l’obligent à ressasser les raisons qui l’ont amené à la rue. Ainsi il dira : «On a basculé ma vie. On a basculé ma vie. On a basculé ma vie. On a basculé ma vie, mon frère! ».  Et d’ajouter : «tu ne peux pas comprendre comment je souffre. Vous voyez là où je suis, vers 2H et 3h du matin avec la fraîcheur? C’est très difficile. Et il m’arrive  de passer une journée sans avoir une seule pièce de 100F pour acheter de la cacahuète. Alors que j’avais une vie décente, sobre !» Il commence à parler de son passé.  «Quelqu’un qui se débrouillait légalement aux yeux de tout le monde et de la société. J’entreprenais dans la société, avec mes occupations professionnelles, je gagnais de l’argent. Et du coup, cet aspect du développement personnel était productif. Je vendais un peu ma matière grise. Et c’est normal parce que si j’ai un cursus, il faut que je le mette à profit. Je gagnais légalement ma vie. Je suis très bien connu de certaines institutions nationales et internationales. Parce que j’ai presté avec certaines institutions qui m’ont donné une substance de vie par rapport à ça. C’était une vie stable par rapport à un jeune de ma promotion. C’était une vie sobre, j’avais mon petit appartement de trois chambres et un salon. Qui ne faisait pas moins de deux à deux cent cinquante cent mille francs cfa par mois. Et mes dépenses, je me retrouvais quatre cent voire cinq cent mille dans le mois. Mes initiatives ingénieuses me permettaient de couvrir mes soins. Il y a de cela plus d’une décennie! »

« Je suis très bien connu de certaines Institutions nationales et internationales. Parce que j’ai presté avec certaines institutions qui m’ont donné une substance de vie par rapport à ça. C’était une vie stable par rapport à un jeune de ma promotion. C’était une vie sobre, j’avais mon petit appartement de trois chambres et un salon. Qui ne faisait pas moins de deux à deux cent cinquante cent mille francs cfa par mois »

A la question de savoir qui a basculé ta vie ? Sans hésitation, avec beaucoup d’amertume, Ben Coulibaly crache: « Ce sont des gens!» Et je poursuis mes questions : Des parents ? Des Amis ? Des collègues ? Ou de simples connaissances Sa réponse est simple : «En tout cas, des gens. » Et de continuer: « Ce sont des gens. Peut-être à la lecture de votre interview, ils se reconnaîtront. Et s’ils sont habités de bonne foi et qu’ils croient en Dieu, qu’ils se repentent. Parce que ce n’est pas juste ce que je vis. Ils se sont dressés en muraille devant moi pour que je n’accède pas au bonheur!» Pourquoi ? « C’est trop loin à expliquer. C’est une histoire. Moi j’ai le plaisir de vous  poser ma première question dans cette interview », dit-il. Vas-y, lui dit-on. « Qui peut aller contre la volonté du bon Dieu ? »  Personne, avance l’interviewé, qui enchaîne: « Alors acceptons. Si ton prochain n’accepte pas que Dieu a dressé une étoile de bonheur et que l’autre vient et dit : écoute je ne suis pas d’accord. C’est le manque de croyance et le manque de croyance de mon prochain envers Dieu parce que si mon prochain avait foi en Dieu, il n’aurait pas joué avec mon ignorance. Il y a du tout : le mystique. Souvent je ressens des choses bizarres, je ressens des maux ; souvent, je me réveille en sanglots là dans la rue et ça m’arrive souvent au petit matin », argue-t-il. Avant de dire : « J’ai envie de quitter la rue. J’ai ma profession.  Je suis dans l’audiovisuel et je veux travailler. Je fais aussi du développement personnel et il y a tout dedans: communication, marketing etc. »

Avez-vous une femme ? « Je préfère esquiver cette question un peu pour le moment parce que c’est un peu fragile. J’ajoute que j’ai de la progéniture. Mais je préfère  arrêter là parce que c’est ma vie privée. ». Il se limite là mais pour un court instant ensuite  il dit : « C’est nous un peu  dans nous. Chacun se comporte en garde-fou. Maintenant malheur à celui qui est dans le fou. Malheur à la personne qui est dans le fou. Je pense que le mariage c’est le partage du bien et du pire. Ce n’est pas seulement du bonheur. Mais quand on se contente seulement du  bonheur, ce n’est plus du mariage. C’est un profit dont on a joui auprès de quelqu’un. On a subtilisé à quelqu’un  un intérêt quelconque ».

« Souvent je ressens des choses bizarres, je ressens des maux ; souvent, je me réveille en sanglots là dans la rue et ça m’arrive souvent au petit matin », argue-t-il. Avant de dire : « J’ai envie de quitter la rue. J’ai ma profession.  Je suis dans l’audiovisuel et je veux travailler. Je fais aussi du développement personnel et il y a tout dedans: communication, marketing etc. »

 « A la lecture de cet article, si elle existe, elle se rendra compte de sa foi. Je suis prêt à me confronter à tous les obstacles parce que je n’ai rien à me reprocher. Je n’ai pas commis d’ abandon. Je traverse une situation crypto-sociale. Je crois que je méritais plus d’attention. Mais malheureusement que d’autres personnes, qui étaient habitées par un excès d’ego, ont tourné le dos parce qu’il n y a plus rien encore dans la marmite à s’étouffer le ventre. Donc c’est peine perdue. D’autres disent qu’il n’y a plus de sens de raisonnement. Ces gens-là, à la lecture de cet article, ils se reconnaîtront  eux -même, leur conscience devant le miroir. J’accepte et je sais que je n’ai pas perdu quelque chose. La vie est un éternel recommencement. Peut-être que ce n‘est qu’une étape. Mais une étape très difficile, très salée et très douloureuse. » Une étape difficile. 

 «J’ai peur de parler de ma famille parce que je suis issu d’une grande famille africaine. Tous ceux qui sont mes parents sont des nobles. C’est pourquoi je me méfie. J’évite  de parler  trop de moi pour ne pas frustrer certains de mes parents parce que de loin ils m’observent. »

Vivre dans la rue n’est pas du tout facile. Loin de là! Pour Ben, tous les jours sont des épreuves. «  Je traverse des difficultés. Je suis exposé à toutes  genres de provocation, de risques dans la rue. Et je n’ai jamais fait de maladresse dans la rue. J’ai toujours une attitude normale. Toutes les portes me sont fermées. Je n’ai pas d’assistance sociale. Je n’attends rien de personne. Mais j’attends tout de Dieu.  Je ne vis que d’eau et je ne mange que de l’air. Je n’ai pas d’assistance. Il n y a que souvent des passants et d’autres qui me reconnaissent et du coup ils ont pitié et me font un petit geste 100f, 200f. Et pourtant, à l’en croire, il fait partie d’une famille noble.. Il précise plus loin: « Je ne suis pas un mendiant. Je suis de la descendance Coulibaly!  J’ai peur de parler de ma famille parce que je suis issu d’une grande famille africaine. Tous ceux qui sont mes parents sont des nobles. C’est pourquoi je me méfie. J’évite  de parler  trop de moi pour ne pas frustrer certains de mes parents parce que de loin ils m’observent. » « Certains me regardent comme un sujet dans la rue. Si tu pouvais savoir de quelle famille je viens, qui sont mes parents ici dans ce pays, je vous le jure qu’ils feront attention. Je fais partie de la noblesse sénégalaise, la classe noble. Je n’accuse pas tous mes parents. Parce que je ne fais pas le tour de tous ceux que j’ai comme parents mais ceux que  j’ai connus au préalable ce sont eux qui m’ont déçu. Donc du coup je reste très observateur, très attentif. »

« On m’a extraverti dans la rue comme ça au prix de quel texte par rapport à quoi »

Plus on discute, plus il ouvre son coeur. Comme s’il avait besoin de sortir ce qu’il a dans sa poitrine. Coulibaly va même jusqu’à nous donner plus de détails sur ses origines. « Mes parents biologiques sont vivants. Ils reconnaissent que je fais partie des leurs. Ils savent que je suis dans des difficultés mais ils peuvent venir vers moi échanger un peu avec moi pour voir mon équilibre mental. Parce qu’une personne c’est le raisonnement. Si elle raisonne, il n y a pas problème. C’est un bon départ. Le reste c’est une réinsertion sociale . » Ben Coulibaly en a marre de sa situation et lance un cri de cœur : « J’ai envie de quitter la rue! Regardez là où je suis avec mes déguisements. On m’a extraverti dans la rue comme ça au prix de quel texte par rapport à quoi? Mais non ! J’ai des troubles. Je souffre! » 

 « Regardez mes pieds tout fissurés. Je marche des kilomètres et des kilomètres. Combien de fois j’ai marché de Mbour à Dakar à pied? Parce que je n’ai pas  le prix du transport,  de deux les véhicules ne veulent pas me prendre. Même le transport en commun ne veut pas me prendre. Même si j’ai de l’argent, il ne veut pas me prendre et orgueilleux comme je suis, je leur dirai, j’ai ma mobilité Dieu merci, et je marche.  Il faut que les gens comprennent que Dieu est l’Omniprésent, l’Omnipotent. » Il attaque les chefs d’Etat africains: « Nos Etats en Afrique sont tellement obnubilés par l’économie qu’ils oublient la réinsertion sociale. Les dictateurs dans les années 90 avaient une politique sociale plus équilibrée que ces gouvernants du XXI siècle. » 

 Par rapport à la question de son âge, il dit :  » Je suis jeune par rapport à mon âge et par rapport à mon âge, j’ai l’âge de tous les jeunes de ma promotion. Je suis jeune par rapport à mon âge!  Maintenant  je laisse à vos lecteurs de voir si quelqu’un qui n’a pas de raison, peut parler ou raisonner ainsi, » a-t-il conclu.  A l’instar de Ben, il y a d’autres personnes qui vivent dans des situations de précarité, de fragilité extrême. C’est le cas de Pape Gueye.

 Nous sommes le mercredi 5 janvier à Sud foire. Il est 12h, le thermomètre affiche  30°. Les artères de la capitale  grouillent d’une foule cosmopolite. C’est le branle-bas de combat des travailleurs. A quelques mètres du rond-point Pentola situé entre les deux voies du camp pénal, un homme d’une trentaine d’années, s’étale sur un banc public. Il s’agit de Pape Gueye âgé de 36 ans. Trouvé en plein sommeil, sur l’un des bancs  le long de la route. L’homme de teint noir, vêtu d’un capuchon bleu, d’un pantalon noir, assorti des chaussettes blanches crasseuses, casque marron à la tête, chaussures Sneakers blanches sous le banc où il dort, mains croisées sur la poitrine; un sac au-dos noir lui sert de coussin. Pape est en profond sommeil en ce milieu de journée, au moment où les gens vaquent à leurs préoccupations. Ni les bruits des voitures qui passent, ni leurs  klaxons ne peuvent le réveiller. Il a l’air fatigué. Il finit par se lever à cause de notre arrivée.  Il nous regarde avec ses yeux  rougeâtres. Un visage hagard et désespéré nous  fait face. « Excusez-nous  frère d’avoir interrompu votre sommeil », lui dit-on. « Ce n’est pas grave. », répond-il en baissant la tête. On lui tend une baguette de pain avec du niébé à l’intérieur. Il la prend en se confondant en prières. Pourtant, Pape n’a pas une vie adéquate. Ainsi il a accepté de raconter sa vie. 

Pape Guèye : « La société ! Elle me reproche de faire ce travail dans la journée»

« J’habite à Diamaguène », renseigne Pape Guèye. Le natif de la banlieue dakaroise poursuit : « Je vis avec ma mère. Chez moi, j’ai une chambre et un lit », renchérit-il. En répondant à notre question : pourquoi tu dors donc ici alors que tu n’es pas un sdf ? Il répond : « Regarde ce sac à côté », dit-il. On regarde le sac dont il nous énumère le contenu. « Ce sac est rempli de récipients vides de boisson, de canettes. Je ramasse ces objets pendant la nuit. Si j’ai trois à quatre sacs, je vais les vendre à Thiaroye à trois cent francs par kilogramme », fait-il savoir. Et   Pape de répondre à notre question : pourquoi tu choisis la nuit pour ramasser ces objets ? La réponse est simple : « La société ! Elle me reproche de faire ce travail dans la journée. C’ est pourquoi, dit-il , je préfère attendre la nuit le moment où les gens sont en train de dormir pour que je puisse faire convenablement mon job.» Par moment, il se frotte les yeux avant d’expliquer : «à la levée du soleil, je serai déjà fatigué, c’est pourquoi je me couche ici pour me reposer ». Au cours de notre échange, Pape a déclaré que certes il n’a pas de métier mais néanmoins il a frappé à plusieurs  portes d’entreprises  mais en vain. « Ce travail n’est pas rentable mais je ne peux pas  croiser les bras. Je suis allé vers les entreprises pour trouver un travail journalier mais les portent ne s’ouvrent pas pour moi. Ce pays est difficile », se résigne notre interlocuteur.

Abdou Karim Ba : « Je ne connais pas ma mère. Elle est décédée en 1976. Alors que je venais d’avoir 1 an »

Pape n’est pas un cas isolé. Il y en a d’autres comme lui. Toujours sur cette même artère, nous avons rencontré un autre individu. L’homme est élancé. Sa taille est d’environ 1M 90. Ses vêtements sont malpropres. Un bonnet à la tête couvre ses rastas. Ses chaussures noires sont en état de dégradation. A côté de lui, l’on voit un sac rempli d’ objets en fer. Un petit sac au dos, à côté, porte ses quelques habits. Trouvé assis sur un banc public situé sur les deux voies, il est en train de refaire sa couverture.  Abdou Karim Ba  livre son histoire. «Je ne connais pas ma mère. Elle est décédée en 1976. Alors que je venais d’avoir 1 an. C’est en 1990 que je savais que celle que j’appelais maman ne l’est pas. J’ai été élevé par ma grande sœur », renseigne, Abdou Karim, âgé de 46 ans. Avant d’ajouter : « J’ai été chez elle à Dieuppeul. Mais j’ai quitté la maison parce que son mari m’a mis dehors. »

« J’ai passè 22 ans dans la rue. Ma vie de Sdf a démarré par un ballon de foot de 600 F Cfa. Mon neveu m’a accusé de l’avoir troué et on m’a jeté dehors »

 Selon Abdou, tout est parti d’une histoire d’un ballon de foot de 600f. « Mon neveu m’accusait d’avoir troué son ballon alors qu’on jouait ensemble au football.  C’était juste un prétexte pour me mettre dehors. Parce que, dit-il, un problème avec deux enfants seulement ne valait pas tout ça. C’est le mari de ma sœur aînée qui m’a mis dehors. « Dans le même sillage, il ajoute : «Après, je suis parti chez mon père. Je lui demandais de payer mes études pour que je puisse continuer l’école. Mais il disait qu’il ne peut pas,  parce qu’il doit s’occuper de ses fils qui sont plus jeunes ».  Pape de poursuivre :  « après le décès de ma mère, mon père avait épousé une troisième femme. On s’est querellé et il m’a mis dehors. Je suis allé à Colobane  chez un ami. J’ai fait là-bas 10 ans. Sa mère me prenait comme son propre fils. Mais la famille  a déménagé par la suite aux Parcelles assainies. J’ai décidé d’aller à Touba étant ainsi comme Baye Fall à côté d’un marabout. J’ai aussi fait Thiès  et la Gambie ».

Après une longue aventure, Abdou a décidé de revenir à Dakar. « Mais c’est en 2000 que je suis revenu à Dakar. Depuis lors, je suis dans la rue. J’ai passé 22 ans dans la rue. Je ramasse les ferrailles ensuite les vends à l’ancienne piste. Je pouvais être voleur ou agresseur mais je préfère vivre de la sueur de mon front. Je passe la nuit à la belle étoile ici même ou  à Sacré-cœur dans un endroit plus discret. Parce qu’il y a trop de risques dans la rue. J’ai appris que des gens ont amputé la jambe d’un gars qui dormait sous un pont. On est vraiment exposé à tous les risques. Certains me prennent pour  un clochard alors que je ne le suis pas. C’est difficile mais c’est mon destin et j’accepte », a-t-il conclu. 

Amar DIAGNE 

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