Le représentant du ministère public a requis une peine de 10 ans de réclusion criminelle contre Abdou Aziz Thiam. Ce commerçant âgé à peine de 30 ans est accusé de trafic intérieur de drogue. Après 4 ans de détention provisoire, il a finalement été jugé devant la barre de la chambre Criminelle du tribunal de Grande Instance de Dakar.
L’interpellation de l’accusé fait suite à une dénonciation anonyme faisant état d’un transport d’une grosse quantité de chanvre sur l’axe Ziguinchor-Dakar, à bord d’un bus. Les agents de l’Ocrtis ont eu également l’information que le produit prohibé devait être livré à grand Médine. Pour avoir plus de détails sur ce trafic, les flics mettent en place une planque à cet endroit.
À l’arrivée du bus, le chauffeur a été arrêté et auditionné. Celui-ci renseigne qu’un certain Landing a envoyé ce colis depuis Ziguinchor. Ainsi, il a cité le nom de Abdou Aziz Thiam comme celui qui allait réceptionner la marchandise. Ainsi, ce dernier a été contacté et comme prévu il se présente au rendez-vous pour récupérer le sac sans se douter que les policiers étaient sur place. À peine qu’il ait pris le sac entre ses mains, que les policiers se sont jetés sur lui et son ami Pape Gora Dièye qui l’accompagnait.
Ce dernier révélait que la drogue se trouvait dans le sac et bien dissimulée par des oranges. Néanmoins il renseignait qu’il ignorait ce que venait récupérer son ami. Même si lui a été exempté de poursuites, ce ne fut pas le cas pour Abdou Aziz Thiam qui a été placé sous mandat de dépôt pour trafic intérieur de drogue.
Face aux juges de la Chambre Criminelle, il a nié les faits. A l’en croire, le chanvre indien ne se retrouvait pas dans le sac d’oranges qu’il était venu récupérer. «C’est en cours de route alors que je me rendais au boulot que le chauffeur du bus m’a demandé de venir récupérer le sac d’oranges qu’avait envoyé mon oncle. J’ai ainsi décidé de faire un détour pour réceptionner le colis qui a duré 48h là-bas, avant de rejoindre mon travail. Dès que j’ai pris le sac, les policiers ont sauté sur moi et m’ont malmené. Une chose est sûre, après fouille, ils n’ont rien retrouvé dans le sac. Par contre je ne sais quel deal ils ont eu avec le chauffeur mais je les ai vus prendre la drogue dans un autre sac qui n’était pas celui que j’étais venu récupérer», s’est-il défendu.
Très remonté contre les policiers qui, dit-il, ont une dent contre lui, l’accusé renseigne qu’il a été bien molesté à l’enquête. Tout en maintenant ses accusations, il renchérit : «les policiers ont réclamé à mon épouse qui était enceinte et presque à terme la somme de 2.000.000 de francs CFA pour que je recouvre la liberté. Celle-ci a réuni l’argent de toutes ses tontines et a vendu ses bijoux pour que je sois libéré. Ce n’est que plus tard qu’elle a réalisé qu’elle a été dupée par ces agents», lance-t-il avec amertume.
Mais, ses propos n’ont pas convaincu le maître des poursuites qui renseigne de son côté que son épouse a voulu corrompre les flics en voulant leur remettre cette somme d’argent. Estimant que les faits sont suffisamment établis pour l’accusé, le magistrat du parquet a requis 10 ans de réclusion criminelle contre Abdou Aziz Thiam qui n’a cessé de clamer son innocence.
Les avocats de la défense ont, eux, relevé qu’un doute persistant plane sur cette affaire. «On ne peut pas lui imputer le sac contenant la prétendue drogue. Avant d’arrêter mon client, le sac était entre les mains des policiers», souligne Me Abdoulaye Tall qui ne rejette pas l’hypothèse que son client puisse être piégé.
«Aucun élément dans le dossier ne prouve que mon client est un trafiquant de drogue. Ce colis n’a pas de propriétaire. Dans cette affaire il n’y a pas de trafic intérieur de drogue. L’association de malfaiteurs n’est pas établie. Il y a un non-lieu pour les autres personnes. Après interception de cette drogue, quel est l’acte que mon client a posé allant dans le sens d’un trafic de drogue ? Combien de colis étaient dans le bus ? Combien de sac on a pu sortir de ce bus avant qu’on ne donne à Abdou Aziz Thiam le sac d’oranges ?», tant d’interrogations que s’est posé Me Tall qui sollicite l’acquittement ne serait-ce qu’au bénéfice du doute de Abdou Aziz Thiam.
Pour sa part, Me Iba Mar Diop n’a guère apprécié certains points sur lesquels son client a délibérément menti. Notamment sur le fait qu’il soit torturé à l’enquête. Il a, comme son confrère Me Tall, sollicité l’acquittement au bénéfice du doute.
Abdou Aziz Thiam sera édifié sur son sort le 7 juin prochain.
Adja K. THIAM (Actusen.sn)