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10 ans de prison ferme requis contre Edouard Bissau : son accusatrice de viol et de pédophilie en fugue depuis mars

Le sort de Édouard Bissau est désormais entre les mains du juge de la chambre criminelle du tribunal de grande instance de Dakar. C’est hier que ce dernier l’a appelé à la barre de cette juridiction pour élucider l’affaire de viol et de pédophilie par violence ou contrainte pour laquelle le susnommé croupit depuis plus de deux (2) ans dans la citadelle du silence.

«Toutes mes filles sont irrépréhensibles, sans problèmes. Y. M. Traoré est la seule à avoir ce comportement indigne d’une fille. J’ai tout fait pour la redresser. Je l’ai frappée, je l’ai puni mais en vain». Ces paroles d’une mère désespérée proviennent de la dame A. Sylla. Devant la barre de la chambre criminelle de Dakar où elle comparaissait, hier, en tant que partie civile, A. Sylla n’a pas caché l’amertume que lui cause sa fille cadette, victime présumée dans cette cause. Ce qui l’a poussé d’ailleurs à implorer la clémence du tribunal en faveur de l’accusé qu’elle avait elle-même traduit en justice.

En effet, c’est deux mois après la criminalisation du viol en 2020, que Édouard Bissau qui était alors âgé de 27 a été placé sous mandat de dépôt pour ce crime, également pour d’autres chefs tels que la pédophilie et le détournement de mineure. Des faits qu’il a toujours contestés d’ailleurs. Le jeune homme qui venait à peine de trouver un travail bien rémunéré dans une structure de la place s’est retrouvé dans le pétrin à cause de la mineure Y. M Traoré. Il ressort de la procédure que la dame Aïssatou Sylla avait remarqué à son réveil l’absence de fille.

Au bout de 48h, elle décide d’aller trouver des informations dans son établissement. Là-bas, elle apprend que sa fille était chez le nommé Édouard où elle a passé les deux nuits. C’est ainsi que Aïssatou Sylla désemparée, dépose une plainte à la Section de Recherches. Après 15 jours, les flics parviennent à avoir le numéro de Édouard qui a été dare-dare convoqué. Si dans le pv d’enquête il est consigné que ce dernier a reconnu avoir entretenu à deux reprises des relations sexuelles avec la mineure qu’il a hébergé, le mis en cause a refusé de signer le document clamant son innocence. Il a persisté dans ses dénégations jusque devant le magistrat instructeur.

Appelé hier à la barre de la chambre criminelle du tribunal de grande instance de Dakar, Édouard Bissau a campé sur sa position. Estimant être détenu à tort, il reconnaît connaître la mineure qui était la petite amie d’un de ses colocataires, Moubarak. A l’en croire, il n’a jamais reçu la fille chez lui. «Je la connais à peine. J’ai fait sa connaissance par le biais d’un ami Moubarak. Ce dernier était mon colocataire. Souvent quand il voulait contacter la fille, il utilisait mon téléphone car j’avais constamment des unités. Un jour Y. M Traoré qui avait mémorisé mon numéro m’a appelé tard dans la soirée. C’était aux environs de 23h. Quand j’ai décroché, elle a insisté pour que je vienne pour qu’on se voit. Je me suis levé et habillé en tenue correcte. Je suis descendu de chez moi car on s’était donné rendez-vous au rez-de-chaussée. A peine sorti, je l’ai aperçu avec un jeune homme vêtu de noir. Elle m’a dit qu’elle était partie à une soirée et qu’elle a vu que la porte de sa maison était fermée. Je suis allé là-bas pour vérifier et effectivement elle avait raison. Elle m’a demandé de la conduire chez son grand frère mais j’ai refusé car je devais me rendre au boulot très tôt. Depuis lors je ne l’ai plus vu», a narré Édouard.

Poursuivant son propos, il renseigne : «deux semaines plus tard, quand je me suis rendu aux impôts et domaines de la foire, j’ai reçu un appel d’un agent de de la Section de Recherches qui m’a intimé l’ordre de venir les rejoindre. A 15 heures je me suis rendu à la section de recherches. C’était une journée morte pour moi car j’avais laissé mon travail de côté. Je suis resté là-bas jusqu’à 18h. J’ai retrouvé Y. M. Traoré et sa mère là-bas. Ces dernières ont été auditionnées et moi non. Après on m’a dit de partir pour revenir le lendemain très tôt. Quand le commandant m’a demandé si je reconnais la fille je lui ai dit oui. Quand il m’a demandé si la famille avait passé la nuit chez moi j’ai dit non».

Entendue à son tour, Aïssatou Sylla, mère de Y. M. Traoré révèle que sa fille a encore fugué depuis le mois de mars 2022. Ce qui explique son absence d’hier lors du procès de son présumé bourreau. Dans le désarroi, elle reconnaît que sa fille cadette est devenue plus ingérable depuis cette affaire car elle ne cesse de découcher. Admettant que la moralité de sa fille n’est pas des meilleures, elle a imploré la clémence du tribunal pour le comparant avant de dire qu’elle ne réclame pas de dédommagement.

Mais le maître des poursuites n’est pas de son avis. Selon le magistrat du parquet, cette affaire est entre le ministère public et Édouard Bissau. «Ses fugues et sa moralité ne nous intéressent pas», a souligné le substitut du procureur de la République qui a requis 10 ans de réclusion criminelle contre l’accusé. D’après lui, tous les faits sont constants. Ce, même si un certificat médical pouvant attester du viol n’a pas été versé dans le dossier.

Réquisitoire qui n’a pas conforté les avocats de la défense qui ont à l’unanimité sollicité l’acquittement de Édouard Bissau. «Même avec l’absence d’un certificat médical, le parquet reste convaincu que le crime est établi. Aucune plainte contre Édouard n’a été déposée. C’est suite à des recherches tumultueuses de 15 jours que mon client a été arrêté. Tout ce que la fille a déclaré à l’enquête n’est pas vrai. Elle a menti. Le tribunal a son intime conviction mais cette conviction doit être basée sur des éléments objectifs. Rien ne prouve qu’il y a eu rapport sexuel. On ne peut pas condamner quelqu’un à 10 ans sans preuves. Ici c’est déclarations contre déclarations. Au moins, mon client a refusé de signer le PV parce qu’on lui a prêté des propos qu’il n’a pas tenu», a plaidé Me El Hadji Dieye, un des avocats du comparant.

Sensible à la détresse de la mère de la mineure, son collègue Me Diop déclare : «Ce qui arrive à la mère de la mineure peut arriver à tout le monde. Je comprends son désarroi. Elle qui a tout fait pour inculquer à sa fille une bonne éducation. Malheureusement, celle-ci a choisi une autre voie. Si j’ai une chose à dire à la dame, c’est d’aller chercher sa fille».  Par ailleurs, la robe noire souligne des incohérences dans le dossier.

«Comment peut-on juger un viol avec simplement des déclarations ? Elle dit juste qu’elle a été forcée par l’accusé. Il a fait deux ans et six mois de détention préventive alors qu’il est présumé innocent. Il était utile au moment de son arrestation», a renchéri l’avocat.

L’affaire mise en délibéré, la Chambre Criminelle rendra sa décision le 19 juillet prochain.

Adja Khoudia THIAM (Actusen.sn)

 

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