La presse sénégalaise n’a jamais été aussi injustement décriée. Un comportement qui est souvent le fait de l’opposition qui est allée un peu plus dans une logique de confrontation avec les journalistes, en les traitant de tous les noms d’oiseaux. Hier encore, c’est Ousmane Sonko qui est remonté sur le ring pour trainer dans la boue des membres de cette noble Corporation. Mais diantre ! Qu’est-ce qu’il peut reprocher aux hommes de médias. Ces derniers n’ont pourtant jamais violé un couvre-feu, au milieu de la nuit, pour aller se faire masser par une belle gamine de 20 ans. Mais avec le chef des ‘’patriotes’’, les professionnels des médias sont devenus les cibles privilégiées des adversaires du régime qui n’hésitent plus à les prendre à partie.
Sonko pense injustement que les journalistes qui lui opposent la contradiction sont des vendus, mais ces derniers n’ont jamais violé un couvre-feu pour aller se faire masser par une belle gamine de 20 ans à Sweet Beauté
L’image avait choqué plus d’un. En pleine campagne pour les élections législatives, Ousmane Sonko avait décidé de ne pas parler au micro de la Rts. Le reproche fait à la chaîne nationale est son présumé parti pris. Un comportement qui renseigne sur les rapports devenus de plus en plus heurtés entre les acteurs des médias et l’opposition. Déjà, des confrères de GFM avaient échappé au pire, lors des émeutes de mars 2021. Les journalistes de RFM n’avaient dû leur salut qu’au fait de s’être enfermés dans leurs bureaux. Ceux de TFM ont eu droit au même traitement de faveur. Ils l’avaient aussi échappé belle. Un fait qui montre qu’exercer le métier de journaliste, en toute liberté, en respectant sa ligne éditoriale, est devenu risqué si la manière de traiter l’information n’est pas du goût de l’opposition, notamment Yewwi Askan Wi. Un sentiment d’insécurité qui n’a fait que grandir, depuis l’éclatement de l’affaire Ousmane Sonko/ Adji Sarr.
La propension chez le leader de Pastef à s’attaquer aux hommes de médias semble participer d’une vaine tentative de les obliger à enterrer l’affaire Adji Sarr
Tout est parti de l’affaire Sweet beauté. Ce dossier de viol présumé a créé une sorte d’animosité entre une partie de la presse et Ousmane Sonko. Les membres de plusieurs rédactions ont été menacés, notamment ceux du quotidien Les Echos qui avaient ébruité le dossier. Leur seul crime a été d’avoir osé parler de la plainte qui a été déposée contre le leader de Pastef. Pourtant, Cheikh Oumar Ndao et son équipe avaient fait ce que la plupart des autres journalistes n’auraient jamais fait, à savoir essayer de donner la parole à Ousmane Sonko pour qu’il livre sa part de vérité. En effet, quand une plainte est déjà déposée sur la table de la Police, de la Gendarmerie ou du Parquet, nul n’a l’obligation de recueillir l’avis de la personne incriminée. Si, évidemment, le journaliste qui fait le compte-rendu s’en limite au factuel, c’est-à-dire la plainte.
Source A en a aussi pris pour son grade après avoir fait un papier sur les services proposés par Sweet Beauté qui est devenu tristement célèbre de même que sa promotrice. Les événements de mars ont été mis à profit par ces détracteurs des médias pour solder leurs comptes avec les journalistes. Mais l’agression ne s’est pas arrêtée en si mauvais chemin. Ce sont les fondements du métier qui sont aujourd’hui menacés.
Chercher à faire des journalistes qui le contredisent des corrompus, c’est comme considérer que tous les acteurs politiques sont allés faire un petit tour à Sweet Beauté et y ont été massés par Adji Sarr, ce qui ne serait pas juste
L’autre agression a été le détournement des Unes qui a valu à certains activistes leur arrestation. Ousmane Sonko, encore lui, s’est aussi permis d’annoncer une liste de patrons de presse corrompus. Mais le propre de ce Sonko-là, c’est qu’il ne cite jamais de nom. Or, s’il était juste et objectif, il se serait gardé de mettre tous les journalistes dans le même sac, notamment les hommes de médias qui n’ont jamais serré la main au président Macky Sall, à la Première Dame, entre autres. Quand l’envie d’insulter les journalistes l’en démange, il fait maladivement recours à la généralisation. Or, c’est là que le bât blesse. Car chercher à faire des journalistes des corrompus, c’est comme considérer que tous les acteurs politiques sont allés faire un petit tour à Sweet Beauté et y ont été massés par Adji Sarr. Ce qui ne serait pas juste. D’autant que tous les politiciens n’ont pas eu la chance ou la malchance de s’être enfermés dans une salle de massage avec la croquante Adji Sarr. Donc, il est temps que Ousmane Sonko arrête d’insulter les journalistes. Malheureusement, c’est trop lui demander. En effet, c’est dans cette même dynamique qu’il a décidé de soutenir Barthélémy Dias dont il juge le comportement envers GFM justifié. Ce, après que lui-même a décidé de ne plus répondre aux questions des journalistes à qui il impose le format des points de presse. Une attitude qui traduit surtout une peur des questions qui dérangent. En effet, l’ombre de l’affaire du viol présumé plane toujours lors de ces face-à-face avec les journalistes qui sont tentés d’aborder le leader des Patriotes sur son fameux massage par Adji Sarr.
Malheureusement, à force de chercher à intimider son monde, l’ancien inspecteur des Impôts et des Domaines a réussi à faire peur à la presse. Beaucoup de reporters ne s’aventureraient pas à lui poser les questions qui fâchent, même s’il leur en offrait l’occasion.
Sonko pense maladivement que ne sont crédibles que les médias dont les lignes éditoriales lui permettent de ne pas être contredit
Les rapports entre Ousmane Sonko et la presse n’ont pas été toujours aussi heurtés. Au contraire, le chef de file des Patriotes doit en partie son ascension politique spectaculaire à ceux qu’il qualifie aujourd’hui de racaille. Il n’est pas le seul. Mais il a décidé, dirait-on, de ne considérer qu’une seule partie des médias comme crédible. Ce sont ceux dont les lignes éditoriales lui permettent de ne pas être contredit. Les autres sont qualifiés de vendus. A l’image du maire de Ziguinchor, Barthélémy Dias s’est aussi prêté à ce jeu. Certes, beaucoup ont pensé que la réaction de Babacar Fall a été surdimensionnée, mais erreur ! Car c’était juste à la hauteur de l’affront. Seulement, le manque de soutien d’une partie de ses confrères montre que l’opposition a réussi une partie de son pari. Celui de diviser les acteurs des médias en deux blocs : ceux qui sont avec elle et ceux qu’ils considèrent contre elle puisqu’ils refusent de nourrir un quelconque complexe vis-à-vis de lui.
Bref, la presse sénégalaise n’a jamais été aussi en danger que sous l’ère Sonko. Non seulement sa liberté est menacée mais aussi l’intégrité physique des journalistes l’est aussi. Un état de fait qui a contribué à accentuer la peur au sein de certains hommes de médias. N’empêche, cela ne saurait contraindre les acteurs des médias à ne pas parler du viol présumé et d’Adji Sarr. N’en déplaise à Sonko et la hantise du massage.
Actusen.sn