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Degré Zéro de la politique (Par Moussa Diaw, Politologue)

La politique est un engagement dans la gouvernance de la société pour améliorer le bien-être des citoyens par le respect des règles de jeu et de l’intérêt général, conformément à la nature du régime politique établi. Selon cette conception, les acteurs, dans le cadre de leur formation, proposent des programmes, choisis librement par les citoyens aux  termes d’élections inclusives et transparentes.
Cela correspond aux exigences des valeurs et principes des régimes démocratiques. Mais la mise en œuvre peut se révéler problématique au regard des pratiques politiques et les conceptions du pouvoir qui varient en fonction de l’histoire des sociétés, de leurs références socioculturelles et de la trajectoire des acteurs impliqués dans la «  gouvernementalité » pour reprendre ici un concept cher à Michel Foucault.
 Le paysage politique est marqué par une façon de faire de la politique qui rompt complètement avec le sens initial exigeant de se mettre au service de ses concitoyens de manière volontariste ou désintéressée. En pratique, les opposants sont traqués, emprisonnés sans procès, certains par le truchement de la justice, sont éliminés d’une compétition électorale majeure. De plus,  le silence entoure les personnalités protégées,  et pourtant citées dans les rapports des organes de contrôle de l’Etat pour leur mal gouvernance.
A quelques semaines de l’élection présidentielle, prévue le 25 février 2024, on assiste à des manœuvres, des négociations et des combines politiques visant à conserver le pouvoir en foulant aux pieds le processus électoral qui a franchi une étape devant conduire à une campagne électorale inéluctable pour départager les 20 candidats, retenus par le Conseil constitutionnel. Il est vrai que les opérations de filtre par le parrainage posent un débat sur son déroulement, sa transparence et ses manquements multiples qui ont suscité des recours, peu concluants dans leur ensemble. Des candidats, recalés ou « spoliés » par ce procédé ou des dossiers judiciaires, se retrouvent dans un collectif afin de contester cette sélectivité quel en qu’en soit le motif. En aucun cas, ces aléas ne peuvent constituer un alibi pour repousser les élections, ou entrer dans des subterfuges permettant de gagner du temps, voire  entraver le processus électoral.
Dans cette optique, une partie du groupe des « recalés » jouent les éclaireurs par leur proximité avec la majorité, et des volontaires non recalés mais partageant la même logique consistant à vouloir se retrouver en cas de victoire pour partager les gains et les privilèges.  Ces pratiques politiques, fondées sur la redistribution des ressources et postes à des acteurs politiques dont le comportement traduit la recherche d’intérêts personnels, sont dépassées et inadaptées à l’évolution politique du pays.
L’irruption de jeunes élites, porteuses de projet  politico-social pour les transformations substantielles de la société,  en perspective de l’exploitation des ressources naturelles (pétrole et gaz), constitue une innovation dans le jeu politique et bouscule considérablement ceux qui sont habitués à la gestion patrimoniale des biens publics. Cette peur de déclassement des anciens leaders peut expliquer leur raidissement vis-à-vis d’un changement à venir. De toute façon, la mutation générationnelle interviendra car les sociétés évoluent en fonction des contradictions internes inévitables et caractéristiques des dynamiques provoquées par le jeu des nouveaux acteurs. La société politique a intérêt à se conformer à cette logique  même si elle a, par l’expérience, la possibilité de retarder l’échéance.
Le nécessaire respect du calendrier électoral
Le président, qui n’est  pas candidat à sa propre succession, devrait adopter une posture d’arbitre que celle de dirigeant autoritaire à l’encontre de ses opposants qu’il accuse de vouloir installer le chaos. Il n’en est rien, personne n’a intérêt à ce que le Sénégal s’enlise dans la turbulence et la crise postélectorale.
Il revient aux autorités de garantir les conditions pour une élection libre et transparente sans porter un jugement de valeur sur la personne que les Sénégalais  porteront au sommet de l’Etat dans un espace politique ouvert de façon équitable à tous les candidats. L’angoisse de perdre le pouvoir et ses avantages ne peut justifier la fabrication de stratégie pour compromettre la volonté des Sénégalais de tourner une page politique quelle que soit la polarité de son bilan. Il appartient aux citoyens d’exprimer, par les urnes,  le désir de se tourner vers un avenir moins marqué par les rudes épreuves de la vie quotidienne. C’est une aspiration légitime à conforter au regard de multiples manquements observés dans la gouvernance économique et politique.
En effet, la politique n’est pas un lieu pour un enrichissement personnel et clanique des hommes qui se livrent à des spectacles publics de redistribution des ressources de l’Etat pour entretenir une clientèle politique. Ces images sont à bannir, de façon à contribuer à une meilleure moralisation de la vie politique. Compte tenu de tous ces enjeux, et surtout de préserver la stabilité du pays, l’on est convié à organiser, dans les délais prescrits par les institutions, l’élection présidentielle dans le calme et la confiance.
Par Moussa Diaw, Politologue.

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