La loi portant assistance aux personnes détenues & transfèrement des personnes condamnées entre le Sénégal et le Maroc sera soumise à l’appréciation des députés ce mardi. Elle sera défendue par le Ministre de l’Intégration africaine et des Sénégalais de l’extérieur, Yassine Fall. Pour la circonstance, le Bureau d’information gouvernementale y a consacré un dossier. Qui revient sur les circonstances jamais révélées de la proposition d’un tel projet par le gouvernement sénégalais.
Les drames de la migration continuent ne sont pas étrangers à la décision du nouveau gouvernement d’adopter le projet de loi N°03/2025 autorisant le Président de la République à ratifier la convention entre le Sénégal et le royaume du Maroc, sur l’assistance aux personnes détenues et le transfèrement des personnes condamnées, signée le 17 décembre 2004 à Rabat (Maroc). Sur les rives de la Méditerranée, des centaines voire des milliers de Sénégalais échouent encore. Sur les côtes africaines, pour le départ ou le transit, des Sénégalais sont souvent arrêtés, emprisonnés, d’autres se fondent dans la nature. Des enfants, des hommes, des femmes et des familles sont partis à jamais. Ou se retrouvent piégés dans des geôles. C’est le cas de certains migrants sénégalais, dans certaines prisons marocaines.
Selon le Bic Gouv, ladite Convention comporte deux parties réparties entre vingt-quatre (24) articles et aborde les questions liées notamment aux conditions du transfèrement, les informations concernant l’exécution, l’escorte et les frais, les conséquences du transfèrement
Ainsi, avec le projet de loi n°03/2025 autorisant le Président de la République à ratifier la Convention sur l’assistance aux personnes détenues et le transfèrement des personnes condamnées, signée le 17 décembre 2004, à Rabat, liant le Sénégal et le Maroc, c’est un début de solution face à ces drames. L’Assemblée nationale du Sénégal examine d’ailleurs ce mardi 11 mars le projet de loi n°03/2025 autorisant le Président de la République à ratifier cette Convention. Dans le dossier de presse qu’il a consacré à ce sujet, le Bureau d’information gouvernementale renseigne que ladite Convention comporte deux parties réparties entre vingt-quatre (24) Articles. Elle aborde les questions de « l’assistance des Consuls aux personnes détenues, la définition de termes et expressions, les principes généraux, les motifs de refus, les conditions du transfèrement, la procédure, les voies de communication, les demandes de transfèrement et réponses, les informations concernant l’exécution, la dispense de légalisation, le choix des langues, l’escorte et frais, les conséquences du transfèrement, la cessation de l’exécution de la sanction, la grâce, l’amnistie et la commutation, la révision du jugement, application dans le temps, application territoriale », entre autres.
Mais, s’empresse d’ajouter la source, l’État d’exécution peut toutefois recouvrer tout ou partie des frais de transfèrement auprès du condamné
A titre d’exemple, l’Article 8 de la Convention dispose que la demande de transfèrement peut être présentée soit par le condamné lui-même ou par son représentant légal qui présente à cet effet, une requête à l’un des deux États ; soit par l’État de condamnation ; soit par l’État d’exécution. L’Article 13 évoque l’escorte et les frais. Et c’est pour préciser que l’État d’exécution fournit l’escorte pour le transfèrement, mais les frais de transfèrement, y inclus de l’escorte, sont à la charge de l’État d’exécution, sauf s’il en est décidé autrement par les deux États. Et si les frais occasionnés exclusivement sur le territoire de l’État de condamnation sont à la charge de cet État, l’État d’exécution peut toutefois recouvrer tout ou partie des frais de transfèrement auprès du condamné. Et le même document d’ajouter que la présente Convention est applicable sur tout le territoire des deux pays, tel qu’en dispose l’Article 23.
La présente Convention est applicable sur tout le territoire des deux pays, tel qu’en dispose l’Article 23
Revenant sur la situation des Sénégalais établis au Maroc, le bureau d’information gouvernementale dira que la communauté sénégalaise vivant au Maroc est estimée à environ 200 000 personnes. Les Sénégalais du Maroc sont principalement concentrés dans les grandes villes telles que Casablanca, Rabat, Fès, Meknès, Marrakech, Agadir et Kénitra. En effet, le Maroc est un pays de destination des migrants sénégalais attirant une grande diversité de profils socio-économiques, mais aussi de transit de candidat à l’émigration irrégulière vers l’Espagne par voie maritime, lit-on dans une note de la Directrice des Sénégalais de l’Extérieur. En plus des traditionnels pèlerins, commerçants et étudiants, on observe de plus en plus des compatriotes exerçant des métiers dans la restauration, le sport, l’agriculture, les personnels de maison ou marchands ambulants. De plus, le Maroc, en tant que carrefour stratégique, attire également un nombre croissant de migrants irréguliers qui vivent de petits boulots en attendant de rejoindre l’Espagne.
299 Sénégalais sont détenus dans les prisons marocaines, dont 160 dans la juridiction du Consulat Général du Sénégal à Dakhla, 93 à Laâyoune, 49 à Bouizakarne et 18 à Tan-Tan et 139 à Casablanca
Quant à la nécessité d’acter le retour de certains migrants sénégalais, le document renseigne que de nombreux compatriotes sont en conflit avec la loi au Maroc ou sont revenus au Sénégal. En ce qui concerne les retours de Sénégalais, 1115 migrants sur 3004 viennent du Maroc, soit 37,16% des retours en 2024. Au titre de l’année 2025, l’on note 180 Sénégalais ramenés du Maroc sur 184 au total, représentant ainsi 97,8% des retours.
38 compatriotes détenus ont exprimé le souhait d’être transférés au Sénégal, selon les services de Mame Gor Ngom
Quant aux Sénégalais détenus dans les prisons marocaines, ils sont au nombre de 299, dont 160 dans la juridiction du Consulat Général du Sénégal à Dakhla, 93 à Laâyoune, 49 à Bouizakarne et 18 à Tan-Tan et 139 dans celle de Casablanca qui couvre le reste du pays.
Les principaux motifs de condamnation concernent l’immigration clandestine, la drogue (consommation et vente), l’association de malfaiteurs et participation à des crimes, faux billets et fausse monnaie, escroquerie et fraude.
À ce propos, 38 compatriotes détenus ont exprimé le souhait d’être transférés au Sénégal. Ce nombre est réparti comme suit : 01 à Khouribga, 01 à Safi Central, 02 à Es-Smara, 02 à Kénitra, 02 à Tan-Tan, 03 à Nador, 03 à Ait Melloul Agadir, 11 à Laâyoune, 13 à Bouizakarne. Parmi ces demandeurs, 10 sont condamnés à des peines allant de 03 à 25 ans, ajoute le Bic Gouv.
“C’est sans aucune réserve que les Ministres des Affaires étrangères des deux pays ont signé ladite Convention”, ajoute le “Bic Gouv”
Pour ceux qui ne le savent pas, la coopération judiciaire entre la République du Sénégal et le Royaume du Maroc remonte aux années 1960. Le 3 juillet 1967, à Rabat, les deux pays ont signé la Convention de coopération judiciaire, d’exécution des jugements et d’extraction. Dans la situation de référence établie par le ministère sénégalais de la Justice, il ressort que cette Convention de coopération judiciaire présentait des lacunes en ne prévoyant pas de dispositions relatives à l’assistance aux personnes détenues et au transfèrement des personnes condamnées.
C’est ainsi que sur initiative des deux États qui ont senti le besoin de renforcer leur coopération judiciaire afin de favoriser la réinsertion sociale des personnes condamnées et leur permettre de passer le reliquat d’une peine privative de liberté dans leur milieu social d’origine, le Gouvernement de la République du Sénégal et celui du Royaume du Maroc ont signé, à Rabat, le 17 décembre 2004, une Convention portant sur l’assistance aux personnes détenues et le transfèrement de personnes condamnées.
“Il s’agissait de disposer d’un cadre juridique moderne apte à apporter l’aide et l’assistance nécessaires aux sénégalais poursuivis ou condamnés au Maroc”
Selon les services de Mame Gor Ngom, les consultations techniques qui ont abouti à la signature de la Convention judiciaire ont porté sur les conditions et modalités de l’assistance aux personnes détenues et sur le transfèrement des personnes condamnées. Et c’est sans aucune réserve que les Ministres des Affaires étrangères des deux pays ont signé ladite Convention, ajoute le “Bic Gouv”. Il s’agissait de disposer d’un cadre juridique moderne apte à apporter l’aide et l’assistance nécessaires aux sénégalais poursuivis ou condamnés au Maroc notamment pour des faits relatifs à l’immigration clandestine afin de leur permettre de purger le reste de leurs peines au Sénégal. Cette Convention de 2004 permet également la modernisation des instruments de coopération conformément aux standards internationaux.
Selon la même source, les avantages pour le Sénégal de ratifier la Convention tournent autour de différents axes. Il s’agit de développer un leadership au niveau régional ; étendre son réseau de coopération en matière judiciaire et sécuritaire dans la région ; mais aussi garantir la sécurité juridique et judiciaire des concitoyens sénégalais au-delà de nos frontières.
Au plan social, la mise en œuvre des accords offre de meilleures conditions de réinsertion aux Sénégalais condamnés au Maroc, rassure le document. Et sur le registre juridique et administratif, la Convention ratifiée entre dans l’ordonnancement juridique du Sénégal.
Amadou DIA (Actusen.sn)