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Ndiack Fall, pénaliste à l’UCAD : «Aussi bien  Karim Wade que Khalifa Sall peuvent se présenter à la Présidentielle de 2019, selon la loi… »

D’après le Professeur de Droit pénal, Ndiack Fall, rien n’empêche Karim Wade de se présenter à la prochaine élection présidentielle de 2019. En effet, dans un entretien téléphonique accordé à SourceA, l’Enseignant à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar a indiqué que la Cour de Répression de l’Enrichissement Illicite(CREI), qui a condamné le fils de l’ancien président libéral Abdoulaye Wade à une peine de 6 ans et à une amende de 138 milliards de nos francs, ne l’a pas privé de ses droits civique, civil et politique. Dès lors, précise notre interlocuteur, le candidat du Parti démocratique sénégalais est éligible, même si quelques dispositions du Code électoral s’opposent à cette candidature.

Abordant le cas Khalifa Sall, condamné en première instance à 5 ans de prison, le pénaliste soutient que celui-ci reste, aux yeux de la loi, électeur et éligible. Ce, dit Ndiack Fall, même en restant sous les verrous. Car, assume le Professeur, «tant que les voies de recours ne sont pas épuisées, khalifa Sall bénéficie de la présomption d’innocence». Ce qui fait de lui un citoyen comme les autres.

La polémique, qui entoure l’éligibilité ou non de Karim Meissa Wade, refait surface. Cette fois-ci, entendons-nous bien, il ne s’agit pas de discours de politiciens, au détour desquels chaque camp tente de tirer la couverture  de son côté, en faveur, bien sûr, des intérêts crypto personnels qui l’animent. L’on sait que le camp présidentiel a cherché, à tort ou à raison, à disqualifier le candidat du Parti démocratique sénégalais de la compétition électorale de 2019. De même, l’opposition, dans sa quasi-totalité, a défendu, bec et ongle, la thèse de la présidentiabilité de l’ancien tout puissant ministre sous l’ère de son Père.

A la question de savoir à quelle plaidoirie se fier, si, dans un pays, comme le nôtre, certains spécialistes des questions juridiques utilisent le principe de l’interopérabilité du droit, pour interpréter le droit, selon les humeurs de son obédience politique.

Ceci est, d’ailleurs, un secret de polichinelle de dire que les politiques «modifient» notre droit, comme ils le veulent pour plaire à leur camp surtout, s’ils accèdent au trône. Conscient de ce jeu, qui n’honore pas nos charmants textes juridiques, votre canard a déniché un spécialiste des questions pénales et pas des moindres, en tout cas, puisque les universitaires ont tendance à orienter ceux qui veulent être éclairés sur la question pénale, vers ce brillant homme, dont la probité morale ne souffre d’aucun doute. Et qui fait partie des premiers dans ce pays à disqualifier la Cour de Répression de l’Enrichissement Illicite qu’il juge comme une juridiction juridiquement illégale, du simple fait du renversement de la charge de la preuve. Bref, le Professeur Ndiack Fall s’est refusé de verser dans des analyses légères ou partisanes des situations politico-judiciaires de notre pays.

Joint par téléphone, le Professeur de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD) a voulu différer l’entretien téléphonique, pour, dit–il, avec humilité, revisiter ses «cours», en vue de ne pas trahir le droit. Car, insiste-t-il, il s’évite de livrer des analyses qui entachent sa réputation qu’il s’est construite, depuis tant d’années. Après que nous l’avons briefé et lui avons donné le temps de revoir sa documentation, le Spécialiste des Questions pénales décide, enfin, de se prononcer. Et, avec son franc-parler, il n’a pas mis de gants sur l’éligibilité ou non de celui qui a été condamné par la CREI pour enrichissement illicite, avant de bénéficier d’une grâce présidentielle, dont les contours sont obscures comme les ténèbres.

«Karim Wade est électeur et présidentiable… »

Pour le Pr Ndack Fall, dire que Karim Wade ne peut pas se présenter en 2019 à l’élection présidentielle, relève d’une méconnaissance du droit, ainsi que de la décision de la juridiction d’exception qui lui a collé une peine de 6 ans assortie d’une amende de près de 138 milliards de nos francs. En effet, d’après lui, rien n’empêche celui dont la nationalité exclusivement sénégalaise suscite encore des doutes d’engager une procédure qui lui permettrait d’accéder à la Magistrature suprême. Ce qui va, certainement, déranger le camp présidentiel qui ne va pas avaler cette vérité «scientifique».

Dans «son cours magistral», Ndiack Fall explique, en guise de rappel, que le fils du Président désavoué par le peuple sénégalais en 2012 a été certes condamné par la CREI, mais cette décision de justice ne l’a pas privé de ses droits politique, civil et civique. Donc, le juriste, s’est voulu clair : la candidature de Karim est bel et bien constitutionnelle, au vu de l’ordonnance de la CREI qui lui a garanti ses droits qui lui permettent de briguer le suffrage des Sénégalais.

«Certaines dispositions du Code électoral constituent un obstacle à sa candidature…»

Malgré «cette chance» offerte à Karim Wade, le Spécialiste du droit soulève, néanmoins, un certain nombre d’obstacles à sa candidature. En effet, notre interlocuteur a tenu à préciser que, même si Karim a la latitude de se présenter en 2019, il n’en demeure pas moins que le Code électoral constitue un blocage à cette aventure politique. L’Enseignant à l’UCAD trouve même paradoxale la situation qui se dresse en face de lui, c’est-à-dire la condamnation de Karim Wade par la CREI qui ne le prive pas des droits susmentionnés et les dispositions du Code électoral qui obstruent sa migration vers le Palais présidentiel.

Au bout du fil, l’éminent Professeur n’a de cesse répéter qu’il y’a un réel paradoxe entre la Code électoral et la décision de la CREI. Pour, ainsi, dire que «rien n’empêche Karim de se présenter à la prochaine Présidentielle, mais le Code électoral lui est défavorable à un certain niveau».

Ainsi, dans ses éclairages, le Professeur d’indiquer que l’article L 31 du Code électoral stipule que ne doivent pas être inscrits sur les listes électorales, les individus condamnés pour crime, ce qui n’est pas le cas pour Karim, condamné à une peine d’emprisonnement sans ou avec sursis supérieur à un mois assorti ou non d’une amande pour vol, détournement, corruption, trafic d’influence, escroquerie ect.. et en général pour l’un des délits passibles d’une peine de 5 ans d’emprisonnement, alors que Karim a été condamné à 6 ans. Ce qui le disqualifie, selon lui, avant de souligner aussi que d’après l’article L 115 du même Code qui traite du dossier de candidature, il est clairement dit que le candidat doit jouir de ses droits civique, civil et politique, conformément aux dispositions du titre premier du Code électoral (L31).

«Seulement, dans le Casier judiciaire du candidat libéral, il figurera la condamnation qui est l’un des freins à son ascension vers le sommet»

De plus, si l’on se fie aux explications du Professeur, un autre obstacle se dresse devant Karim Wade, à savoir les dispositions de l’article L116 du Code électoral qui prévoit que la déclaration de candidature doit être accompagnée d’un bulletin numéro trois du Casier judiciaire de moins de trois mois. Or, précise le juriste,  ce bulletin mentionne, forcement, la condamnation de du fils de l’ancien Président de la République.

Ce qui corse, certainement, les choses pour l’accession de Karim Wade au palais. S’agissant de la grâce présidentielle accordée au candidat du Parti démocratique sénégalais à la Présidentielle de 2019, Ndiack Fall explique que cette décision «est une dispense d’exécution de la peine, mais elle n’efface pas la peine». Donc, conclut-il, dans le Casier judiciaire du candidat libéral, il figurera la condamnation qui est l’un des freins à son ascension vers le sommet. Ce qui revient à dire, selon le juriste, que si Karim Wade devait se présenter à la prochaine Présidentielle, il verrait sa candidature rejetée par le Code électoral.

 «Rien ne s’opposerait, juridiquement, au retour de Karim Wade au Sénégal… »

Autre sujet, le retour de Karim Wade au Sénégal. D’aucuns ont estimé que cette possibilité n’est pas permise au fils de Me Abdoulaye Wade, du seul fait que, selon même certains juristes, le candidat du PDS ne s’est pas encore acquitté de l’amende de 138 milliards qui lui a été infligée par la CREI. Et que, sans quoi, il pourrait, selon toujours ces derniers, retourner en prison. A ce sujet, Ndiack Fall indique que cette analyse n’a aucun fondement juridique, en ce sens qu’il a été gracié, ce qui veut dire que «la peine est purgée parce que la grâce est une dispense d’exécution de la peine».

Par ailleurs, le Professeur a mentionné que des biens de Karim Wade ont été saisis au Sénégal, tout comme à l’étranger, même si la tentative de saisie s’est soldée par un échec. Donc, le spécialiste du Droit indique que «si Karim était emprisonné, à son retour, cette décision risquerait d’être préjudiciable à l’autorité».

«Khalifa Sall est électeur et éligible, même en restant en prison… »

Interpellé sur l’affaire Khalifa Sall ou du moins sur sa possibilité de se présenter à la prochaine Présidentielle, Ndiack Fall se veut clair. Rien n’empêche Khalifa de présenter sa candidature en 2019 pour briguer les suffrages des Sénégalais. En effet, certes, il a été condamné, mais cette décision n’est pas définitive. Donc, poursuit-il, «tant que les voies de recours ne seront pas épuisées (appel, cassation), Khalifa Sall bénéficie, selon la loi, de la présomption d’innocence, ce qui lui donne le droit de se présenter à la compétition électorale qu’il voudra». Pour être plus clair, l’Enseignant à l’UCAD de dire que, même en prison, khalifa Sall est considéré, aux yeux de la loi, comme électeur et est éligible.

En outre, Ndiack Fall soutient que le maire de Dakar, même dans les liens de la détention, peut être élu Président de la République. Et, si cela advenait, l’édile de la ville de Dakar sortirait, forcement, de prison, car, dit-il, «rien n’est au-dessus des suffrages des Sénégalais». Même s’il admet que, selon le Code pénal, Khalifa est exclu de la course électorale, provisoirement, puisque sa condamnation se situe dans l’intervalle de 5 à 10 ans.                                                                                                                               

Aliou KANE

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3 commentaires

MD 06/04/2018 - 20:01 at 20:01

Ils ont appris à conduire, ils savent conduire, ils ont déjà conduits mais on leur a retiré leur permis de conduire, donc interdit de conduire …….
C’est simple, c’est ce qui s’appelle parler pour ne rien dire, il est fort le Professeur ……

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ibk 07/04/2018 - 00:52 at 00:52

erratum: velléités partisanes

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Madiba Mwalimu 07/04/2018 - 12:38 at 12:38

Merci Professeur. Excellent éclairage d’un spécialiste.

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